Louisa Hanoune et le mandarinat politique en Algérie

La Camarade Louisa Hanoune après avoir servi le régime algérien se met, aujourd’hui, à le dénigrer et à réclamer  son départ. Comme tous les gauchistes infantiles, elle occulte les processus politiques, sociaux et économiques et se contente d’énumérer quelques « bonnes intentions » aussi inefficaces que stériles. Si on expurge de son discours les attaques affectives contre quelques ministres « techniques » il ne reste que deux choses :

1 – Le changement en Algérie avant l’ultime catastrophe.

N’est-ce pas que charité bien ordonnée commence par soi-même. Avant de demander le changement il faudrait sans doute commencer par l’appliquer au sein de son Parti. A l’instar des autres appareils partisans et idéologiques le parti trotskiste a contribué à éradiquer le syndicalisme algérien et les luttes de classes. L’urgence est justement de rétablir la lutte des classes, via les syndicats, comme moteur puis comme garant de la pratique démocratique en rendant transparents les conflits sociaux, politiques et économiques par lesquels une société vivante régule les intérêts et trouve le compromis « dialectique » le plus adéquat au lieu et au moment. Sans ces luttes il ne peut y avoir qu’une alternative : la violence.  La  violence armée de l’Etat ou celle de ses opposants islamistes, laïcistes ou berbéristes est non seulement le constat d’échec politique, mais l’aventurisme sur lequel se construisent d’autres rentes, d’autres maffias et d’autres pouvoirs illégitimes sur le plan du droit et du sens républicain qui ne peut provenir que du consensus politique et juridique (Constitution) des habitants à vivre ensemble, pour un intérêt majeur commun et en liberté sous un gouvernement élu et révocable selon des modalités convenues faisant force de loi suprême pour tous sans exception.

N’est-ce pas qu’il absurde voire impossible de concevoir la liberté et son corollaire, la Constitution qui donne existence à la citoyenneté et à l’alternance démocratique, lorsque ceux qui la revendiquent exercent au niveau de leur parti l’autocratie et la présidence à vie.  Le mandarinat politique est antinomique avec la République et la Démocratie. Même du temps de la Chine archaïque et impériale les mandarins qui forment l’élite politique sont des gens qui parviennent à leur niveau social et politique par des concours et des compétitions. Leur statut est toujours remis en cause par les nouveaux prétendants. Le mandarinat impérial était une méritocratie. L’Algérie a produit des médiocraties à vie avec en sus l’arrogance et le bavardage. Dans le jargon marxiste-léniniste le mandarinat est synonyme de caporalisme. Le caporalisme signifie l’autorité politique exercée sous la tutelle des règlements militaires.  Le caporalisme signifie aussi la mise sous tutelle du peuple par la démagogie populiste et politicienne. Le caporalisme ne signifie pas toujours la présence des militaires, mais surtout celle de la bureaucratie.

Les partis politiques algériens, au pouvoir ou dans l’opposition, sont de véritables appareils bureaucratiques dont le rôle est de parler au nom du peuple pour le caporaliser et le domestiquer comme un troupeau servile à qui on donne un mangeoire qu’on remplit par l’alternance de l’offre de  de la rente et celle des coups de bâtons afin que ce peuple obéisse d’une manière ponctuelle et sans réfléchir aux injonctions des appareils.

La caporalisation est effectivement un processus de réification qui transforme une multitude diverse mue par des intérêts divergents et trouvant le compromis de vivre ensemble d’une manière dynamique voire dialectique en une foule abstraite, indifférenciée, sans lutte ni perspective que de se mouler dans une forme insignifiante et inerte.

2 – Revenir au monopole de l’Etat sur le commerce extérieur.

Louisa Hanoune ne porte pas une critique contre le régime en place et ne propose pas de solution : elle exprime la nostalgie d’un pouvoir autoritaire à l’image du bolchévisme stalinien  rendu plus sectaire par Trotski « le révolutionnaire professionnel », mais plus fragile aux infiltrations et aux manipulations des officines de l’armée et de la CIA .  A ce sujet je conseille la lecture de Denis Boneau :  « Quand la CIA finançait les intellectuels européens », étude détaillée sur la mise en place d’un réseau d’intellectuels pro américains des années 50 à nos jours dont ceux qui se réclamaient du trotskisme.  Le Trotskisme, à l’instar de son fondateur idéologique, est expert dans la liquidation de toutes les oppositions (libertaires ou révolutionnaires) par le principe même du monopole idéologique et de la caporalisation des mouvements ouvriers. Il partage avec les Frères musulmans le même principe d’entrisme politique et de collaboration de classes. Là où le frérisme et le trotskisme sont présents et alliés il n’y a plus de luttes sociales, mais collaboration avec le régime en place contre l’opposition. Encore une fois ils ne sont pas alliés des travailleurs et des salariés (ex prolétariat) mais ils sont à l’assaut des appareils pour les infiltrer et prendre le pouvoir le moment voulu en récupérant les émeutes, les révoltes, les insurrections et les révolutions populaires, mais si le vent change ils se détachent et apportent leur collaborations sous le fameux slogan opportuniste «  le soutien critique ». Donc en crise les solutions proposées sont d’ordre idéologique et traditionnel. Ni en Algérie ni en France ni ailleurs le troskisme n’a été porteur d’un véritable projet de réforme et de changement : la critique pour la critique sur le plan du discours et la collaboration conscience ou inconsciente à la stratégie géopolitique du capitalisme.

Les Algériens ne veulent pas revenir à la pénurie. Les moins jeunes savent que c’est le système ancien fondée sur la pénurie et le monopole du commerce extérieur qui sont la cause principale, à côté du déni de liberté et de justice, de l’économie informelle, du démantèlement de l’appareil industriel, et de l’émergence d’une mafia financière et économique allié du pouvoir politique. Personne n’ignore que la bataille actuelle qui se joue en cette fin de règne est celle que se livre les clans pour maintenir leur domination politique et économique et rendre impossible le changement sinon rédhibitoire en termes de vie humaine et de répression.

Louisa Hanoune a servi ce régime et s’il doit couler, elle coulera avec.

Si elle veut aider véritablement les Algériens et les élites nobles et compétentes qui sont encore en service dans l’armée, la police, la douane, l’économie, les finances, les syndicats et les entreprises elle doit s’opposer au retour en arrière et lutter pour aller de l’avant plus vite, plus sincèrement et plus efficacement.

Abstraction faite du changement radical qui se fera un jour ou l’autre, avec nous ou contre nous, dans la paix ou dans la violence, plutôt dans la paix inchaallah au lieu d’aller vers le passé il faut opérer d’urgence les réajustements suivants :

A – Interdire tout monopole et mettre tous les Algériens en situation de droit et de moyens pour exercer une concurrence selon les règles de l’art européennes.

B – Dans toute activité commercial seul le droit est arbitre tant pour délivrer un registre de commerce que pour contrôler les fraudes, la corruption et les collusions d’intérêts privés et publics.

C – Réformer le système bancaire pour que ne soient en usage et en vigueur le chèque et la carte de crédit adossés à une facture vérifiables et traçable par l’inspection des finances.

D –  Laisser les mécanismes de l’offre et de la demande faire leur œuvre dans la transparence. Nul ne doit bénéficier d’une exception, d’une dérogation ou d’un passe-droit.

E – Laisser la banque gérer les crédits et assumer les risques qui en découlent

F – Donner la garantie aux journalistes et aux enquêteurs de faire leur travail sans entraves ni pression.

G – Chaque algérien devrait s’acquitter de ses devoirs de solidarité en payant l’impôt sur le revenu, sur la fortune et sur le bénéfice. Mettre fin aux subventions et au soutien des prix. Les aides sociales sont un devoir public et citoyen ainsi qu’un droit pour les faibles et les démunis par une allocation conséquente, juste, traçable et personnalisée.

H – L’égalité des citoyens en matière d’entreprenariat et de commerce qui accorderait un financement en devises à tout demandeur, en l’état actuel des choses, est une utopie qui ruinerait l’Algérie par l’hémorragie des devises et l’absence d’une véritable culture citoyenne. Il y a deux solutions plus simples et plus efficaces sur le plan du principe, mais qui demandent une grande compétence technique et un grand engagement politique :

  • H1 – Mettre fin à la convertibilité du dinar sur le marché noir par trois mesures :
    • H11 – Ajustement du taux de change et bureaux de change accrédités et assermentés fonctionnant sous l’autorité et le contrôle de la Banque centrale
    • Le seul change « autorisé » sous forme de crédit documentaire ou autre procédure de paiement international est celui en rapport avec l’investissement ou le fonds de roulement des investisseurs dans l’industrie, l’agriculture et les nouvelles technologies
  • H2 Repenser le concessionnariat en interdisant aux Algériens d’êtres concessionnaires ou distributeurs de produits et services produits hors Algérie. En Algérie les centrales d’achat de produits étrangers doivent être similaires à celles en vigueurs dans les pays étrangers d’origine avec le respect d’au moins cinq (5) principes :
    • Les mêmes avantages, les mêmes garanties en termes de modalités de paiement, de qualité et de service doivent être assurées aux Algériens. Qu’apportent les pseudo concessionnaires Peugeot, Mercedes et Cie en termes de transfert de ce qu’on appelle « l’industrialisation des services ou la quaternisation de l’économie ». Rien ! Qu’apportent-ils en termes de qualité ? Quel est le changement par rapport à l’ex SONACOME, Rien. Par contre les incidences négatives en termes de consommation effrénée, de crédit, de nuisance écologique et d’embouteillage sont énormes… La destruction de l’industrie mécanique en Algérie est irrécupérable.
    • Les mêmes risques d’entreprises et les mêmes critères de concurrence doivent être prises par les centrales d’achat installées en Algérie. Il appartient aux Algériens de sanctionner par la loi du marché l’efficacité économique des zones commerciales « franches » installées.
    • L’Algérien, n’importe lequel, titulaire d’un registre commercial et d’une couverture bancaire ou d’un prêt bancaire, peut exercer l’activité de grossiste. Aucun grossiste ne devrait avoir le monopole sur un produit ou une activité. Aucun commerçant ne devrait échapper à la fiscalité et au contrôle des fraudes. Aucun commerçant ne devrait être autorisé, par le code du commerce et par le règlement bancaire, à accomplir une activité s’il n’en a pas les compétences techniques ou l’expérience professionnelle. Cela suppose la mise en place d’un plateau technique de formation appropriée et conséquent.
    • Faciliter la création d’entreprises et le partenariat mixte en amont et en aval des centrales d’achat étrangères et nationales aussi pour accroître l’intégration technologique, développer les services, réduire les couts en devises, se mettre à exporter et créer des emplois et de la valeur ajoutée. La fiscalité et le système bancaire, ici et ailleurs sont le principal levier.
    • Rendre les prix et les pratiques commerciales transparentes et vraies. A titre d’illustration de la fausseté : La visite de la foire internationale d’Alger suffit pour dévoiler l’absence de la participation étrangère. On ne voit que les importateurs et les distributeurs algériens sous le nom des marques étrangères et on voit la multiplication des mêmes marques et des mêmes produits dans plusieurs stands différents. Ceci dénote le niveau du respect de l’authenticité de la marque et de la propriété industrielle et intellectuelle par les opérateurs algériens.

I – Eponger et assainir le marché national en changeant de monnaie. Il faut créer un nouveau dinar et rapatrier les liquidités colossales (des milliers de milliards de dinars cachés) vers les banques et institutions financières.

J – L’Algérie devrait apprendre à travailler « normalement » c’est-à-dire sans esprit rentier. Dans chaque lieu de production de biens et de services, la productivité du travail devrait être évaluée, améliorer et payer à sa valeur. Cette valeur devrait être liée aux conditions du marché selon une péréquation simple et vérifiable à trouver et à appliquer entre la productivité du travail, le salaire moyen, le prix moyen et le revenu national pour dégager du surplus, garantir le pouvoir d’achat et accroire les performances du travail.

Observation sur la gravité de la situation

Le ministère de l’économie et des finances, les services de police, la justice et les journalistes doivent enquêter et éclairer l’opinion public sur les sources, les circuits et l’usage du change au noir. Lorsque l’argent provient de l’émigration et utilisé pour financer l’économie de la valise, l’artisanat et la petite entreprise, combler la pénurie alors des solutions transparentes et favorisant les principaux acteurs peuvent être trouvées et mise en oeuvre. Les universitaires turcs et les services spécialisés turcs sont parvenus à réglementer et à contrôler le commerce par la valise et à en faire un dispositif légal et utile sur le plan social et économique tant dans le commerce intérieur que dans le commerce extérieur avec l’Afrique du Nord, la Russie, la Pologne, la Bulgarie… Lorsque l’argent provient du blanchiment d’argent, de la corruption, des ristournes sur contrat d’importation la seule chose est le renforcement des appareils de justice et des organes de répression contre le banditisme et la fraude. Cela va au-delà de la corruption.

Il s’agit d’un véritable crime économique qui assassine le producteur, le consommateur et le percepteur des impôts. Dans la réalité des faits c’est pire qu’un crime économique car les réseaux sont tellement bien organisés et bien nantis financièrement (plusieurs milliers de milliards hors de contrôle) qu’ils sont capables non seulement de peser sur les décisions politiques et l’opinion publique, mais de lever une armée de mercenaires qu’ils peuvent puiser dans la délinquence et dans la quête de gain facile dans un pays de plus en plus réfractaire à la loi, à la vertu et à la foi. Le potentiel de mercenariat existe bel et bien et il peut être utilisé par les officines nationales ou étrangères pour des opérations de subversion, de sape, de guerilla ou de baltajia (comme en Egypte) ou de guerre civile sinon pour des mesures de pression politique et sociale pour obtenir des concessions stratégiques en termes économiques ou géopolitiques. Personne ne semble tirer les leçons sur la décennie noire et rouge… Même si le scénario pessimiste ne se réalise pas et ce que nous souhaitons, un autre scénario est déja réalisé : l’émergence d’une bourgeoisie parasitaire qui a rendu légitime l’appropriation illégitime du capital foncier, industriel, immobilier et marchand. Cette bourgeoisie n’est pas révolutionnaire comme la bourgeoisie européenne qui avait libéré les forces de production de la féodalité stérile, c’est une bourgeoisie sans culture, sans projet pour l’Algérie, c’est une classe de prédation vorace, nihiliste et cynique. Dans le cas fort probable que le président Bouteflika décède ou qu’il ne se représente plus comme candidat aux présidentielles alors un scénario est fort possible : l’argent informel peut construire des partis et financer la campagne électorale pour faire élire son homme. Il peut faire plus : payer l’électorat pour faire élire son homme et « matraquer » au sens littéral les électeurs qui s’opposent à cet homme. La suite découle de cette logique suicidaire : le gouvernement, l’APN et les APC seront phagocytés par l’argent sale. Les Gog et Magog seront les prédateurs triomphants. Toute opposition populaire, militaire ou clanique (autres forces de l’argent) ne fera que précipiter la guerre civile, car chacun n’a pas de légitimité morale et politique pour arbitrer et tous ont des prétentions d’hériter du système délabré : les uns évoquant leur puissance financière, les autres leurs relais à l’étranger, d’autres encore leur victoire sur le terrorisme islamiste. Louisa Hanoune est dans la périphérie proche du pouvoir  et elle commence à sentir la détresse qui s’empare du bateau en naufrage sans cap ni boussole ni vigie ni gouvernail ni carte…

Si les pseudo partis de gauche, convertis plus tard à l’économie de marché et à la rente politique et culturelle, avaient soutenu les travailleurs algériens, jamais les syndicats algériens n’auraient laissé l’appareil productif se faire démanteler, se faire privatiser, se mettre en ruine… Lorsque au début des années 80 l’Algérie a décidé, contre le bon sens et contre les sacrifices consentis par le peuple, à restructurer les entreprises algériennes, la gauche algérienne,  la seule présente dans les rouages économiques,  les appareils bureaucratiques  et les secteurs  industriels n’avait ni protesté ni « lutté ». L’intelligence la plus élémentaire disait pourtant que le clé en main ou le produit en main ne pouvait que nous mener vers l’impasse et qu’il fallait reconsidérer l’industrialisation en donnant plus d’importance à la fonction managériale de l’entreprise, à la concurrence, à l’algérianisation des études de conception et surtout à inverser la méthodologie de production : on ne devait plus produire pour produire, mais produire pour un marché qu’il fallait analyser, réglementer. Le potentiel de cadres et de technicien disponibles était tel que nous pouvions dès les années 80 engager le développement sur le software, les télécommunications et l’informatique tout en relançant le secteur agricole pour lequel l’industrie mécanique a été édifiée. A quoi sert de noyauter les institutions, les appareils  et les organes du pouvoir et de la communication si à la fin vous  sacrifiez les intérêts de l’Algérie pour une minable rente. A quoi ça sert d’emmener un peuple vers une guerre civile si à la fin vous livrez ses enfants et ses petits enfants à des prédateurs nationaux et internationaux.

Le seul rempart est la démocratie protégée par les syndicats revendicatifs et les partis politiques nationalistes…

Si les Algériens ne se réveillent pas maintenant, ils seront réveillés demain par le démantèlement de leur territoire.

Il ne s’agit pas de noyer le poisson dans l’eau, mais de faire des propositions de modernisation de l’économie. Avant de faire ces propositions, de les détailler et  de les revendiquer comme une solution de modernisation  ou comme une plateforme de changement salutaire il faudrait d’abord commencer par appliquer le principe de liberté et d’alternance démocratique au sein des appareils de l’opposition si elle veut être audible et crédible.

Le véritable programme de changement est bien entendu l’instauration de la liberté – liberté d’expression, de pensée, de croyances, d’entreprise – qui exclut la culture d’éradication de la différence. Une fois la liberté exercée alors les divergences et les conflits se règlent par le compromis social et politique où chacun non seulement concède à l’autre, mais apprend et prend de l’autre sans exclusive ni exclusion. C’est cet esprit libertarien qui va mettre chacun au service de tous sans dictature d’un seul contre tous ou de la dictature du tout sur une partie ou un élément. Cette culture élémentaire fait défaut dans les partis et les groupes qui revendiquent le changement et la démocratie ou l’Islam et la cité de Médine.

Louisa Hanoune à l’instar des autres  appareils idéologiques en Algérie n’est pas partisane du changement, mais du statut quo dans sa forme ancienne ou dans sa forme actuelle. L’Algérie est vraiment malade de ses élites. Pour le comprendre davantage il faut juste entendre Monsieur Chakib Khélil le prétendant « informel et presque désigné » au remplacement du Président Bouteflika : « La langue anglaise est la langue du progrès… tous les pays qui ont conservé le français sont des pays attardés ». Ce monsieur n’a toujours pas compris que la langue qui véhicule le progrès ou la décadence est celle d’un peuple  libre ou opprimé, d’une élite noble et généreuse ou d’une élite servile et imbécile. La langue ne fait que véhiculer des cultures, des idées et des valeurs, un peuple vivant fabrique ses mots et ses concepts, un peuple mort et inerte n’est même plus capable de parler sa propre langue. Ne possède t-il pas une ouïe et des yeux pour voir ce que font les Russes, les Chinois et les Allemands. Ne comprend-il pas que les pays anglophones ou francophones d’Afrique sont confrontés aux mêmes problèmes de développement socio économique et aux mêmes sequelles du colonialisme?  N’a-t-il pas médité l’histoire  pour comprendre que l’empire colonialiste français et britannique  s’inspirent de la même idéologie : le colonialisme raciste et éradicateur. La seule différence est que le français est brutal poussant à la révolte alors que l’anglais est subtil poussant à une assimilation de l’indigène.

Il ne sait toujours pas que la langue d’avenir est l’espagnol lorsque l’effondrement des USA deviendra réalité dans quelques années. Il ne sait pas que la langue arabe est celle qui porte intrinsèquement toutes les possibilités pour demeurer langue vivante alors que l’anglais a déjà épuisé son lexique et qu’il ne produit plus de vocabulaire nouveau en dehors des néologismes technologiques. Il ne sait pas encore que le débat culturel en Algérie n’est pas encore clos entre l’arabe, le français et le berbère et qu’il lui faut un temps de liberté pour exprimer tous ses rancœurs et tous ses désirs et s’apaiser pour un choix rationnel qui ne sacrifie aucun intérêt. L’école algérienne est déjà catastrophée, quelle catastrophe vient-il nous annoncer avec de nouveaux clivages linguistiques.

Ces gens là, de gauche ou de droite,  ne connaissent rien aux fondements de l’idéologie qu’ils suivent aveuglement. Ils  ne connaissent rien à l’Algérie, à ses souffrances, aux désirs de ses enfants et encore moins à l’économie et à la politique. L’esprit bien vacant laissé par la France et la culture indu occupants des indigènes de 1962 sont ancrés dans la tête minuscule de ces calamités. Lorsque ces calamités s’expriment ils donnent aux étrangers qui nous pilotent et à nous les Algériens qui endurons ce viol que l’Algérie est effectivement une « foule d’incohérences » que rien ne peut organiser ni cimenter.

 

Gilbert Meynier : France Algérie: 1830 -1962

Introduction

L’histoire de l’Algérie de 1830 à 1962 est celle d’un conflit algéro-­français. La conquête du pays maghrébin fut sanglante. Elle ne se termina pas avec la reddition de l’émir et chef militaire Abd el-­Kader en 1847 ; pas davantage avec la soumission de la Kabylie dix ans plus tard. Périodiquement, ici, des révoltes, pouvant s’étendre en insurrections, là, l’insécurité endémique dans certaines régions, secouèrent la quiétude toujours aux aguets des conquérants. Tout cela traduisait le désespoir et la haine des bas-fonds ruraux, des paysans chassés de leur terre et matraqués. Le florilège des injures à l’égard du rûmi, du gawrî (le chrétien, l’infidèle), le rêve millénariste de la venue du mûl al-sa’a (le maître de l’heure), rejoignant l’espérance en un débarquement ottoman salvateur en 1914, tout indique une constante : la résistance à l’oppression vécue, l’espoir d’une émancipation.

La guerre d’Algérie n’a donc pas commencé en 1954. La pax gallica fut largement vécue comme une attente patiente de la libération : il y eut, dans l’Aurès (nord-est) insurgé en 1916, de jeunes maquisards pour se révolter en 1926, puis en 1945 et reprendre du service en 1954 la cinquantaine passée… Ceux qui assumèrent principalement la violence conquérante professionnelle impersonnelle furent naturellement les militaires français. Mais ce fut, aussi, le même milieu armé qui manifesta le plus de scrupules et de mauvaise conscience à l’égard des Algériens vaincus et dominés.

Les militaires ménagèrent, d’une main, à l’égard des vaincus un système de compensations exorcisant les agissements de son autre main. Le pouvoir guerrier paternaliste marqua de son empreinte toute une tradition polyvalente de l’administration des « indigènes », des Bureaux arabes aux Sections administratives spécialisées (des années 1950 (1). Curiosité et sympathie, étude de l’islam, apprentissage de l’arabe, connaissance approfondie du « terrain indigène », dévouement aux œuvres sociales, firent de bien des officiers les plus lucides des Français en Algérie. Le maréchal Thomas-Robert ­Bugeaud (1784-1849) lui-­même l’avait quittée en 1847 sur l’avertissement adressé aux colons qu’ils auraient un jour à payer leurs arrogances et leurs mépris. Napoléon III comprit cette situation et tenta d’y remédier par la politique du « royaume arabe » qu’il demanda aux militaires d’appliquer (2).

La victoire des républicains


Ce fut l’hostilité des civils « républicains » contre le « régime du sabre » impérial, répercutée à Paris, qui vint à bout de la tentative de « royaume arabe » conçu par l’empereur sur les conseils d’un apôtre de l’« indigénophilie », le journaliste ­Ismayl Urbain (1812-1884), et appliqué par des officiers des Bureaux arabes comme le général Ferdinand-­Auguste ­Lapasset (1817-1875). Significativement, le dernier gouverneur de l’Algérie à n’avoir pas ignoré la langue arabe fut un général, ­Alfred ­Chanzy (1823-1883), qui administra la colonie entre 1873 et 1879. Il fut rappelé de son poste au moment même du triomphe définitif de la République (3). Cette victoire fut en Algérie celle des civils. Ceux-ci étaient déterminés à régner sans partage sur la masse algérienne vaincue et appauvrie. Ils y trouvaient leur intérêt, l’assouvissement de désirs de pouvoir de ci-devant marginaux (les révoltés de 1848, ceux de 1871), la solution fantasmatique à leurs angoisses latentes de dominateurs minoritaires menacés de submersion par une masse hostile.

Pourtant, ces civils (4) formaient une communauté obligée de cohabiter avec la société dominée. Davantage que des administrateurs professionnels, ils étaient tenus à lancer au quotidien des passerelles avec les Algériens. Il y eut des colons « de gauche », des journaux « indigénophiles » à tonalité jacobine, socialisante ou libertaire, dont les démêlés avec l’autorité coloniale furent incessants. La situation de nombre de petits colons fut souvent misérable. L’un d’eux, ­Victor ­Spielmann (1866-1938), Alsacien de France après la guerre de 1870, fut dans la première moitié du XXe siècle, un infatigable militant de l’émancipation des « indigènes ». Il fut le directeur des éditions Trait d’union et du quotidien du même nom, le fervent conseiller de l’émir ­Khaled (1875-1936) et l’ami de ­Ferhat ­Abbas (1899-1985), deux hommes considérés comme les « pères » de l’indépendance algérienne.

À la même époque, quels que fussent les discours officiels, le Parti communiste français fut, à l’échelle des passerelles intercommunautaires, longtemps la seule vraie école de militantisme unitaire. Le mouvement ouvrier fut, en France comme en Algérie, modèle d’organisation et creuset de solidarités. L’aventure du journal Alger républicain, auquel collaborèrent ­Albert ­Camus, ­Henri Alleg, ­Abdelhamid ­Benzine et tant d’autres, en témoigna hautement. Toutefois, si le premier mouvement patriotique indépendantiste, l’Étoile nord-africaine, fondé en 1926, émergea du communisme français, il rompit avec lui dès 1928 : la solidarité de classe entre Algériens et Européens prolétaires fut historiquement moins productive que les solidarités communautaires respectives. Dans le contexte colonial de discrimination, la revendication sociale était destinée à se confondre avec la revendication nationale et à la nourrir.

Le rôle de l’école et de l’armée

Une des plages de rencontre fut ce que le discours officiel français nomma la « conquête morale des indigènes ». À l’école française, les séductions entre maîtres et élèves furent jusqu’à un certain point réciproques. Mais jamais cette école ne fut un creuset ; elle offrit un modèle à assimiler. Jamais elle ne suscita d’allers et retours culturels. Un peuple en dominait un autre ; une culture en dominait une autre. Encore aujourd’hui, aucun historien français de l’Algérie contemporaine n’a une connaissance sérieuse de la langue arabe.

Les instituteurs républicains, bien souvent admirables, eurent certes leur grandeur. Mais ils firent à leur corps défendant, aussi, courir à un peuple entier le risque de mettre en doute des valeurs universelles qu’ils enseignaient, mais qui ne pouvaient pas ne pas être en permanence truquées par le système de domination. L’école française, chichement dispensée (5% d’enfants algériens scolarisés en 1914, 15 % en 1954), suscita marginalement des espérances sociales et culturelles que le système colonial était incapable d’assumer ; mieux : qui en était la contradiction. Les élites algériennes anciennes avaient été infériorisées par les Français. Les nouvelles, pourtant formées par leur système d’éducation, furent suspectées et infériorisées par les mêmes Français comme autant d’agents de subversion potentiels. Ainsi, même les ponts jetés en Algérie coloniale pouvaient être autant de vecteurs de fractures. L’école française ne concerna par ailleurs qu’une minorité de gens. Les relations entre la masse et les élites existèrent bien sur le plan social, mais la première était trop hostile à la France colonisatrice pour prêter attention aux sirènes assimilationnistes que les autorités firent un temps retentir.

Le mythe de la « bonne France » fut pourtant opérant. Il s’installa en Algérie, notamment après l’institution en 1912 du principe de la conscription obligatoire, par le canal de l’armée de la Première Guerre mondiale, dans laquelle combattirent 173.000 Algériens, puis de la Seconde (134.000 combattants). L’ordre militaire parut moins répressif et discriminatoire que le colonial dans le contexte de la boucherie des tranchées. On avait promis aux hommes l’apanage de l’impôt du sang : les droits du citoyen.

Par un paternalisme actif, l’armée française se donna aux Algériens comme une Algérie idéale où le chef colonel commandait efficacement, où la solidarité de corps transposés renvoyait à celle rêvée de la culture tribale ancestrale, mais aussi à une préfiguration de la solidarité nationale accomplie. Finalement, le mythe de la « bonne France » eut son côté face : l’acculturation à la française spécifique du milieu militaire catalysa dialectiquement des réflexes de solidarité patriotiques algériens et aida à tracer des itinéraires de libération vers cette solidarité généralisée supra-tribale qu’on nomme vulgairement le « nationalisme ».

La « bonne France » fut aussi édifiée par les « indigénophiles », de ­Jules ­Ferry (1832-1893) au diplomate et gouverneur général d’Algérie entre 1944 et 1948 Yves Chataigneau (1891-1969), en passant par le député et membre de la Ligue des droits de l’homme ­Maurice ­Viollette (1870-1960). Une volonté de politique coloniale libérale exista bel et bien, au nom de la même République française qui, à la fois, codifiait en Algérie la discrimination et l’inégalité et mettait sur pied un embryon de système scolaire à substrats théoriques égalitaires.

Or furent formés par l’école française des êtres hybrides, biculturels, jamais aussi complètement francisés qu’ils le voulurent eux-mêmes parfois dire. Ils ne purent jamais pleinement réaliser, en situation coloniale, ni leurs espérances de carrière à la française ni leur simple désir d’être les égaux des Français. Même l’apparent prototype de notable et politicien français que fut ­Ferhat ­Abbas n’accepta jamais de renier son statut personnel musulman en échange de la naturalisation française (5).

Les obstacles à l’assimilation

L’assimilation des « indigènes » à la cité française se heurtait toujours, du côté français, à la barrière coloniale intangible, laquelle signifiait et codifiait sur le terrain la domination. Encourager l’assimilation fut toujours ressenti comme le risque de l’affaiblir. Du côté algérien, la volonté parfois proclamée par les assimilables potentiels de devenir pleinement français, mais dans la différence comportant le maintien du statut personnel musulman, fut prioritairement revendication d’égalité.

Une volonté – une lâcheté ? – française symétrique maintint une discrimination interdisant aux talents algériens de s’épanouir. Ainsi, jamais un budget scolaire ridiculement disproportionné par rapport aux besoins des Algériens ne fut, après son vote par des Assemblées algériennes dominées par les colons, refusé par un Parlement français dont l’approbation était obligatoire pour qu’il eût force de loi. Il n’y eut jamais de volontarisme parisien assimilateur décisif. Et cela malgré la petite cohorte des libéraux actifs, et de France, et d’Algérie.

Les « retrouvailles » de 1919 et de 1920, en Oranie citadine surtout, qui prirent alors la forme d’un front intercommunautaire, organisateur d’un mouvement de grève combatif et solidaire (on vit des dockers musulmans mobilisés pour le vin moins cher de leurs camarades européens), se produisirent au lendemain de la loi ­Jonnart (6) à quoi se réduisirent les promesses de citoyenneté faites avant 1914. La famine de 1921 généra l’insécurité menaçante des ruraux désespérés, pratiquement tous « indigènes ». La répression contre le front transcommunautaire fit le reste.

Le moment d’euphorie de 1936, avec la victoire du Front populaire, fit vite long feu : le « projet ­Viollette », qui comportait la naturalisation dans le statut musulman d’une vingtaine de milliers de personnes auxquelles on reconnaissait les « services rendus » à la France, ne fut jamais présenté à l’Assemblée nationale. Le gouvernement de Léon Blum céda finalement au lobby colonial, à la consternation des deux députés socialistes d’Algérie, ­Marcel ­Régis et ­Marius ­Dubois. Les socialistes au pouvoir ne voulurent rien changer qui ne reçût l’approbation des ennemis les plus acharnés de toute marche vers l’égalité. La déception s’était déjà installée que le Front populaire faisait dissoudre l’Étoile nord-­africaine en janvier 1937.

Un cheminement somme toute analogue se reproduisit après le vote du statut de 1947 qui sembla offrir un ultime espoir. Ce dernier offrait pour la première fois le droit de vote aux Algériens, mais ceux-ci étaient rangés dans un « second collège » quand les Européens l’étaient dans un « premier collège », chacun des deux élisant soixante représentants. Or il y avait huit millions d’électeurs algériens et un million d’Européens… Ce statut fut déconsidéré par les pratiques d’une administration coloniale décidée à le traiter comme on traitait les « indigènes » : par le mépris. Les élections truquées du gouverneur général socialiste Marcel-­Edmond ­Naegelen figurèrent bien ce mépris (7). On connaît la suite : la guerre d’Algérie.

Après les manifestations et le mouvement – souvent dénommé putsch – du 13 mai 1958 dont le forum d’Alger fut le théâtre, les Européens, avec l’appui des chefs de l’armée, furent les artisans du retour du général de ­Gaulle au pouvoir et de la fin corollaire de la IVe République.

Toutes ces initiatives constituaient-elles des occasions manquées par la France, qui auraient pu prévenir la tragédie finale ? Occasion manquée, le « royaume arabe » ? Occasion manquée, la grande promesse non tenue de donner les droits politiques aux Algériens enrôlés dans l’armée française entre 1914 et 1918 ? Occasion manquée, le « projet ­Viollette » ? Occasion manquée, le statut de 1947 ? Occasion manquée, l’école ? Occasions manquées, toutes les passerelles qui existèrent bel et bien entre Algériens et Européens, en Algérie, et qui purent fugitivement donner l’impression que tout n’était pas joué, que la décision de l’histoire pouvait cheminer d’autre façon ?

L’obsession de conserver l’empire

Séculairement, la barrière coloniale s’était toujours structurellement confondue avec le pouvoir français en Algérie. L’emporta donc une logique surdéterminante : garder à l’Empire français menacé son fleuron d’outre-­Méditerranée. Il était sa seule colonie de peuplement. Il comportait une charge émotionnelle particulière.

L’Algérie fut aussi, après la défaite de 1940 et le gouvernement de Vichy, après la bataille de Diên Biên Phu de 1954, en Indochine, l’ultime investissement d’un nationalisme français déconsidéré et défait. Ce fut le réflexe des officiers de carrière, celui des poujadistes et de Jean-­Marie Le Pen d’un côté, des SAS, des députés socialistes ­Robert ­Lacoste (ministre de l’Algérie en 1957-1958) et Max ­Lejeune, du général de ­Gaulle de l’autre. Ces derniers tentèrent de faire prévaloir in extremis, par des mesures d’égalisation, une assimilation à la France à contretemps quand l’aboutissement violent d’une sédimentation séculaire d’injustices et d’humiliations en avait d’ores et déjà décidé autrement.

Le conflit national franco-algérien dure encore : l’historien René ­Gallissot, spécialiste du Maghreb colonial, a fait remarquer le contraste entre l’immigration portugaise « invisible » et l’immigration algérienne, objet de tant de fantasmes récurrents : c’est qu’il n’y a jamais eu de contentieux national entre la France et le Portugal ; jamais de sentiment inconscient d’une défaite nationale vis-à-vis de Lisbonne (8).

Pour qu’il y eût « occasions manquées », il aurait fallu qu’il y eût « occasions tentées ». Et rien de ce qui fut essayé ne fut jamais poursuivi par cet ensemble de projets mûris, portés par un volontarisme efficace que l’on nomme une politique. La seule jamais faite, par défaut signifiant, fut celle du statu quo.

Les « occasions manquées » jouèrent un rôle du fait de leur échec programmé. Les débats sur l’Algérie, pendant longtemps, jusqu’au choc final, ne firent jamais recette au Parlement. Il y eut un enchaînement logique de l’échec des réformes. Ces dernières qui, au mieux, suivirent la pente d’une dérivée dérisoire de la courbe exponentielle des attentes et des revendications des Algériens. ­Maurice ­Viollette le pressentait bien lorsqu’il écrivait, dès 1931, L’Algérie vivra-t-elle ? (9).

(*) Cet article a été publié dans Moyen-Orient sous le titre « France-Algérie (1830-1962) : occasions et mariages manqués »

(**) Gilbert Meynier, historien et ancien maître de conférences à l’Université de Constantine, est professeur émérite de l’Université Nancy II. Il est spécialiste de l’histoire de l’Algérie sous la domination française.

Notes

(1) Créés en 1844, les Bureaux arabes étaient destinés à apporter des informations aux autorités françaises sur les modes de vie et les systèmes politiques des Algériens. Sur le terrain, les membres de ces bureaux considèrent avoir une mission « civilisatrice » et défendirent l’émancipation des locaux. Progressivement abandonnés dans les années 1870, ils réapparurent sous le nom de Sections administratives spécialisées en 1955.

(2) Napoléon III avait avancé le projet d’un « royaume arabe » associé à la France et dont il aurait été le souverain. Face à l’opposition des colons, l’initiative ne vit pas le jour.

(3) Candidat à l’élection présidentielle du 30 janvier 1879, Alfred Chanzy dut s’incliner face au républicain Jules Grévy, qui remporta 84,03 % des voix.

(4) Estimés à 100.000 en 1846, les Européens d’Algérie sont passés à 245.000 en 1872, 833.000 en 1927 ; ils (dont les Juifs algériens nationalisés après le décret Crémieux de 1870) étaient 1.052.400 au recensement de 1954.

(5) Nationaliste algérien, Ferhat Abbas fut membre du FLN durant la guerre et président du Gouvernement provisoire de la République algérienne de 1958 à 1961. En désaccord avec la politique prosoviétique de la nouvelle Algérie indépendante, il se retira de la vie politique en 1963.

(6) Votée en 1919, la loi Jonnart stipule que « les sujets français de confession musulmane peuvent accéder à la citoyenneté pleine et entière au moment de leur choix » à la condition qu’ils acceptent « de se soumettre comme la totalité des citoyens français à la seule et unique juridiction civile française ».

(7) En avril 1948, les Européens truquèrent les élections des délégués de l’Assemblée algérienne pour affaiblir les nationalistes. Par exemple, Messali Hadj remporta officiellement 15 % des voix, alors qu’il en aurait recueilli 80 %.

(8) René Gallissot, Maghreb-Algérie, classe et nation, deux volumes, Arcantère, Paris, 1987.

(9) Maurice Viollette, L’Algérie vivra-t-elle ? Notes d’un ancien gouverneur général, Félix Alcan, Paris, 1931.