Conflit entre l’armée et Morsi sur le HAMAS

Abstraction faite des erreurs d’évaluation et des manquements aux principes de HAMAS sur la Syrie qui posent avec force la crédibilité du mouvement à conserver l’initiative,  l’unité et le soutien dans sa résistance contre l’occupant sioniste de la Palestine, d’autres questions plus graves se posent après le coup d’Etat   contre Morsi.  Des analyses arabes, citant le général en retraite conférencier à l’académie militaire du Caire, Aymane Salama, lors de son interview à la BBC, soutiennent que l’armée égyptienne a agi dans l’intérêt d’Israël. D’autres soutiennent que les Frères Musulmans allaient céder le Sinaï comme solution aux Palestiniens en échange d’une aide américaine de 12 milliards. Le temps va sans doute montrer la véracité et le mensonge. Pour l’instant les Bédouins arabes livrent 20 milliards de dollars aux juillétistes et on pourrait s’interroger pour qui roulent les pétromonarchies?  Beaucoup de questions, d’accusations graves, et d’incertitudes pèsent sur le devenir de l’Egypte !

Pour saisir ces questions et leur gravité il faut se rappeler que les révolutions arabes ont été récupérées par l’Empire qui a une capacité de manœuvre redoutable. Cette capacité s’appuie sur une connaissance du monde arabe et des relais actifs au sein des élites arabes qui alimentent la base de connaissances et agissent dans le sens attendu de l’Empire. Il faut aussi se rappeler que l’esprit partisan et la précipitation à conquérir le pouvoir ont conduit les Frères musulmans à devenir les instruments de leur propre échec. Ils se sont attaqués à des formalismes secondaires et simplistes négligeant les enjeux stratégiques et la nécessité de formaliser les contradictions et les crises en ingénierie politique, sociale, idéologique et militaire pour les surmonter et les résoudre dans une démarche fédérée et efficace au niveau régional et local.

Il était légitime pour le président Morsi de menacer militairement l’Ethiopie qui est en train d’assoiffer l’Egypte, mais l’art et la manière de le dire ou de le faire étaient illogiques et dangereux car le Président n’avait ni le cadre politique, ni l’encadrement militaire, ni la lucidité géopolitique pour le faire. Depuis Sadate et Moubarak l’Egypte a perdu la culture de défendre la souveraineté nationale et de rayonner sur sa profondeur stratégique. Elle a produit une génération de fonctionnaires civils et militaires davantage impliqués dans la gestion de la rente que procuraient la paix avec l’entité sioniste et la vassalisation aveugle à l’Administration américaine que par la gestion de la cité et de la nation. Tous les experts disent que les futures batailles stratégiques vont se focaliser autour de l’eau et qu’Israël est un grand consommateur d’eau. L’Egypte avec le Soudan et derrière la Libye et l’Algérie fait partie de la plus grande nappe phréatique  dans le monde apte à fournir plus de mille ans d’eau potable à plus de 200 millions d’habitants. Ces pays disposant de 40 mille milliards de m3 d’eau sont naturellement convoités par la prédation internationale et par l’occupant étranger en Palestine.

Les déclarations intempestives sont donc inutiles. L’urgence était de mobiliser les experts et les capitaux pour disposer de cette eau et de ses bénéfiques retours d’investissements sur le plan écologique, social, économique, touristique et agraire.

Pour cela il fallait un cap, beaucoup de travail et un réenchantement des peuples abusés et désabusés. Ces chantiers sont l’oeuvre d’une génération et non celle d’un parti ou d’une confrérie. La bonne gouvernance consistait à préparer ce chantier en créant les conditions pour une ingénierie politique, sociale, financière  et technique tant sur la  conception que sur la réalisation en comptant sur ses propres forces. L’Etranger doit être réduit à sa juste mesure : un partenaire, un auxiliaire, un facilitateur ou un obstacle, mais jamais le maître d’ouvrage, le maître d’oeuvre qui décide des plans, des agendas et des priorités… Les Chinois et  les Iraniens sont des témoignages vivants et bien réels.

Dire que l’Islam est la solution est une tautologie sur le plan de l’énoncé qui n’apporte rien sur le plan de la praxis. Le modèle turc qu’on veut présenter comme modèle islamique par excellence alors qu’il est d’essence capitaliste semble gérer la ressource rare au détriment des musulmans et des Arabes : la Syrie et l’Irak souffrent des barrages turcs. Israël par contre semble recevoir de l’eau turque pour produire les fruits et les produits industriels destinés aux Arabes. Les experts parlent d’un accord pour la construction d’un tunnel sous la mer pour que la Turquie approvisionne Israël en eau en abondance. Les eaux d’Egypte semblent moins chères et plus facile à transporter comme le gaz égyptien. Les « révolutionnaires » égyptiens ne semblent pas pressés de se poser les bonnes questions : ils surfent sur le mécontentement « populaire » envers Morsi et les Frères musulmans. Les Frères musulmans n’ont pas voulu poser les bonnes questions et impliquer toutes les compétences. Ils croyaient manœuvrer facilement avec l’armée et avec l’Empire comme ils croyaient que l’appartenance à l’Islam allait leur ouvrir les portes du Paradis sur terre.

Il était légitime pour le président Morsi de conserver son titre et son poste de président eu égard aux préceptes de l’Islam qui refuse la sédition contre le gouvernant et eu égard au principe démocratique qui l’a amené au pouvoir. Toucher ces deux principes n’est pas un acte révolutionnaire ou une morale, mais une atteinte des principes. Le peuple est devenu otage des manipulateurs et une jurisprudence pour l’anarchie. Morsi, président légitime, a eu raison de refuser de démissionner, mais il aurait dû, pour éviter l’effusion de sang et pour éviter le coup d’Etat facilitateur à la réalisation d’un plan plus grand que l’Egypte, imaginer des solutions inédites et prendre les mesures adéquates pour mettre fin aux conséquences de ce qui est annoncé avant que les Frères musulmans ne se lancent aveuglement à la conquête du pouvoir : l’anarchie et la guerre civile dans le monde arabe et musulman.

Il était légitime pour le président Morsi de soutenir le HAMAS, d’ouvrir le poste frontalier avec Gaza et d’envisager un autre redéploiement militaire au Sinaï, mais l’esprit partisan a empêché que la perception du HAMAS se fasse dans le cadre de l’évaluation globale de la résistance au projet de refondation du Moyen-Orient et du monde arabe par les Américains. L’illusion du Khalifat islamique  en Syrie, en Jordanie et en Egypte, était un leurre que les Américains et les idiots utiles de l’islamisme infantile ont cultivé comme un pavot d’opium faisant oublier les peurs, les paniques et les réactions de rejet de l’armée qui est garante de la paix avec Israël et qui ne veut ni se lancer dans une guerre ni perdre ses privilèges politiques, sociaux et économiques dans une guerre à laquelle elle ne se prépare plus. Les mêmes peurs, les mêmes paniques et le même rejet ont été entretenus dans les communautés coptes, les laïcs libéraux et nationalistes.

Les dissidents des Frères musulmans et les intellectuels nationalistes se rejoignent pour décrire l’incompétence des Frères musulmans à gouverner, mais le fait le plus marquant est celui des médias qui ont commencé à lancer une campagne de dénigrement contre le HAMAS quelques semaines avant la destitution du Dr Morsi. Cette campagne prend des proportions alarmantes ces derniers jours. Il y a une volonté de criminaliser, de diaboliser le HAMAS et de le faire montrer comme le facteur de déstabilisation non seulement en Egypte, mais dans le monde arabe. Certes, l’encadrement du HAMAS a fait des erreurs politiques graves, mais il ne peut être considéré comme un traître à la solde d’Israël, ni un agent américain, ni un facteur de subversion pour l’Egypte. La précipitation dans la lecture de l’actualité et l’alignement idéologique derrière Qaradhawi les ont leurré.

La campagne orchestrée contre le HAMAS de concert avec celle menée contre Morsi explique sans doute l’emprisonnement de Morsi après sa destitution comme le résultat d’un bras de fer entre Morsi et le commandement militaire sur la conduite à adopter envers le HAMAS dans le cadre de la politique de défense nationale égyptienne. Le système Sadate-Moubarak défenseur d’Israël et pourfendeur du HAMAS, toujours en place et en force dans les institutions égyptiennes, semble être la cause majeure qui a conduit à la destitution puis à l’emprisonnement de Morsi. La mauvaise gouvernance est un prétexte. Ni l’Egypte ni le monde arabe n’ont produit une gouvernance sensée ou un espoir de référence, ces derniers siècles, pour que le peuple égyptien se mobilise contre un « insensé » de type Morsi lui préférant un « sensé » de type Baradei ou Sissi.

Ce qui s’est passé et se passe en Egypte, en Libye, en Syrie, au Soudan et  dans tout le monde arabe est la conjugaison de l’insenséisme interne avec la rationalité de la prédation externe qui cherche à briser la résistance contre l’empire et le sionisme,   à évacuer la question palestinienne de la préoccupation politique, sociale et religieuse, et à occulter l’émergence de l’Islam et sa dimension civilisationnelle dans l’alternative au mondialisme matérialiste.

Au moment où chaque pays musulman et arabe est occupé par ses problèmes internes sombrant dans la confusion la plus inimaginable les plans de l’Empire se réalise en Palestine où l’Administration américaine impose sa feuille de route au détriment des Palestiniens, et se réalise non seulement en Syrie, mais dans la région la plus sensible du monde musulman avec  l’émergence d’une nation kurde autonome. Les Kurdes de Syrie viennent d’annoncer leur gouvernement autonome. Le problème n’est pas dans l’autonomie des Kurdes, mais dans notre incapacité à résister aux césures géographiques, historiques, mentales, politiques et économiques que l’Empire mène depuis des siècles. Le Kurdistan n’est pas en soi une revendication illégitime pour les Kurdes syriens, iraniens, irakiens et turques, il est un problème lorsqu’on jette un coup d’œil sur la carte géographique et puis on imagine la genèse de son morcellement ainsi que le devenir des conflits qui vont émerger en périphérie de la nouvelle entité rendant la paix impossible et l’agrégation des « nations » impossibles pour faire front contre l’Empire.

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Dans sa partie asiatique l’Egypte est confronté au morcellement et aux conflits (Irak et Syrie), dans sa partie africaine elle est confrontée au morcellement et aux conflits en Libye, au Soudan et en Afrique subsaharienne. Que les Égyptiens viennent à prendre parti dans les conflits puis viennent à devenir une source de conflit cela dépasse l’entendement lorsqu’on imagine la quantité d’armes et le nombre des sources d’approvisionnement en armes juste en jetant un coup d’œil sur la carte des conflits  :

EGYPTE

 

Il faut faire le moindre effort : lire une carte de géographie pour voir comment le monde musulman est une zone de conflits et de prédation où se joue le devenir du monde jusque là sous la domination totale du colonialisme occidental. Cette domination s’accentue comme le râle d’un prédateur essoufflé, mais l’alternative est absente.

Les problèmes sont complexes par leur enchevêtrement historique, politique, économique, sociologique, culturel, idéologique, géographique. Leur complexité impose de ne pas perdre les liaisons réelles entre le local et l’international, entre le passé et le devenir. Ce qui se passe en Egypte, en Syrie ou ailleurs dépasse leurs intérêts nationaux. Les Frères musulmans, confinés dans une démarche partisane, ont fait preuve de cécité.  Les libéraux et progressistes arabes, prisonniers de leur clivage idéologique importé de l’Occident n’ont plus de repères. Ils oublient qu’ils ont gouverné et que leur modèle est en faillite. Les peuples arabes et musulmanes leur ont retiré leur confiance. Les armées arabes gérant le système de rente et s’accaparant les privilèges n’ont plus vocation à défendre le territoire dans ses frontières immédiates ou dans sa profondeur stratégique. Il n’est pas surprenant que l’armée égyptienne et les élites arabes occidentalisées fassent référence  à la Révolution française pour se donner contenance idéologique et masquer leur faillite ancienne pour revenir dans la gestion des coups d’Etat.

Il est toujours « drôle » de voir les élites de l’indépendance nationale dans le monde arabe se réclamer des référents idéologiques et culturels de l’Occident colonisateur. Dans leur alignement aveugle, ils ne parviennent plus à placer la Révolution française dans son contexte historique et géographique européen : la bourgeoisie qui s’affranchit de la féodalité et qui libère les forces productives pour impulser le progrès technique, le marché et l’expansion du capital marchand puis industriel qui sont le substrat de l’industrialisation de la colonisation. Nos élites ne produisent que de la féodalité et de l’importation. Lorsqu’ils sont acculés à l’échec ils appellent l’armée à la rescousse et recourent aux terminologie de la « modernité » et de l’Etat jacobin.  Il est par contre ahurissant de voir certains « islamistes » confiants dans le soutien européen et espérant leur attachement à la légitimité des urnes. La démocratie par les urnes est une illusion que la culture musulmane a depuis longtemps démasqué en montrant la voie prophétique : le pouvoir n’est pas à convoiter, mais le devoir est à accomplir.

La raison de la destitution de Morsi a été annoncée puis commentée à grand fracas par la presse arabe : échec de l’Islam politique et criminalisation du HAMAS. Nous sommes en réalité au cœur de deux enjeux : l’éveil du monde musulman comme alternative civilisationnelle et la résistance à l’Empire et au sionisme.

Les forces extérieurs  ont la capacité d’anticiper et de manipuler les civils et les militaires, les gouvernants et les gouvernés, les islamistes et les non islamistes. Ils ne sont pas forts, mais nous sommes faibles. Nous sommes loin, très loin, de nous hisser au niveau des véritables défis par notre dispersion et par notre inconséquence. Les forces intérieures ne parviennent pas à trouver un dénominateur commun ni à définir les lignes rouges que ni l’intérieur ni l’extérieur ne doivent franchir pour préserver la paix civile et engager le développement. Est-ce qu’elles vont avoir, un jour,  le courage de chercher à dévoiler la nature du conflit réel entre l’armée qui voulait imputer à HAMAS l’assassinat de soldats égyptiens au Sinaï au mois d’août 2012 et Morsi qui a refusé de croire à l’implication du HAMAS dans une opération qui lui aliène la population égyptienne et qui est illogique et immorale.

Le système égyptien a pris l’habitude de défendre Israël contre les Palestiniens. Il va tenter d’entraîner un peuple miné par la crise sociale et morale générée par ce système qui se croit le Messie le sauveur, le rédempteur. Contre ce système et contre l’ordre mondial donneur d’ordre de ce système il est impossible de voir réussir un système confrérique partisan et otage de ses marabouts.

Analyse de la destitution de Morsi par Mohamed Habib

Au moment où les éradicateurs se félicitent de l’échec ou de la fin de « l’Islam politique, Mohamed Habib – ancien conseiller du précédent Morchid (guide) des Frères musulmans donne sa version sur le coup d’Etat militaire contre la gouvernance partisane sous l’angle de  « Leçons à tirer et enseignement à méditer ». Il écrit en mettant noir sur blanc les mots qu’il faut aux maux que nous méritons et que nous accumulons :

Nous avons plaisir à attribuer nos échecs et  notre incompétence à un complot extérieur ou à la faute d’autrui.Peu d’entre nous ont suffisamment de courage  et de lucidité pour aborder les véritables raisons qui les conduisent à l’échec, et très  très peu   ont l’audace admettre l’échec et de s’en excuser publiquement. Personne, dans le monde arabe et musulman, et tout particulièrement dans cette époque,  n’envisage l’autocritique pour  se redresser, améliorer ses processus et rationaliser ses démarches. Cela exige une  grande force mentale. Il semble que nous allons passer encore un long moment avant de faire émerger cette culture – la culture de rendre des comptes – qui exige au préalable de grands efforts d’éducation, de  socialisation et de transparence avant de devenir une démarche normale  selon les termes «  Certes, la science est par  l’effort constant vers le savoir, et l’intelligence endurante par l’effort constant vers la compréhension des phénomènes «إنما العلم بالتعلم والحلم بالتحلم» » (hadith)

Je ne nie pas les nombreux obstacles et difficultés rencontrés par le Dr Morsi et les Frères musulmans depuis le premier instant de la gestion des affaires du pays, ni qu’il y avait des intentions pour faire avorter cette expérience, ni que la succession était un fardeau énorme et lourd dépassant de beaucoup la capacité des Frères musulmans ..

Ce qui est important ici est de faire la lumière sur l’ensemble des facteurs internes qui ont conduit à l’échec du Dr Morsi à gouverner et à se trouver confronté à la sortie dans la rue de dizaines de millions d’Égyptiens exigeant son départ.
Je peux résumer ces facteurs comme suit:

1 – La perte  (ou l’absence) de la vision stratégique dans la gestion de l’Etat eu égard au poids et à la dimension de l’Egypte.

2 – L’absence d’expertise et le manque d’expérience.

3 – L’erreur de faire reposer la gouvernance complexe du pays sur l’homme au lieu des institutions et en particulier de limiter le choix des hommes aux seules capacités et compétences des membres de la confrérie des Frères Musulmans.

4 – Le non recours aux personnes ayant les connaissances, l’expérience et l’efficacité et se limiter au cercle restrint et limité de la confrérie.

5 – Ne pas répondre ni prêter attention aux conseils et aux critiques.

6 – L’absence de réelle compréhension des problèmes et des crises que connaît le pays, comme si les gouverants vivaient sur une autre planète.

7 – Perte de la capacité de communiquer avec le groupe national (société civile et partis politiques).

8 – Ne pas fermer la porte à l’état de division et de fragmentation du pays, à la guerre civile et à la violence inter communautaire, ainsi que le silence devant les atteintes aux droits de l’homme et aux crimes et délits en hausse. Il est suffisant de dire que le nombre de morts dans l’ère du Dr Morsi a atteint le chiffre de 154 morts dont la majorité sont issus du camp politique adversaire au Frères musulmans.

9 – L’omission de prendre des mesures urgentes et efficaces en faveur de la justice sociale, et une préférence marquée pour l’alignement aux riches au détriment des pauvres, qui représentent la grande majorité de la population de l’Egypte.

10 – Fermer complètement les yeux sur l’application stricte de la justice envers les abus et les délits (avant et pendant la « révolution ») dans cette période transitionnelle, malgré les engagements pris par le Dr Morsi. Aucune mesure prise en faveur des martyrs de la révolution.

11 – Accentuation de l’ampleur de la crise sociale et économique. Il est étrange qu’aucune réponse ne soit apportée à rupture des approvisionnements de gaz, d’essence et de diesel.

12 – Ni réforme ni retructuration du Ministère de l’Intérieur.

13 – Le manque de clarté et de transparence. Il suffit juste de constater que beaucoup de ses collaborateurs et conseillers l’aient quitté.

En plus de ce qui précède, ce qui souligne d’une manière plus significative la mauvaise gouvernance du Dr Morsi est la remise des clés de l’Etat à quelques personnes ayant une influence néfaste sur le bureau d’orientation de la confrérie des Frères musulmans. L’homme n’a pas joué son rôle de président, il a accepté d’être gouverné derrière un rideau, provoquant ainsi réticence, agitation et confusion.

Nous avons attiré l’attention sur ces problèmes et leur répercussions sur l’avenir du pays et sur le devenir des Frères musulmans, mais il n’y a pas eu d’écoute et encore moins de réponse. Nul ne peut faire entendre un mort et nul ne peut donner la vie à celui qui joue le mort.

J’ai étudié la déclaration constitutionnelle de novembre 2012, qui comprenait des décisions dictature par excellence, et il faut avouer qu’elle est la mère des catastrophes .. Ce fut le point de départ, le début de la descente vers l’abîme. Cependant, il était encore possible de sauver l’homme lui-même, sa confrérie et la nation, s’il avait eu la lucidité de répondre aux demandes de l’opposition. Il avait eu de nombreuses occasions, mais malheureusement, il les a ratées. Il y avait une ultime chance de redressement lorsque le commandement général des forces armées accorda au Dr Morsi, aux Frères musulmans et à toutes les forces politiques nationales deux délais pour trouver une issue. Le premier délai d’une semaine et l’autre de deux jours, offrait l’espoir l’espoir de sauver le pays de sombrer dans la guerre civile. La fin de la première date limite était le 30 Juin, mais le Dr Morsi n’a pas réagi et a sous-estimé la capacité des foules à se rassembler et à sortir dans la rue pour exiger son départ, alors que la campagne «rébellion -Tamarrod» a recueilli plus de 22 millions de signatures signifiant qu’une grande masse lui a retiré la confiance et qu’il fallait aller vers l’organisation d’élections présidentielles anticipées. Ratant toutes les occasions il s’est enfoncé dans un discours qui montrait pourtant combien il était distrait, errant, déconcerté, et rempli de tension, de colère et d’émotion. Le discours était des mots sans conséquence, et fatalement la fin de toute chance de sympathie avec lui .. En bref, le discours était une déclaration de la fin de la véritable issue tant attendue…

Nous rappelons ici les raisons de la chute, pas pour se réjouir ou prendre sa revanche, mais pour témoigner à l’histoire. Nous devons disposer de moyens d’étude et tenir compte des indices si nous ne voulons pas tomber une fois dans le même piège et dans les mêmes erreurs. L’Egypte vaut davantage et pour cette raison nous ne voulons pas la voir se déchirer par procuration pour le compte de l’administration américaine et de l’ennemi sioniste. Il est urgent, avant d’appeler les gens à manifester et à revendiquer le retour à la légitimité de :
– rester loin de la sédition et la division,
– revoir l’historique des erreurs et faire le bilan
– refuser l’exclusion
– maintenir la porte grande ouverte pour recommencer l’expérience après avoir tiré leçons et médité les enseignements.

Je ne suis pas partisan des pleurs et des lamentations, ni favorable à la démarche visant à s’installer dans le rôle de la victime, ce qui n’aide pas. Nous voulons et nous devons voulons reconstruire sur les fondations d’un environnement propre et sain, exempt de blessures et d’esprit de revanche. Je sais combien est lourd et douloureux le poids des traumatismes et de la colère, le déni, la tristesse, mais j’espère que les Frères musulmans se guérissent de leurs blessures rapidement et qu’ils rassemblent de nouveau, avec détermination et efficacité leurs forces et leur énergie avant qu’il ne soit trop tard, car il ne sert à rien de pleurer sur le lait renversé.

Voici l’article original paru sur le site elwatannews.com/news/details/225472

يحلو لنا أن نعلق فشلنا وعجزنا على شماعة المؤامرة، أو على غيرنا.. القليل منا هو من تكون لديه الشجاعة للاقتراب من الأسباب الحقيقية التى أدت إلى الفشل، وأقل القليل منا من يمتلك جسارة الاعتراف بالفشل والاعتذار عنه علنا أمام الجميع، حتى يبدأ تصويب خطواته وترشيد مساره.. هذا بالفعل يتطلب قوة نفسية كبيرة، من الصعب أن تتوافر فى مجتمعاتنا العربية والإسلامية، خاصة فى هذا الزمان.. ويبدو أننا سوف نقضى وقتا طويلا حتى نتحلى بتلك الثقافة -ثقافة الاعتذار- الأمر الذى يستلزم التنشئة والتدريب عليها ومحاولة اكتسابها حتى تصير طبعا أصيلا، من منطلق «إنما العلم بالتعلم والحلم بالتحلم».

لا أنفى أنه كانت هناك عوائق وصعوبات كثيرة تعترض الدكتور مرسى والإخوان منذ اللحظة الأولى لإدارة شئون البلاد، وأن هناك من كان يسعى لتفشيله، فضلا عن أن التركة كانت ضخمة والعبء ثقيل.. أثقل بكثير من قدرات الإخوان.. ما يهمنا هنا هو إلقاء الضوء على مجموعة العوامل الداخلية التى أدت إلى فشل الدكتور مرسى خلال فترة العام التى حكم فيها والتى تسببت فى خروج عشرات الملايين فى ميادين وساحات مصر تطالب برحيله.. أستطيع أن أوجز هذه العوامل فيما يلى:

١- فقدان الرؤية الاستراتيجية لإدارة دولة فى وزن وحجم مصر.

٢- انعدام الخبرة والتجربة.

٣- محاولة اعتماد الرجل على قدرات وكفاءات أفراد الجماعة فقط فى المجالات المختلفة، بالرغم من قلتها كماً، ومحدوديتها كيفاً.

٤- الفشل فى الاستعانة بموظفى الدولة من ذوى العلم والخبرة والكفاءة من غير الإخوان.

٥- عدم الاستجابة أو الالتفات لأى نصح أو نقد.

٦- غياب الإدراك الحقيقى للمشكلات والأزمات التى تمر بها البلاد، وكأنه يعيش فى كوكب آخر.

٧- فقدان القدرة على التواصل مع الجماعة الوطنية.

٨- الوصول بالبلاد إلى حالة من الانقسام والتشرذم، والاحتراب الأهلى، والعنف المجتمعى، فضلا عن القتل والخطف وانتهاكات حقوق الإنسان، ويكفى إن يقال أن عدد القتلى فى عهد الدكتور مرسى وصل إلى ١٥٤ قتيلا، أغلبهم من المعارضين.

٩- الفشل فى اتخاذ أى خطوة نحو العدالة الاجتماعية، وتفضيل الانحياز للأثرياء على حساب الفقراء الذين يمثلون الغالبية العظمى لشعب مصر.

١٠- غض الطرف تماما عن تطبيق العدالة الانتقالية، رغم تعهد الدكتور مرسى بالقصاص للشهداء.

١١- ازدياد حجم الأزمة الاقتصادية بشكل مخيف، ناهينا عن أزمة البوتاجاز والبنزين والسولار.

١٢- عدم اتخاذ أى خطوة نحو هيكلة وزارة الداخلية.

١٣- عدم الوضوح والشفافية، ويكفى أن كثيرا من معاونيه ومستشاريه هجروه.

إضافة إلى ما سبق، نسوق قضية على درجة كبيرة من الأهمية وهى أن الدكتور مرسى أسلم رئاسة مصر لقيادات نافذة فى مكتب إرشاد الجماعة.. لم يكن الرجل هو الرئيس الفعلى.. كان هناك من يحكم من وراء ستار، وهو ما سبب ترددا واضطرابا وارتباكا.. وقد نبهنا إلى ذلك مرارا وتكرارا، بل حذرنا منه ومن مغبته وآثاره وتداعياته، لكن كما يقولون: قد أسمعت إذ ناديت حيا.. ولكن لا حياة لمن تنادى..

لقد كان الإعلان الدستورى الذى أصدره الدكتور مرسى فى ٢١ نوفمبر ٢٠١٢، والذى تضمن قرارات ديكتاتورية بامتياز، هو كارثة الكوارث.. كانت هذه نقطة البداية، بداية الصعود نحو الهاوية.. ومع ذلك كان من الممكن أن ينقذ الرجل نفسه والجماعة والوطن لو أنه استجاب لطلبات المعارضة.. كانت أمامه فرص كثيرة، لكنه للأسف، أهدرها.. لقد أعطت القيادة العامة للقوات المسلحة للدكتور مرسى وللإخوان ولكافة القوى السياسية والوطنية مهلتين؛ إحداهما لمدة أسبوع والأخرى لمدة يومين، على أمل إنقاذ البلاد من الوقوع فى حرب أهلية.. كانت نهاية المهلة الأولى فى ٣٠ يونيو، لكن الدكتور مرسى لم يتجاوب واستخف بقدرة الجماهير على الخروج، بالرغم من أن حملة «تمرد» جمعت أكثر من ٢٢ مليون استمارة من المواطنين لسحب الثقة منه وإجراء انتخابات رئاسية مبكرة.. وفى يوم ٣٠ يونيو، خرج عشرات الملايين من المصريين فى مشهد مهيب ومذهل وغير مسبوق فى تاريخ البشرية ليقولوا كلمتهم: «ارحل.. ارحل».. حتى الفرصة الأخيرة التى لاحت له مساء الثلاثاء ٢ يوليو، فشل فى استغلالها.. وخرج خطابه مهلهلا، مشتتا، تائها، حائرا، ومشحونا بقدر كبير من الغضب والتوتر والانفعال، فضلا عن أنه لم يقل شيئا ذا بال، ولم يدع لأحد فرصة التعاطف معه.. باختصار، كان الخطاب إعلانا للنهاية..

نحن نذكر هنا أسباب السقوط، لا للشماتة أو التشفى، لكن للتاريخ.. للدرس والعظة والاعتبار.. لا نريد أن نقع فى الشرك مرة أخرى، فيكفى ما فات.. فمصر تستحق ما هو أعظم وأروع.. لا نريد أن نقوم بتمزيق الوطن بالوكالة عن الإدارة الأمريكية والعدو الصهيونى.. لذا، أرجو أن يتوقف الإخوان عن تظاهرات «الشرعية» التى سقطت، ربما من قبل أن يخرج عشرات الملايين فى ٣٠ يونيو، وأن يبتعدوا عن التحريض على الفتنة والفرقة، وأن يراجعوا أخطاءهم ويعيدوا حساباتهم.. لا نريد إقصاء لأحد، والباب مفتوح على مصراعيه للبدء من جديد.. لست مع البكاء والنواح والعويل، ومحاولة استعادة دور الضحية الذى لا يفيد.. لكننا نريد البناء على أسس نظيفة وسليمة، خالية من الجروح والتقيحات.. أعلم هول الصدمة وما يعقبها من غضب وإنكار وحزن، لكن أرجو أن يلملم الإخوان شتاتهم ويضمدوا جراحهم سريعا وقبل فوات الأوان، إذ لا فائدة من البكاء على اللبن المسكوب.