Le Général et les garanties qui manquent

Comment caractériser les élections dans une ambiance rose en surface et apocalyptique en profondeur au regard du chaos institutionnel, de la diversion politicienne, de l’exclusion, du retrait des poids lourds politiques, du discrédit incontestable des autorités, des crispations sociales avec des révoltes larvées, climat de fin de règne, contexte international chargé de menaces et d’imprévus politiques et géostratégiques. Nous revenons à la case de décembre 1991 : absence de garanties avec cette fois-ci absence du chef de l’État qui peut donner sa caution dans le sens d’une répression ou dans le sens de l’apaisement et du dialogue. En plus de la vacance au sommet de l’État, il y a un effritement des partis politiques qui ne peuvent se prévaloir du rôle d’interlocuteurs valides ou de relais au pouvoir. Les grandes puissances étrangères par leur silence médiatique semblent montrer un désintérêt manifeste pour l’Algérie la considérant ingérable pour faire d’une manière crédible et durable valoir leurs positions stratégiques sinon elles sont en attente de l’aboutissement du scénario de désintégration bien entamé qui arrange bien leurs affaires et au moment opportun ils viendront imposer une solution ou partitionner la géographie et le pouvoir politique pour continuer ce qu’ils n’ont pas réussi à faire en Syrie. Notre chaos n’est ni inédit, ni isolé, ni fortuit : il accompagne le désordre mondial qui annonce la fin de la modernité et l’émergence de la post modernité. Nos principaux partenaires, la France et les USA sont en décomposition, ils ne peuvent apporter ni secours ni feuille de route sauf le désordre, la voracité et l’incompétence…

One two tree viva l’Algérie ou Chaâb et Djeich tahya al Djazaïr ne seront plus un rempart contre l’efficacité de la subversion extérieure et la prédation des rentiers intérieurs qui sont appelés objectivent à converger puis à se coordonner. On peut tuer le général d’une armée mais non l’ambition dans le cœur des hommes enseignait Confucius. Où est notre ambition, où sont nos hommes ? La loi de l’existence des peuples et des nations est implacable et immuable : effondrement et disparition ou salut et renaissance. Oui le pire comme le meilleur sont des possibilités selon les conditions psycho-morales et les conditions matérielles du lieu et du moment. On ne peut pas dire que nos conditions sont bonnes ou en voie d’amélioration à moins de se mentir ou de croire aux fables. Ni le bouc-émissaire jeté en pâtures aux crédules ne nous donnera l’illusion de catharsis ni d’ailleurs l’homme messianique ou le Mahdi mountadar ne donnera l’illusion salutaire. Nous sommes une virtualité de désintégration, une entropie en puissance, une réalité morbide à qui manque le temps de réalisation pour qu’elle soit un réel actuel, une réalité tangible dans les faits sociaux, politiques, économiques et géostratégiques. Ce temps ou plus exactement le délai et le terme échappent à notre entendement humain, mais son processus est suffisamment avancé et ancré pour que les plus lucides le ressentent dans leur chair et le vivent déjà comme un cauchemar avec les yeux ouverts.

Le Coran nous enseigne que la défaite et les catastrophes ne sont pas un destin, mais l’œuvre des hommes mal pensant ou mal agissant. La catastrophe peut être évitée si les Algériens, tous sans exception, refusent l’écœurement actuel et acceptent le changement même s’il est difficile et confus. Ce qui se trame dépasse Bouteflika, l’armée algérienne et les élites civiles. Nous sommes sur le plan socio-politique dans ce que Antonio Gramsci a décrit comme un interrègne cette phase historique « où l’ancien meurt et où le nouveau ne peut pas naître… Une grande variété de symptômes morbides sont observés ». Dans de telles périodes, pour les tenants de la rente, le nouveau est non seulement insensé et dangereux mais impensable. Pour les partisans du changement, il est difficile de montrer la voie et de faire des promesses à un peuple nourri à la gamelle de la rente et à la fascination du zaïme. Nous sommes dans la phase de l’effondrement de la morale la plus basique qui montre que ce n’est plus Hizb frança qui gouverne, mais Hizb as Chaytane.

Jamais ne nous aurions imaginé, dans une situation « normale » que les seconds couteaux humilient, intimident et menacent publiquement et médiatiquement avec une ardeur de démons et avec l’assurance d’impunité des hommes de grand talent et de grande probité comme Hamrouche et le Général Ali Ghediri. Ceux qui croient encore que l’ANP est détentrice du pouvoir réel qu’ils s’interrogent comment un homme instruit, de bonne éducation, discipliné, laborieux ayant servi quarante ans puisse être traité de cette manière sans que ses pairs ne réagissent ? Combien d’officiers et de civils ont été contraints à l’exil ou à la réclusion à domicile. J’ai toujours pensé qu’on a fait payer à l’ANP le prix de la bravoure impardonnable de l’ALN. Le FLN a payé le prix. Le peuple a payé aussi le prix et ils vont continuer à payer le prix jusqu’à être discrédités pour effacer la mémoire de la résistance populaire et du sacrifice des martyrs. Ceux qui affichent leurs insultes ne sont pas le pouvoir réel, ils sont l’ombre de l’ombre de la revanche.

Que le président Bouteflika soit candidat, que l’armée ait son candidat, que tel parti ait son candidat, il n’y a pas de problème, nul ne doit être exclu tant qu’il est transparent et qu’il cherche la légitimité par les urnes, même si les urnes ne sont pas garant de la légitimité et ne peuvent donner la véritable légitimité lorsque les conditions et les garanties de l’expression sont noyés par la confusion, la suspicion, la haine et la panique pour certains.

Est-ce que les conditions actuelles de programmation des élections hâtives et presque clandestines ne vont-elle pas cristalliser les frustrations, les méfiances et les défiances et les transformer en rancunes, en contestation et en confrontation avec tous les débordements possibles et toutes les déflagrations possibles. La responsabilité morale, civile et politique est que sur le plan politique, sociale et sécuritaire l’élection ne soit pas l’exacerbation des contradictions, affichées ou occultées, mais l’instauration de la confiance pour préparer la fondation d’un nouveau pacte républicain. Entretenir l’illusion d’un nouveau premier novembre est une faute politique car la génération montante ne connait du premier novembre 54 que le récit scolaire tronqué et le triomphalisme chauvin. L’ancienne génération ne connait le premier novembre qu’à travers son prisme idéologique. Pour les uns c’est l’Etat-nation à la lumière du jacobinisme français, pour d’autres c’est l’islamisme de Benbadis, pour d’autres c’est le libéralisme américain. Chacun s’approprie une date comme un clocher de paroisse idéologique ou de secte partisane avec ses arrières pensées. Nous savons tous que l’impérialisme mène une guerre d’usure contre notre existence comme il mène une prédation sans limite contre nos ressources, nous savons aussi l’ampleur et l’intensité de nos clivages culturels et idéologiques et ce n’est pas en jetant des anathèmes que nous allons les surmonter. Le seul dépassement est de participer tous pour l’émergence du citoyen et que celui-ci aient non seulement le droit, mais les moyens de participer à la conduite des affaires publiques…

N’est-ce pas que Hamrouche et Ghediri sont dénoncés comme usurpateurs par des « partisans » du premier novembre alors qu’ils se réclament du premier novembre. Il y a volonté de brouiller toutes les cartes et toutes les représentations mentales sur l’avenir, le présent et le devenir de l’Algérien. Cette date historique et bénie fut paradoxalement à la fois l’élan libérateur contre le colonialisme et le socle fédérateur de tous les clivages idéologiques pour affronter le colonialisme en laissant en suspens l’édification nationale, la citoyenneté. L’Algérie était fracturée avant la révolution de libération nationale par des imaginaires incompatibles. L’incompatibilité est toujours ancrée dans notre imaginaire collectif. Nous pouvons envisager une nouvelle appropriation sociale, idéologique, culturelle et politique du premier novembre si nous prenons le temps de lui donner un nouveau contenu, une nouvelle perspective et surtout un nouveau socle rassembleur et résistant. Les mots, plus que jamais doivent coller à notre réalité actuelle et à nos défis présents : « Lorsque les mots perdent leur sens, les gens perdent leur liberté » disait Confucius. Ce chantier de réappropriation historique et de remise à niveau idéologique n’est pas ouvert, car il n’y a ni débat ni conditions pour débattre. Il n’y a que des passions sur la culture, l’idéologie, le pouvoir et la rente.

La politique consiste à pratiquer l’État et à gérer le bien-être de la cité investie par des citoyens c’est-à-dire des hommes libres, consentant à vivre ensemble malgré leurs diversités, à exercer leurs devoirs de solidarité et à trouver un dénominateur commun qui transcende les clivages idéologiques. A deux mois avant l’élection – de tous les dangers – nous n’avons pas de débat autre que des déclarations d’intentions qui sont trainées dans la boue lorsqu’elle suggèrent la rupture, une nouvelle république. Je ne pense pas que la rupture avec Bouteflika soit l’essentiel de nos préoccupations, l’homme a accompli son temps et celui-ci sera témoin en sa faveur ou contre lui le Jour de la Justice suprême.

Pour l’instant nous n’avons pas d’engagement solennel de respecter le résultat des élections. Nous n’avons pas une vision philosophique, mais réaliste et partagée, sur l’État. Avec qui faire la rupture et contre qui débattre. Il n’y a rien de consistant, de cohérent, de sensé à part le cynisme et la méchanceté de ceux qui se sont imposés tuteurs des Algériens…

Pour le débat il est trop tard, par contre si on veut aller vers une élection sans grand enjeu civilisationnel ou stratégique, mais honnête et respectable en tant que processus « formel », il nous faut des garanties. Il nous faut admettre que le processus électoral n’est pas la démocratie et que la démocratie n’est pas la liberté. Un jour ou l’autre nous devons les débattre sereinement non plus sous la perspective de l’État nation hérité de la modernité française ou américaine qui arrive à son échéance historique et à sa décadence sur le plan civilisationnel. Ni dans celle de l’État islamique qui n’existe que dans le fantasmes de ceux qui pensent que « la solution islamique » peut faire l’économie d’une culture politique et d’une gouvernance scientifique. Dans les conditions actuelles de rente, d’arbitraire et d’inculture politique un tel débat finirait par le ridicule ou par la violence. Pour débattre, on ne vient pas avec l’idée d’éradiquer l’autre, d’imposer des solutions du passé des autres ou de s’accaparer un butin de guerre, mais communiquer, partager, tenter de convaincre avec empathie et responsabilité sur la vision qu’on a de l’avenir. Il y a un minimum procédurier à respecter faute de plateforme démocratique : présenter donc plusieurs garanties pour garantir la sécurité, la stabilité et la viabilité du processus qui semble non seulement improvisé, mais confus voire vicié et vicieux :

  • L’engagement formel par l’ensemble des corps constitués que l’expérience de 1991 ne sera pas reconduite et qu’il faut accepter et collaborer avec le président élu. Le candidat élu n’est pas autorité de droit divin, mais homme faible qui peut être révoqué par le peuple dans certaines conditions à définir juridiquement lorsqu’il met en péril l’existence de l’Algérie, sa souveraineté et sa cohésion sociale.
  • L’engagement formel par l’ensemble des candidats d’accepter le résultat des urnes. Si l’abstention dépasse un seuil intolérable alors le résultat devra être invalidé et les élections refaites dans un délai acceptable.
  • L’engagement formel par l’ensemble des corps constitués de servir l’État dans la forme institutionnelle qu’il a actuellement ou dans celle qu’il aura plus tard et non de servir des hommes, des clans, des rentes…
  • L’engagement formel par l’ensemble des corps constitués de laisser voter leurs personnels en public.
  • La mise en place d’une commission électorale indépendante et souveraine.
  • La liberté de parole, d’écriture et de rassemblement des Algériens libres de débattre, de s’organiser et d’exprimer leur soutien sans crainte pour leur vie et leur sécurité.
  • L’interdiction de la violence sous toutes ses formes. Toute forme d’éradication politique ou idéologique doit être interdite et punissable par la loi.
  • Donner le temps aux candidats de former leurs états- major, de débattre, de lever leur financement dans la transparence. L’État devra rembourser les dépenses de campagne au prorata des résultats. Aucune personnalité morale ne doit financer les candidats. Les dons relèvent des personnes physiques et doivent être plafonnés par la loi et sous le contrôle d’un organisme transparent.
  • Donner le temps aux candidats d’éditer leurs journaux ou de constituer une presse alternative.
  • Mettre fin aux rentes de publicité des médias actuels et mettre en place un comité indépendant d’éthique et de contrôle de l’information pour que chaque candidat ait le temps de parole équitable sans exclusivité ou exclusive.
  • Permettre aux algériens poursuivis pour motifs politique de rentrer en Algérie et de s’engager activement dans la vie politique.
  • Trouver un autre mécanisme de validation des candidatures, car l’administration et la rente omniprésentes vont invalider les candidats ou falsifier les parrainages. L’administration et les réseaux de rentes sont suffisamment établis et structurés pour rendre impossible la collecte des 60 mille voix.
  • Faire endosser aux corps sécuritaires et aux préfets de police la responsabilité du maintien de l’ordre pour éviter les dépassements et les intimidations. Les réseaux de l’argent noir peuvent entrer en contact avec la délinquance de toute nature et engager des épreuves de force contre ce qui reste de l’État ou contre les candidats. L’expérience égyptienne de la Baltajiya et du non-droit ne doit pas être sous-estimée en termes de violences et de nuisance.
  • Toutes les garanties doivent être données sous formes de lois, de décrets et d’arrêtés et relever de la Justice sous l’autorité d’un haut magistrat dont la nomination doit être transparente et à qui on donne les moyens d’exercice et les protections pour sa sécurité.
  • Dans un délai court convenu et sous les mêmes garanties l’élection présidentielle devra être élargie à toutes les représentations populaires en commençant par les échelons locaux. Les nouvelles élections effectuées doivent permettre la révision constitutionnelle qui ne doit pas être une affaire d’experts de droits dont la charge est de donner une forme juridique, mais une affaire de peuple qui donnera le contenu. Sur ce temps de deux ou trois ans les assises républicaines et démocratiques pour relancer l’Algérie devraient être réunies c’est à dire un cadre pour donner un contenu, une forme, des mécanismes et des garanties tant pour la définition de la République que de la Démocratie.

C’est un travail de titans qui exige la responsabilité, la liberté, la solidarité. Dans ce cadre apaisé alors les grandes questions d’identité peuvent être élaborées ainsi que la forme de gouvernance la plus adaptée à notre culture, à notre histoire et à notre vision de l’avenir. C’est ce cadre qui servira l’apaisement, par sa portée pédagogique et par sa dimension démocratique. Nul ne devrait être exclu et c’est le consensus qui doit primer sinon il faut faire des référendums ou recourir à la justice séparée de l’exécutif. Le président nommé devrait alors relancer sa propre candidature en compétition avec d’autres pour couronner le recadrage institutionnel et engager les grandes réformes sociales, éducatives, juridiques, économiques, la séparation des pouvoirs, ainsi que la révision des traités internationaux etc. … Chacun devrait sentir que l’Algérie lui appartient et qu’il a la responsabilité de s’engager à la servir ainsi que la légitimité de s’approprier des biens, des statuts et des compétences. Il faut souligner que la véritable légitimité qui résiste au temps et aux crises est celle de la reconnaissance sociale de la compétence. La compétence ne peut s’exprimer et se faire valoir que dans la transparence et la compétition équitable. Le contraire de la rente c’est le travail et la justice.

  • Les corps intermédiaires ne doivent pas interférer dans la campagne électorale, leur vocation est de défendre les intérêts sociaux et professionnels des corporations et non de désigner le personnel politique. Plus tard les Algériens doivent rompre avec toute forme de monopole pour promouvoir le principe de libre adhésion ou de contrat dont les fondements sont la liberté et la justice. La vocation de L’État et d’apporter les garanties à la liberté et à la justice ainsi que de réprimer toute atteinte à la liberté et à la justice.
  • Interdire et réprimer toute forme d’ingérence étrangère….
  • Sur le plan social et économique, la rente et le monopole sont les poumons du système algérien. La vraie politique c’est de s’engager à mettre fin à la rente, de mettre fin à l’effondrement du dinar et à l’absence de productivité du travail et d’efficacité économique et financière. Pour commencer, il faut déjà arrêter la planche à billet qui sert à financer la rente et octroyer des marchés aux rentiers. Sur ce terrain est ce que le futur président, en supposant qu’il est honnête et militant de la cause nationale, est capable de décider de la fiscalité, de la planche à biller, de nommer les cadres supérieurs, de nommer le directeur général de la douane…

Où sont les garanties de laisser l’élu ou le désigné de finir son mandat. L’expérience de Boudiaf n’est pas loin. Il avait naïvement l’intention de redresser l’Algérie, mais pour le système c’était le dernier personnage que le destin a offert pour cultiver la rente historique du premier novembre. Il a été effacé de notre mémoire. Le général Ali Ghediri est un retraité de l’armée, il est libre de disposer de son temps et de disposer de sa vision pour continuer à servir l’Algérie. Il devrait exiger un minimum de garanties sinon un maximum de solidarité de ses pairs devenus civils ou toujours en activité. Le soutien des militaires actifs ou en retraite pose cependant le problème du risque de division de l’armée et des implications négatives de l’armée dans ce qui n’est ni sa vocation ni son rôle. Le soutien des pairs signifie une protection contre les menées subversives venant de l’intérieur du système.L’idéal serait que l’armée exprime son refus de s’impliquer dans les processus electoraux. Le peuple doit exercer sa souveraineté sans tutelle et dans le cadre du multipartisme. Cela ne veut pas dire que l »ANP n’a aucune mission politique. Sa mission devrait être transparente et constitutionnelle sans être partisane. Construire une doctrine de défense nationale, une  économie de résistance nationale civile et militaire ainsi qu’une stratégie de sécurité nationale est une tâche éminemment politique et exigeant une grande expertise. Il ne nous importe pas de savoir ou de distinguer les statuts des hommes, mais leur programme et leur désir.

Je n’aurais pas l’indélicatesse de donner un conseil, mais il devrait aller au-delà de l’intention et ne pas chercher les appuis des puissants ou des riches pour mener campagne, mais partir en campagne comme un militaire qui livre bataille en allant chercher renfort et soutien auprès des Algériens sans dents et sans grades. C’est le peuple qui doit décider en premier de son devenir.

« Malheur à ceux qui nous portent secours, nous serons leur tentation » aimait dire Malek Bennabi lorsqu’il méditait la tragédie de l’Algérie. En effet il aurait fallu plus d’un an de préparation pour apporter le minimum de garanties sinon nous sommes dans la stratégie du fait accompli c’est à dire du choix entre nous et le chaos. Les diables sont experts en matière de chaos.

Omar MAZRI

 

Livres parus :

  • La République et le voile : Symboles et inversions
  • Aimer : la voie coranique
  • Les dix commandements US et le dilemme Arabe
  • Béni soit-il ?
  • Dine ou religion ?
  • Révolution arabe : mythe ou mystique ?
  • Gaza : La bataille du Forqane
  • Islamophobie : Deus Machina
  • Coûts de production : méthodologie d’analyse
  • L’art pédagogique : Etre et Faire.
  • Scénario de création des coopératives

Analyses et études :

  • Réforme de l’enseignement paramédical
  • Economie de défense : Rétrospectives et prospectives 1982-2002
  • Développement des  industries hauturières
  • Economie et post-Modernité
  • Didacticiel mathématiques : niveau brevet et CAP
  • Didacticiel anatomie dynamique du vivant

Publications numériques :

  • 250 articles sur le site libération des opprimés
  • 160 articles sur le site Justice et Vérité (site fermé)

En cours d’édition :

  • Abel et Caïn :  mobile du crime et psychologie de l’assassin.
  • Territoire de civilisation ou Etat islamique ?

Ombres et lumières

« On voit ceux qui sont dans la lumière et on ne voit pas ceux qui sont dans l’ombre » disait Bertolt Brecht. Il expliquait l’art de la scénographie qui ne peut se résumer ni au présentiel visible ni au discours dicible, mais à l’atmosphère qui dissimule, montre selon les intentions de l’auteur et le déroulement du scénario…

Il semble curieux que j’évoque Bertolt Brecht alors que je ne suis ni marxiste ni socialiste ni homme de théâtre. Je conserve sans doute quelques réminiscences de Kateb Yacine, mais surtout je suis horrifié par la tragédie bouffe des bouffons qui ne voient pas que derrière leur simulacre et leur inconstance il y a le drame des innocents qui n’ont pas demandé à naitre et à qui on offre un avenir sans paix ni gloire et peut être un devenir sans pain.  Je suis né bien avant le déclenchement de la guerre de libération nationale, avec le prix du sang, des larmes et de la sueur que ma famille a versé à flot pour la libération et l’édification de l’Algérie. Je pensais qu’avec une bonne éducation patriotique et un bon parcours scolaire et professionnel j’allais pouvoir servir la patrie de Ben M’hidi, de Benboulaid (pour ne citer que ceux que je vénérais alors que j’étais tout petit) et du peuple algérien qui a soutenu l’ALN et le FLN et leurs héros en donnant des martyrs, des internés, des réfugiés sans compter. Les rentiers, les insensés et les traîtres en ont décidé autrement. C’est comme dans les  lois de la physique et de la chimie, il faut la réunion de plusieurs conditions et la conjugaison de plusieurs facteurs pour qu’un processus se réalise. Il n’y a pas de prévalence entre la rente, l’insenséisme et la félonie. L’un engendre les autres. Mais une fois installés comme système, il faut les éradiquer tous en même temps et rapidement, sinon tout changement, tout effort est mené vers l’entropie par la régénération et la reproduction élargie de ces trois fléaux.

Lorsqu’on vit avec la conviction que Dieu est témoin par connaissance et par présence, il importe peu pour sa petite personne périssable qu’elle soit anonyme ou illustre, en réussite ou en échec, reconnue ou bannie, utile ou gaspillée… C’est la situation de Diogène le cynique lorsqu’il fut appelé pour sauver la Grèce avec sa phrase célèbre « ôtez-vous de mon soleil ». C’est la situation de la génération d’après-guerre qui n’avait pas le profil de l’idiot de service, du rentier, du salopard. Cette situation est vécue par de nombreux algériens civils et militaires, laïcs et islamistes, berbères et arabes, modernes et archaïques… N’étaient épargnés que les insouciants qui avaient des yeux, des oreilles et des cerveaux, mais ils n’avaient ni l’entendement ni le sens des responsabilités et encore moins la morale (religieuse ou révolutionnaire) … Et pourtant le théâtre d’ombres et de lumières pour dissimuler les acteurs du massacre de l’Algérie, livrer en pâture quelques bouc-émissaires (souvent innocents) ou mettre en valeur quelques comparses ou quelques imposteurs…

C’est ainsi que Feu Caïd Ahmed, ancien secrétaire général du FLN, a été désigné à la vindicte estudiantine pour lui faire porter toutes les tares de l’Algérie. On a SALI son nom, sa réputation et son militantisme pour dissimuler le système qui l’utilise à ses dépens. On a ainsi masqué le système qui a détruit l’homme algérien, qui pourtant a résisté glorieusement au colonialisme et qui a pris en charge honorablement l’auto gestion des fermes et des entreprises, biens vacants, pour continuer de produire sans détourner les biens publics et sans importer de l’étranger. Ceux-là mêmes qui ont produit l’assistanat social, la bureaucratie, le capitalisme d’État rentier et corrupteur ont été encensés et couverts de gloire. Ce sont les mêmes qui ont donné un pouvoir aux DAF et mis au ban les Moudjahidines de l’ALN et les militants de la cause nationale. Ce sont les mêmes qui ont confisqué l’histoire, la religion, le patriotisme, la langue, les ressources nationales et les ont transformés en rentes et en privilèges pour enfin dilapider la plus grande ressource de l’Algérie qui n’est pas le sous-sol riche en hydrocarbures, mais l’image de l’Algérie qui a triomphé sur le colonialisme et le pacte de l’OTAN. Ces mêmes saltimbanques veulent livrer l’ALN pour qu’elle soit auxiliaire militaire des colonies françaises et américaines et pour que l’Algérie soit un comptoir colonial.

Ce sont toujours les mêmes stratégies de dissimulation et de diversion qui veulent non seulement montrer que tous les officiers algériens sont des corrompus et que tous les généraux sont coupables de crime de guerre et responsables de la Gabegie nationale.  Pourquoi se focaliser sur l’armée et ses fonctionnaires alors que le pouvoir réel n’appartient pas à l’armée. Pourquoi présenter tous les gradés de l’armée comme des voyous sans morale alors que d’une part des civils en nombre plus important (ministres, préfets, haut-fonctionnaires, juges, entrepreneurs, commerçants, intellectuels) ont main mise sur les rentes, et d’autre part cela n’échappe à personne : des caporaux, des adjudants et de petits fonctionnaires de l’armée, de la police et des douanes – par leurs fonctions et leur immoralité –  ont amassé des biens mal-acquis et ruiné le patrimoine public.

Pourquoi mettre la lumière sur des gens alors que le système qui a produit les corrompus et les corrupteurs et qui n’a ni protégé ni promu les fonctionnaires intègres n’a jamais été dénoncé dans ses mécanismes et ses allégeances mafieuses intérieures et extérieures.

L’incurie politique du FIS et l’ivresse du pouvoir de ses chefs leur a fait présenter Chadli Bendjedid (Allah yarhmou) comme le clou à arracher alors qu’il a été coopté par le système par son grade le plus élevé et le plus ancien. C’est un choix simpliste pour un pays qui a de grandes aspirations, mais Chadli ne peut être le diable et endosser à lui seul les malheurs de l’Algérie. Il reste à mes yeux un homme brave et miséricordieux qui a tenté de servir l’Algérie selon ses moyens modestes sans méchanceté. Manipulé par les experts en subversion, ils ont fait le jeu de ceux qui voulaient anéantir l’Algérie. Aujourd’hui les rescapés du FIS ne tirent pas de leçons pour engager leur responsabilité politique et morale dans la tragédie et donner leur version objective des faits et les acteurs connus de la manipulation. Ils ont négligé les avantages pour l’Algérie d’une négociation avec les forces vives et compétentes comme Mehri du FLN, Aït Ahmed du FFS sans se bloquer sur le processus électorale vicié au départ. Ils continuent de vivre leur syndrome victimaire sans s’adapter sérieusement et aller au-delà de la critique maladive des généraux. Les élites, militaires et civils, qui avaient suffisamment de culture géostratégique portent une responsabilité morale et historique, car elles avaient les moyens intellectuels et la position sociale pour ne pas aller à l’effusion de sang qui arrangeait les partisans de l’éradication idéologique et du démantèlement de l’appareil industriel pour assouvir leurs appétits d’apprentis capitalistes. La pensée collective a fait défaut, l’intérêt national a été absent dans le jeu politicien. Même avec de grands diplômes, de grands postes et de grandes ambitions, on peut voir un pays comme une épicerie ou un souk el fellah. Le commis de l’État n’existe pas encore dans la culture algérienne. Lorsqu’on fait de grandes études, on le fait ni pour servir l’Algérie ni pour faire avancer la science, mais pour la reconnaissance sociale, le pain. Nous avons hérité de la culture bobo du socialisme français ou du gangster américain, mais pas de la culture de nos aïeux algériens qui même vaincus ne se soumettaient pas.

On a glosé sur le président Bouteflika, bien ou pas bien, calife du Prophète ou désintégrateur des généraux ou allié objectif du Makhzen marocain, mais on refuse de voir le système qui s’est servi de lui pour se donner une légitimité historique et internationale alors que ce système est en effondrement sur le plan moral, social, politique, diplomatique et économique même si on peut se vanter des réalisations immobilières et des infrastructures. Puisque on est dans le théâtre j’aime bien Bertolucci qui parle du nationalisme des canailles.

L’Algérie est remplie d’acteurs cyniques et de pièces de théâtre vaudevillesques. Il y a tellement de gâchis qu’on a envie de ricaner « jaunâtrement » jusqu’à attraper une hépatite. La question se pose toujours sur le metteur en scène. Un homme de théâtre a bien résumé ce qu’il faut chercher dans un scénario : « Dans toute idée, il faut chercher à qui elle va et de qui elle vient ; alors seulement on comprend son efficacité. »

En matière de trouvaille d’idées anciennes et de marionnettes qui n’amusent que les enfants et les gens d’esprit comme le dit George Sand, ils ont trouvé depuis la maladie du Président et la vacance du pouvoir incarné dans un Zaïm l’arbre qui cache la forêt, un symbole en l’occurrence de Saïd Bouteflika, le frère du président. Ainsi on dédouane le président de ses responsabilités, on masque le pouvoir occulte, on cristallise la crise sur un homme et ses acolytes (réels ou fictifs) du « pouvoir » économique. On aurait pu se focaliser sur Djéha ou sur Pinocchio, cela n’enlève rien à l’amère réalité et aux jours difficiles à venir.

Oui nous vivons des temps difficiles comme ceux vécus par la génération de Bertold Brecht qui anciens attendant la révolution internationale pour libérer les peuples alors que leurs élites les ont conduites au nazisme et aux guerres mondiales. Ces temps, Brecht les a dépeint ainsi « les temps se sont obscurcis autant qu’éclaircis, clarté et obscurité sont entremêlées au point que l’on ne peut les distinguer. » Il voyait avec lucidité l’ombre et ne s’aveuglait par la lumière des projecteurs, c’est un homme de théâtre, un artiste, un visionnaire. Les Frères musulmans algériens n’ont ni la compétence de vision ni la vocation d’éclairer. Ils sont dans ce que Malek Bennabi appelle l’idole de foire qui a pour mission d’humilier l’idée. Ils n’ont rien à voir avec la miséricorde du Prophète, ni avec sa lucidité ni avec l’enseignement du Coran. Ils sont à fond dans les affaires, les arrangements d’appareils et les acrobaties politiciennes. Comme tous les aveugles politiques, non seulement ils accréditent la thèse fallacieuse de Saïd Bouteflika, mais ils lui donnent une consistance politique jouant une fois de plus le rôle qui leur est dévolu, celui d’idiot de service ou d’interlocuteur valide. Ils n’ont tiré aucune leçon des drames récents et refusent de voir les drames à venir.  Les arrangements avec le général Tewfik leur a permis de protéger leurs cadres de l’éradication, mais qu’est-ce qu’ils ont fait de leur potentiel pour servir l’Algérie ? Qu’est-ce qu’ils ont fait de leurs postures dans les institutions algériennes pour promouvoir une dynamique de changement ou au moins inviter à un débat d’idées ?

L’ancien directeur général de l’Institut de stratégie globale, Si M’hamed Yazid ancien ministre de l’information du FLN, malgré la différence d’âge et de statut, qui nous sépare m’avait convié à un entretien individuel et confidentiel faisant confiance à mon jugement et à ma proximité des événements sans être partisan pour lui donner mon opinion sur l’issue des élections législatives de décembre 1991. Ses services lui ont donné le parti HAMAS vainqueur à 10%. Cette estimation reposait à mes yeux sur trois estimations que je considérais comme fausses. La première était la prise en considération du charisme de Mahfoud Nahnah et la culture algérienne du zaïmisme qui allait faire préférer le modéré Nahnah au fougueux Ali Benhadj. La réalité du mécontentement social et de l’envie de changer radicalement le système n’était même pas prise comme une hypothèse de travail et cette erreur est monumentale. La seconde c’était la culture du zèle des élites vassalisées qui ne disent pas la réalité, mais celle que leurs chefs veulent voir. La troisième était sans doute le choix étranger qui tolérait une représentation islamique du type frériste si elle demeure contenue dans son expression et son action politique, économique, sociale et idéologique, car on ne touche pas au mondialisme. On a faussé le curseur idéologique pour masquer les enjeux véritables. Le problème n’est pas entre croyants ou athées, progressistes ou religieux, il est de la même nature qu’avant le déclenchement de la révolution algérienne : Pour l’indépendance ou pour l’assimilation. Chaque camp a ses éradicateurs, ses insensés, mais aussi ses militants de la cause nationale, même si chacun s’approprie le premier novembre selon ses œillères idéologiques.

Ce sont les mêmes insenséismes des incompétents et les mêmes appétits occultes des fourbes qui ont conduit la commission nationale de restructuration industrielle en 1983, composée de militaires et de civils, à stopper l’investissent industriel et à mettre en place les IVPE (investissements de valorisation du patrimoine existant) qui devenaient inefficaces par la restructuration administrative des entreprises nationales. Ces entreprises publiques avaient besoin de retrouver leur vocation, celle d’entreprendre et de manager selon des stratégies métiers et selon la loi du marché. On se devait de maintenir l’effort industriel, d’investir selon les besoins, de créer de l’ingénierie nationale, de compter sur les bureaux d’études nationaux, de créer la concurrence en mettant fin aux monopoles, de trouver une solution radicale aux pénuries et à l’administration bureaucratique des entreprises. Les années 80 ont préparé la décennie noire puis celle des années 2000 à ce jour mettant l’Algérie en situation de dépendance alimentaire sans infrastructure de know-how produit ou de know-how production, faisant d’elle un satellite de consommation et un îlot de gaspillage, un isolat de désertification morale et économique : un parfait comme le néant. Chadli n’a pas les compétences pour voir le désastre en préparation, les islamistes étaient préoccupés par la sahwa religieuse et l’usage de la liberté vestimentaire… Les cadres qui avaient la « compétence » de dire et de faire et qui avaient en charge l’appareil industriel, financier, économique et institutionnel n’ont tiré aucune sonnette d’alarme. Ils ont vanté le libéralisme économique et chacun se voyait conduire une holding comme Marie et son pot au lait…

A propos de lait, il me vient à l’esprit la traite illégale des  vaches à lait. Il me vient à l’esprit le détournement de la vocation des offices algériens tels que l’ONAB, l’ONALAIT, l’OFLA, l’OAIC, l’ONSP… Ces offices avait pour mission le développement de la production nationale, l’organisation des secteurs et des branches, la recherche développement,  la promotion de l’effort national et l’accroissement des rendements et de l’efficacité du travail. Les budgets alloués et les hommes affectés ont été orientés d’abord, par la pratique bureaucratique, vers la facilité des importations tout azimut ensuite par la nuisance systématique vers la gestion de la pénurie et des rentes qui ont permis l’émergence de l’économie informelle et des grandes fortunes parasitaires. Depuis la décennie noire à ce jour le système bancaire et le crédit, après le démantèlement du secteur public, n’ont fait que financer les privilégiés et les détourneurs de la vocation des offices pour leurs profits personnels. Il est permis de faire un parallèle de situation et de proximité temporelle avec le démantèlement de l’appareil productif français depuis l’émergence de Laurent Fabius comme ministre de l’Economie puis Premier ministre avec en arrière-plan les Attali et consorts. Il y a une ligne de convergence idéologique et d’intérêts économiques à suivre… Les militaires algériens ne peuvent être tenus pour responsables directs de ce détournement même s’il profite à quelques militaires véreux. Les agents des douanes, du Fisc, du commerce, de l’Assemblée nationale, des Finances et des banques étaient occupés à quoi et étaient au service de qui?   On peut poser la question aux organes de sécurité et aux brigades économiques de la Police : pourquoi s’occuper des étudiants, des imams des mosquées, des journalistes et des bavards algériens et ne pas fouiner dans la gestion des biens publics. Incompétence, corruption, détournement de la mission, zèle des fonctionnaires, trahison ? Il appartient aux historiens, aux juges, aux journalistes, aux hommes politiques d’apporter les réponses lorsque l’Etat de droit sera instauré et la souveraineté de l’Algérie restaurée….

Pour l’instant, nous sommes dans des intentions de rupture. Je ne me prononcerais sur la faisabilité et la viabilité de rupture  lorsque le candidat bien intentionné annoncerait comment il compte mettre fin à l’opacité de la nomination des hauts cadres, comment mettre en compétition les compétences désireuses de servir L’État pour ne prendre que les meilleurs, quels mécanismes pour les identifier, les recruter et leur donner la garantie de travailler dans de bonnes conditions sans passer par le système de cooptation et de clientélisme. Le diable est dans les détails…

Pour rester dans le langage théâtral et « comique », leur solution islamique est comme les boniments des forains et des ensorceleurs du verbe comme le dit si bien Devos « Parce qu’il y a des magiciens qui vous promettent la lune… Moi, je vous promets le soleil ! »

Pour achever le tableau si peu reluisant des promesses électorales, des lièvres, des falsifications, je vous invite à lire mon texte sur le roi de Midas que j’ai arrangé pour le faire coller à la réalité algérienne. Si vous n’avez pas le temps de lires les âneries de la mythologie revisitée par la modernité algérienne alors « Fermer les yeux afin de pouvoir voir ». Berthold Brecht a fait l’expérience avant nous et à travers ses yeux, même s’il est athée, nous pouvons voir : « C’est la continuité qui engendre la destruction. Les caves ne sont pas encore vidées, et au-dessus d’elles on construit déjà des maisons ».

Peut-être que l’idée d’effondrement ultime nous donnera, faute de conscience politique, le désir de procéder à une véritable psychanalyse sociale et idéologique et deviner les raisons inconscientes de notre arrogance, de notre suffisance et de notre impossibilité à construire un État. Le désir est le mouvement volontaire vers ce qu’on aime ou ce qu’on imagine c’est-à-dire ce qui qui est construit par nos souvenirs et qui part à l’extérieur de soi pour partager, communiquer….

[bctt tweet= »Algérie : Ombres et lumières » username= »omar_mazri »]

Omar Mazri

Livres parus :

  • La République et le voile : Symboles et inversions
  • Aimer : la voie coranique
  • Les dix commandements US et le dilemme Arabe
  • Béni soit-il ?
  • Dine ou religion ?
  • Révolution arabe : mythe ou mystique ?
  • Gaza : La bataille du Forqane
  • Islamophobie : Deus Machina
  • Coûts de production : méthodologie d’analyse
  • L’art pédagogique : Etre et Faire.
  • Scénario de création des coopératives

Analyses et études :

  • Réforme de l’enseignement paramédical
  • Economie de défense : Rétrospectives et prospectives 1982-2002
  • Développement des  industries hauturières
  • Economie et post-Modernité
  • Didacticiel mathématiques : niveau brevet et CAP
  • Didacticiel anatomie dynamique du vivant

Publications numériques :

  • 250 articles sur le site libération des opprimés
  • 160 articles sur le site Justice et Vérité (site fermé)

En cours d’édition :

  • Abel et Caïn :  mobile du crime et psychologie de l’assassin.
  • Territoire de civilisation ou Etat islamique ?

 

Algérie : 5 idées pour les 5 années futures

Urgence : Le salut de l’Algérie et des Algériens

L’heure est grave et exige des mesures urgences. Nous  devons tirer  enseignement de ce qui se passe dans le monde arabe  pour l’Algérie qui va à grande vitesse  vers un inconnu plus catastrophique : nous devons impérativement  mettre en sourdine nos luttes intestines et mettre  fin à cette facilité de jeter l’anathème. Nous ne sommes ni juges ni détenteurs de la vérité absolue. Notre devoir est de nous attacher à l’analyse des processus, des phénomènes et de voir du mieux que nous le permet notre expérience, notre logique et nos informations, afin de voir comment se dessine la tendance et quelles sont les perspectives et issues. Au pire des cas nous aurions musclé notre cerveau en lui imposant une discipline et une rigueur même en nous trompant dans nos analyses. Il est impératif de mettre fin aux clivages classiques, islamistes –  non islamistes, et mettre le curseur sur le salut de l’Algérie livrée à la prédation interne et aux appétits externes. Le curseur mis sur la prédation, alors nous pouvons trouver pour les années à venir un immense réservoir de projets, d’idées, de débats, de sacrifices pour nous libérer de ceux qui veulent nous imposer le choix tragique entre le comptoir commercial de la France et la base coloniale de l’OTAN, de ceux qui veulent maintenir l’armée dans un rôle subalterne d’appareils qui défend la rente de quelques uns.

Il ne s’agit pas de faire une « révolution ou ‘un printemps arabe mais de procéder à un examen de conscience sur nous mêmes et dire comme un seul homme « Barakate ». Nous voulons voir l’Algérie construite par les Algériens, tous les Algériens. Nous voulons voir se constituer un front national de résistance  contre les menaces et les intimidations venant de l’extérieur. Nous voulons un front  national d’édification nationale. Nous voulons que le peuple algérien exerce sa souveraineté sur ses richesses nationales, sur son devenir, sur son modèle de développement, sur son projet de société. Nous voulons une Algérie forte et indépendante, une Algérie apaisée, une Algérie qui met fin définitivement aux germes de la violence et aux séquelles de la violence.

Nous devons garder en mémoire la précarité, la maladie, l’oppression, l’ignorance et l’humiliation de notre statut d’indigènes musulmans et rendre grâce à Allah de nous avoir accordé l’indépendance et d’avoir choisi nos parents et notre pays comme modèle de libération et de sacrifice au monde entier. Nous avons trahi cette Amàna. Revenons vers Allahavec humilité et sincérité

Le président Bouteflika a amené d’une manière bureaucratique et malsaine une pseudo réconciliation nationale. Le peuple algérien doit transcender ses séquelles et ses divergences pour aller vers une véritable réconciliation qui se base sur un principe de justice, d’équité et de vérité sans vengeance, sans règlement de comptes, sans préjugés. Le Prophète (saws) a pardonné en entrant victorieux à ceux qui l’ont combattu et tué Hamza et ses compagnons. Nous ne pouvons être mieux que lui. C’est l’offenser que de faire de la surenchère sur sa magnanimité ou l’utiliser pour des calculs politiciens. Les Algériens sont revenus vers leur insouciance irresponsable de l’indépendance,  leur divergences   et leur doute sur leur identité nationale et sur leur histoire alors que la guerre de libération les as unis et soudés. Allah nous a unis et il nous appartient de nous éveiller si on ne veut pas connaitre d’autres tragédies faute de tirer enseignement du passé :

{Attachez-vous tous au Câble (Coran) d’Allah et ne vous désunissez point. Rappelez-vous la Grâce d’Allah envers vous lorsque vous étiez des ennemis, puis Il a uni entre vos cœurs et vous êtes devenus  frères, par Sa Grâce; alors que vous étiez au bord d’un abîme du Feu et qu’Il vous en a sauvé. Ainsi Allah vous démontre Ses Signes, pour que vous soyez guidés! Et qu’il y ait parmi vous une Communauté : qui incitent au bien, commandent le bon usage, et interdisent ce qui est répréhensible. Ceux-là sont ceux qui cultivent. Et ne soyez pas comme ceux qui se désunirent et divergèrent à partir du moment que leur vinrent les évidences. Ceux-là auront un immense châtiment.} Al ‘Imrane 103 à 105

{ Les croyants ne sont que des frères, établissez la concorde entre vos frères. Et prenez garde à  Allah : ainsi il  vous sera fait miséricorde.} Al Houjourate 10

N’appartenant à aucun parti et engagé par aucun lien partisan,  j’ai la liberté de parole et de conscience ainsi que le devoir de proposer  cinq axes de réflexions et d’actions pour assurer le salut de notre pays et celui de nos âmes. Le temps passe vite. Derrière nous il y a des législatives et des présidentielles ratées, devant nous il y a l’ennemi nous sommes comme Tarak Ibnou Ziad;

1 – Le retour à l’Islam qui passe par un retour au Coran.

Mieux et plus le Coran est compris moins nous devenons vulnérable dans notre façon de penser et mieux nous devenons autonomes par rapport aux rentiers de la politique, de la religion et de l’économie. Le Coran est le creuset de la foi, mais aussi de la production des idées et de la grille de lecture du monde. L’Islam est instrumentalisé par les rentiers de la politique,  de la religion et des affaires. Il est confisqué par les sectes et les confréries maraboutiques qui perpétuent la collusion entre le colonialisme et la derwacha. L’Islam est le Dine d’Allah, sa vocation est d’être sociale et civilisationnelle.  Depuis l’arrivée aux commandes de l’État de Sid Ahmed Ghozali  jusqu’à nos jours c’est la suprématie du maraboutisme et du salafisme infantile ainsi que des arrangements d’appareils avec les partis de complaisance et les Frères Musulmans opportunistes et cupides.

L’empire veut voir émerger un islam ni politique  ni social ni actanciel. Il veut pour nous un clergé ou un Vatican qui décide du halal et du haram. Nos savants et nos prédicateurs sont à l’image de notre société malade, désorientée, attirée par le sensationnel et le futile. Le Coran est notre salut, notre lumière et notre printemps :

{O vous qui êtes devenus croyants , obéissez à l’Appel d’Allah et au Messager lorsqu’il vous incite à ce qui vous fait vivre. Et sachez qu’Allah intervient entre l’homme et son propre cœur, et que c’est vers Lui que vous serez conduits.
Et craignez une sédition qui n’atteindrait pas particulièrement ceux qui ont été injustes d’entre vous. Sachez qu’Allah punit sévèrement.
Et rappelez-vous lorsque vous étiez peu nombreux, opprimés de par la terre, redoutant que les hommes ne vous arrachent, alors Il vous a abrités, vous a soutenus de Sa victoire et vous a octroyé de bonnes choses, afin que vous soyez reconnaissants.
O vous qui êtes devenus croyants , ne trahissez point Allah et le Messager et ne trahissez pas ce qu’on vous a confié, tout en le sachant.
Et sachez que vos biens et vos enfants ne sont qu’une tentation, et qu’Allah Possède  une immense rémunération.
O vous qui êtes devenus croyants , si vous craignez Allah, Il vous accordera un Critère, Il expiera vos mauvaises actions et vous absoudra. Allah Possède la Munificence immense.} Al Anfal 24 à  29

{O Hommes ! Vous est certes venue une exhortation de votre Dieu, une guérison pour ce qui est dans les poitrines, une Direction infaillible et une miséricorde pour les croyants.} Younes 57

La miséricorde évoquée est le Coran et Mohamed (saws).

2 – L’étude systématique de la biographie du Prophète (saws) et des récits coraniques sur les Prophètes (saws) :

Notre salut est dans le respect de notre Prophète (saws) :

{ Et quiconque obéit à Allah et à Son Messager, et prend garde à Allah et s’efforce d’être pieux, ceux-ci sont les gagnants.} An Nour 57

Il y a un enseignement idéologique, psychologique, spirituel, social et civilisationnel pour ceux qui sont doués de raison et de capacité de tirer les ‘Ibra (de ‘oubour : passerelle d’une vérité vers une autre qui semblait cachée ou inaccessible).

{ Il y a sûrement dans leurs récits une leçon pour les doués d’entendement. Ce n’était point un discours controuvé, mais une corroboration de ce qui a été révélé avant, une précision de toute chose, une Direction infaillible et une miséricorde pour des gens qui croient.} Youssef 111

Il faut savoir qu’aucun Prophète, je dis bien aucun Prophète (saws), n’a eu recours à la violence. Salomon et David roi, guerrier et Prophète n’ont pas livré bataille contre les Bani Israël malgré leur comportement et leur transgression. Moïse n’a pas livré bataille contre Pharaon. Mohamed (saws) n’a pas livré bataille contre les siens. Il a été contraint en qualité de chef d’État de défendre Madinah contre les idolâtres de la Mecque et leurs alliés. Celui qui me donne une référence religieuse montrant qu’un Prophète a combattu son peuple qu’il me les apporte je changerais de position.

Nos gouvernants sont despotes et incompétents. Ils sont le produit de notre propre tyrannie et de notre propre incompétence. Ils sont par contre plus responsables car avec l’autorité et le pouvoir ils peuvent apporter les changements bénéfiques pour le peuple. Ils sont comptables de leurs actes. Plus la responsabilité est grande et plus le Jugemetn sera sévère. Aucun gouvernant ne réussit à réaliser ses objectifs ou à sauver son âme ou à être aimé de son peuple s’il est injuste.

« Celui à qui on a donné la charge de gouverner les gens et qui ensuite ferme sa porte aux pauvres, aux opprimés et à ceux dans le besoin, Allah le Très-Haut lui fermera la porte de sa miséricorde quand il sera dans le besoin et la misère à l’instant (le jour de la résurrection) où il en aura le plus besoin. »

« Celui à qui on a chargé de commander les affaires des musulmans puis abuse d’eux par la tromperie, est en enfer. »

 3 – Dévoiler l’Islamophobie

Dévoiler l’Islamophobie dans ce qu’elle a de dangereux dans le nouvel ordre mondial dominé par l’Empire et le sionisme. J’ai écris un livre et tenu des conférences sur ce sujet, mais il est difficile de montrer la réalité et de faire de la prospective à des gens habitués au sensationnel et aux stars médiatisées. Il faut communiquer sur ce sujet. J’ai mis dans ce site une fiche synoptique par laquelle j’ai rédigé mon livre, elle sert comme trame et comme réseau de relation des machinations psychologiques, idéologiques, religieuses, médiatiques et militaires. Il faudrait la diffuser vers un plus grand nombre. La fonction de l’intellectuel est de donner des outils, mais le changement réel vient de chacun de nous.

4 – Dévoiler l’Empire et ses vassaux

Dévoiler ne signifie pas insulter ou dénoncer. Dévoiler l’Empire dans sa structure de pensée et dans ses axes de dominations afin de montrer les dangers qui nous guettent et nous en prémunir en le dévoilant, en ne tombant pas dans ses pièges et surtout en restant réalistes et concentrés sur l’essentiel. Les luttes de clan, les luttes fratricides, l’esprit partisan nous affaiblit.

5 – La communauté doit faire de la politique sans tomber dans le piège partisan.

La politique c’est s’occuper de l’intérêt général pour le bien être général par des moyens pacifiques, efficaces et impliquant le maximum de personnes. Nos priorités, ici ou ailleurs, est de faire émerger de cette communauté une capacité à produire ses idées, ses élites, son argent et à s’impliquer dans l’économique, l’éducationnel et l’informationnel en qualité de producteurs et de communicateurs. Par l’Islam nous sommes un potentiel positif , une force de proposition constructive, une œuvre de bien pour nous mêmes et pour les autres

{ O vous qui êtes devenus croyants , si vous tenez conciliabule, ne tenez donc pas conciliabule de péché, d’agression et de désobéissance au Messager, et tenez conciliabule de bienfaisance et de piété. Et prenez garde à  Allah vers Lequel vous serez rassemblés.} Al Moujadalah 9

Nous sommes musulmans, la culture du devoir prime sur celle des droits comme le souligne notre Prophète (saws) :

« Accomplit ton devoir envers les gens et attends ta récompense de ton Dieu ».

Mon travail dans ce cadre vise à montrer les illusions poursuivies par l’utopie d’un état islamique ou d’un khalifat dans les conditions sociales, idéologiques et économiques actuelles. Le Coran nous a donné un instrument d’analyse et une visée, en plus de celle de désirer le Paradis et redouter l’Enfer, qui consiste au Tamkine Dine Allah sur Terre (la territorialisation de l’Islam) qui passe part la territorialisation de la communauté musulmane. C’est un concept puissant, mais qui exige un travail de longue haleine, un travail de prophète et non une gesticulation de parti politique ou une confrontation avec les gouvernants despotes qui non seulement ne créent pas les conditions favorables, mais décapitent les cadres et rendent  stériles les efforts antérieurs. C’est la patience et la vertu qui sont la solution :

{Et Nous avons fait hériter les gens, qui étaient opprimés, les levants de la terre et ses ponants, que Nous avions bénis. Et la Bonne Parole de ton Dieu fut réalisée pour la descendance d’Israël à cause de leur persévérance. Et Nous avons détruit ce que faisaient Pharaon et son peuple, et ce qu’ils ont édifié.}  Al A’âraf 137

{Nous voulons faire don à ceux qui furent opprimés de par la terre, en faire des modèles, faire d’eux les héritiers, leur Donner pouvoir de par la Terre, et Montrer à Pharaon, à Hàmàne, et à leurs soldats ce qu’ils appréhendaient de leur part.} Al Qassas 5

La communauté musulmane en Algérie doit se libérer des schémas de la démocratie occidentale et s’organiser en peuple citoyen, à travers des assemblées citoyennes qui ouvrent le débat public au niveau des quartiers sur les conditions élémentaires de vie, de salubrité, de sécurité, d’éducation. L’expérience aidant les citoyens s’organiseront de mieux en mieux sans s’opposer aux gouvernants en se fédérant sans esprit partisan, sans esprit de classe sur le principe islamique de la fraternisation qui passe non par des sermons enflammés mais la solidarité quotidienne et l’entraide mutuelle dans le crédit, dans la maladie, dans le travail, dans la gestion des affaires publiques. La liberté ne s’octroie pas, elle se réalise par un processus de libération. Le processus de libération n’est pas seulement dans la  constitution de partis politiques ou d’association, il est d’abord et surtout dans la capacité de l’homme d’assurer sa dignité sociale et humaine. Il ne peut y avoir dignité lorsque la subsistance du petit ou les approvisionnement de l’artisan sont entre les mains des rentiers et des trabendistes. La dignité qui est la visée de la liberté passe par le processus de libération qui fait de l’acte économique un acte approprié par le peuple qui doit pouvoir produire sa richesse et son argent en toute autonomie.

{Vous n’obtiendrez point la bonne foi à moins que vous ne dépensiez de ce que vous aimez. Et quelle que soit la dépense que vous ferez, certes, Allah en est Tout-Scient.} Ali ‘Imrane 92

Mohamed (saws) s’est libéré de l’emprise des Juifs de Médine et a donné de la dignité aux Mouhajirines en cassant le monopole des Juifs sur les finances, la production du fer et le marché. Les Algériens au lieu d’attendre la rente de l’Etat ou de vivre opprimés par les suceurs de sang peuvent revenir à l’esprit de nos traditions arabo berbères de la Touiza et à l’esprit innée de l’autogestion au lendemain de l’indépendance. Concrètement il faut parvenir à créer des petites et moyennes coopératives de service et de production par l’association des capitaux, des idées, de la force de travail et en parallèle institutionnaliser le crédit qui se pratique sans riba au sein de la famille ou entre amis. En fédérant les coopératives  sur les principes économiques en dehors des schémas bureaucratiques des millions d’Algériens peuvent ensemble faire émerger de la valeur ajoutée et des marchés et surtout des mutuelles de crédit autogéré  :

{Entraidez-vous à la justice et à la piété. Ne vous entraidez point au péché et à l’agression.} Al Maidah 2

Dans sa relation avec les gouvernants le peuple algérien ne doit être ni aveugle dans l’attente d’un Messie politique ni dans la posture négative du dénigrement et de la démission.  Lorsque les gouvernants agissent bien, il est du devoir du citoyen musulman non seulement de leur dire vous avez bien agi, mais de les aider à assumer leur responsabilités car dans le bien leur réussite est la réussite de tout le monde. Lorsque les gouvernants agissent mal il est du devoir des citoyens musulmans de ne pas les écouter et de ne pas leur obéir dans ce qui ne plait ni à Allah ni à son Prophète. C’est aux savants, aux intellectuels et aux musulmans qu’Allah a privilégié du rang social d’assumer leur devoir et de dire au gouvernant, avec civilité et bienveillance, qu’il a mal agi. S’ils ne le font pas ils sont des pécheurs et leur compte est auprès d’Allah. Si les gouvernants écoutent le bon conseil c’est une bénédiction pour eux, sinon c’est une malédiction pour eux dans cette vie et dans l’au-delà. La vérité et la justice sont notre bannière. Nous ne pouvons et nous ne devons être moins que les Bani Israël :

{Et du peuple de Moïse, il est une communauté : ils guident par la Vérité, et grâce à elle ils sont justes.}  Al A’âraf 157

Allah (swt) ne changera pas la situation d’un peuple qui se contente de dénoncer, d’insulter, de braver ses gouvernants. Le changement est l’œuvre de réformateurs qui agissent dans un terrain offrant les conditions et les possibilités de la réforme. Parmi les conditions et les possibilités de la réforme il y a le travail sur soi c’est à dire la réforme de soi. Jamais Allah ne donnera suprématie à des corrompus, mais il laissera les uns frapper les autres. Jamais il ne donnera pouvoir des corrompus sur des réformateurs, même si e résultat est différé :

{Nous ne perdons point la rémunération des réformateurs.} Al A’âraf 170

{ Il n’est pas de mise que ton Dieu fasse périr les Cités par injustice, alors que leurs habitants sont des réformateurs.} Houd 117

Que chacun retrousse ses manches et Allah fera voir  les véridiques et les distinguera des menteurs. Lorsque Allah nous dit que celui qui veut al ‘Izza ( la gloire, la grandeur, l’invincibilité et la puissance) elle se trouve chez Lui cela signifie que  nous cherchons la gloire, la notre ou celle de l’Islam ou de notre patrie  en dehors d’Allah et par des moyens qu’Allah désapprouvent, il ne faut pas s’étonner que les calamités s’abattent sur nous les unes après les autres.

Notre ennemi mortel : le laxisme

Ce qui nous arrive comme malheur et involution  provient de nous-même. Il est urgent de mettre fin à cette fâcheuse manie de tout imputer au colonialisme. Le colonialisme ne nous a colonisé que parce que nous étions colonisable ! Il est prêt à nous coloniser de nouveau que parce que nous sommes  toujours colonisables comme si 132 ans de colonisation, 7 ans de guerre et 50 ans d’errance en quête de notre identité et de notre voie de développement ne sont pas suffisants pour nous réveiller. La nature a horreur du vide : si nous laissons notre territoire bien vacant il est naturel que les mieux organisés, les plus déterminés et les plus cupides se l’approprient à notre détriment. Le colonialisme extérieur  et le despotisme intérieur ne sont que des facteurs aggravants de nos malheurs et des facteurs réducteurs à nos efforts lorsqu’ils sont peu consciencieux, improvisés sans orientation générale. Depuis la défaite d’Ohod les Musulmans ont été éduqués à voir dans le malheur et la défaite le signe de leur propres faiblesse et de leur propre inconséquence :

{Quand un malheur vous frappe, quoique vous ayez infligé le double aux ennemis, vous dites : « Comment cela ? » Dis : « Cela vient de vous-mêmes ». Certes, Allah Est Omnipotent sur toute chose.} Ali ‘Imrane 165

Je me rappelle la quiétude et l’insouciance des années 80 qui ont fait que les cadres, les techniciens et les travailleurs s’en foutaient. Certains de mes collègues me raillaient lorsque je leur disait : méfiez-vous ! Ce laxisme va nous conduire à notre propre perte. Il est facile d’incriminer l’armée ou les gouvernants, mais il est difficile d’admettre  le comportement infantile et irresponsable des Algériens qui avaient oublié la colonisation et la guerre de libération nationale. Personne n’aura l’excuse de dire je ne travaille pas ou je vandalise car ceux qui nous gouvernent sont tyranniques ou incompétents. Chacun doit se poser la question : qu’as tu fait pour l’Algérie ?

{ Dis : « Qui vous sauve des ténèbres de la terre et de la mer  »  lorsque vous l’implorer humblement et secrètement : « S’Il nous sauve de celles-ci, nous Lui serons pour toujours du nombre des reconnaissants » ?
Dis : « C’est Allah qui vous sauve, ainsi que de toute autre détresse, mais vous voilà devenus polythéistes ! »
Dis : « Il est le Tout-Puissant qui a le pouvoir de vous envoyer un châtiment d’au-dessus de vous, ou d’en dessous vos pieds, ou de vous confondre en sectes et ainsi  faire subir à  certains d’entre vous les brutalités des autres. » Vois comment Nous varions les Signes, afin de les amener à  comprendre !} Al An’âm 63

Je  rassure les sceptiques, les éradicateurs  et les rationalistes : il ne s’agit pas de faire de l’Algérie une grande école coranique (allusion à Abdou un des directeurs de la Télévision du temps de Mouloud Hamrouche). Il s’agit de nous doter d’un cadre idéologique, éthique et esthétique qui nous permet d’aborder avec notre patrimoine, nos valeurs, notre foi et nos problèmes la quête des solutions les plus crédibles, les plus efficaces à notre marasme social, économique, politique et culturel. Dans ce cadre nous pouvons, tous, apporter notre contribution à l’étude et aux préconisations des problèmes en les abordant dans un démarche pluridisciplinaire : psychologie, sociologie, histoire, économie, mathématiques, urbanisme et architecture, communication, sciences politiques. L’urgent c’est d’instaurer un débat fécond en  dehors de la culture de la rente et de la cooptation. Si les détenteurs du pouvoir consentent à écouter et à donner suite ce sera bénéfique pour tous. S’ils continuent à s’isoler du peuple, à l’ignorer, à le mépriser et à rester enfermés dans leurs microcosmes et leur asile idéologique, nous devons refuser l’enfermement et le mépris en demeurant nobles et généreux, car il s’agit de notre dignité et de notre patrie.

Concrètement…

Le prochain article : COOPÉRATIVES ET CRÉDIT MUTUALISTE

Omar Mazri – libération- opprimés

« Notre ami Bouteflika – de l’Etat rêvé à l’Etat scélérat » : vérité ou diversion ?

Je suis tombé sur un article, en trois parties, du journal « le matindz »  intitulé «  Les dessous de la complicité Bouteflika – Émirats ». Ces articles font  l’apologie du livre « Notre ami Bouteflika – de l’État rêvé à l’État scélérat » ainsi que la publicité au directeur de ce journal Mohamed Benchicou président du collectif rédacteur du livre.

Je n’ai aucune sympathie pour ce journal qui n’existe que par le monopole de l’État sur la publicité qui distribue la rente aux journaux servant sa stratégie de communication. Si ce journal et tant d’autres du même gabarit devaient compter sur la qualité du travail d’investigation de leurs journalistes et de l’intérêt du peuple algérien pour leur contenu il y a longtemps que ces journaux auraient déclaré faillite et mis la clé sous le paillasson.  

Ce qui m’a amené à prendre la plume c’est la capacité de nuisance et de désinformation qu’il laisse dans l’esprit de jeunes en quête de scandales sur une gouvernance incompétente faute de se prendre en charge et de s’impliquer dans une dynamique de changement. Il y a une volonté délibérée de diversion qu’il faut dénoncer : Haqqoun ourida bihi bàatiloun (Une vérité dont la visée est de faire valoir le faux – Ali Ibn Abi Taleb)

Ce journal et le livre dont il fait la promotion ne donnent pas une réflexion sur la dynamique du changement, mais répondent en apparence à une logique commerciale de la presse à sensation et de l’opposition à dénonciation verbale, mais sans apporter du nouveau sur les pratiques du pouvoir qui n’échappent pas aux gens de la plèbe.

Lorsque 300 000 Algériens et l’Algérie avec son histoire, ses ressources et son avenir sont occis par l’incitation à la haine, à l’éradication et à la guerre civile par ce même journal et son directeur on peut se demander : quelle est la signification des milliards qu’aurait détournés le Président Boutelflika ? Ce journal dont la nature idéologique n’est plus le trotskisme, mais les affaires comme l’ensemble de la gauche algérienne même si Gilles Perrault appelé à la rescousse pour donner crédit et notoriété à leur livre a un passé notoire de trotskiste. 

Celui qui veut s’intéresser à  l’histoire du trotskisme verra comment ce mouvement a été souvent l’écran de dissimulation du sionisme et de la CIA. La meilleure illustration est le rôle des trotskistes en mai 68 qui a fait tomber le général de Gaule connu pour son refus de l’alliance avec l’OTAN, son refus du sionisme et sa politique d’une politique d’ouverture avec le monde arabe. L’histoire retient également qu’après l’offensive militaire de  Ho Chi Minh  en mars 68 contre l’armée américaine au Vietnam la France était chargée d’ouvrir les négociations entre l’Amérique et Ho Chi Minh en mai 68 et qui ont abouti à la conférence de Paris en 1969. Alors que le monde progressiste et les peuples des anciennes colonies venaient de découvrir ce héros vietnamien, les trotskistes français n’ont pas trouvé mieux que d’organiser une manifestation avec des drapeaux et des banderoles en hommage non pas à Ho Chi Minh, mais à Trotski. Pour Malek Bennabi qui avait analysé l’aspect idéologique des progressistes algériens et français qui refusent aux musulmans le débat idéologique, il y avait une supercherie sioniste et américaine pour faire imposer leur agenda dans une manifestation à la fois anti-impérialiste et  reconnaissante à la lutte du peuple vietnamien. On peut légitimement se poser la question sur la place d’un Trotskiste comme  Gilles Perrault dans un problème qui relève de l’Algérie et des Algériens.   Le talent, l’engagement,  la biographie et la bibliographie de Gilles Perrault ne sont pas des facteurs déterminants pour préfacer un livre écrit par des Algériens attaquant un président algérien en exercice même si ce président est illégitime, corrompu, autocratique. Il y a des principes à ne pas transgresser.

J’ai refusé que le général Khaled Nezzar  soit trainé dans un tribunal français ou suisse non par sympathie pour lui, mais par dignité pour mes proches qui sont morts pour la patrie et qui ont connu les camps d’internement durant la guerre de libération. Mon refus m’a fait rompre des amitiés solides et anciennes, car l’égard pour l’Algérie, nonobstant son État pitoyable et pour lequel Khaled Nezzar a une part de responsabilité, impose à tout algérien un sentiment patriotique libéré du patriotisme de canailles que certaines personnes dans le pouvoir, dans l’opposition et dans les médias algériens cultivent sans honte ni pudeur. Il n’appartient ni à la France ni à la Suisse ni aux États-Unis ni aux monarchies du Golfe d’interférer dans nos affaires internes : il y va de notre devenir, de notre dignité, de notre souveraineté même si celle-ci est lourdement mise en cause par les gouvernants. Si nous tolérons un instant, dans un livre ou dans une affaire de justice,  le droit de regard de l’Étranger sur une affaire relevant du droit algérien et concernant le peuple algérien, même si pour l’instant le droit et le peuple sont les plus grands absents, nous devenons des complices à l’ingérence étrangère qui est la nouvelle doctrine du nouvel ordre mondial pour nous asservir de nouveau. Musulman je crois en la justice divine : si l’État algérien n’est pas constitué pour rendre justice avec équité et impartialité, les responsables de crimes politiques et économiques, et d’atteinte à la vie des individus ne peuvent échapper à l’impunité de l’histoire et du Jugement dernier.

Enfin, il reste à montrer le paradoxe des trotskistes et des gauchistes algériens. Ils se sont convertis depuis longtemps à l’économie de marché et à l’affairisme qu’ils oublient dans leur analyse de recourir à la dialectique marxiste qui consiste essentiellement à analyser la dynamique sociale, politique, économique et historique d’un système, ses rapports avec la géopolitique, et ses contradictions. Il s’agit d’analyses de  processus pour comprendre et pour agir et non de prise de positions partisanes en faveur ou contre des individus. Les progressistes algériens, en rupture avec la culture dialectique et nationaliste des grandes figures du marxisme algérien  telles que Mohamed Harbi ou Hachemi Hajerès, sont   otages intellectuellement et moralement des appareils bureaucratiques dont ils sont issus et otages de leur culture d’éradication du peuple qu’ils ne pourront jamais représenter, car ils savent qu’ils sont désavoués par ce peuple sur le plan moral, religieux et idéologique. Ils savent qu’ils sont le produit d’un système qu’ils ont servi et défendu.

Je ne défends pas le président Bouteflika, dont le bilan n’échappe à personne et je ne vais pas faire de la surenchère sur la situation du peuple algérien. Je m’insurge contre la désinformation qui consiste à présenter un président ou un homme comme bouc émissaire de la catastrophe annoncée.  Nous savons tous que ce président est coopté par le système et s’il y a un devoir courageux de demander des comptes et de situer les responsabilités il consiste à analyser le système et les alliances nationales et internationales qui ont permis l’arrivée de monsieur Bouteflika et sa longévité alors que monsieur Boudiaf a fini tragiquement en direct et que le général Liamine Zéroual a jeté l’éponge.

Bien entendu les pseudos progressistes algériens, journalistes et écrivains,  ne nous diront jamais qu’ils ont constitué l’ossature de l’appareil bureaucratique de l’appareil d’État et des appareils économiques du secteur public dont sont issus le secteur privé parasitaire et la presse « libre » qui tous vivent de la rente de l’État et de sa corruption. Pourquoi alors se comporter comme les pharisiens accusant de fornication l’élément faible de la société juive et laissant les autres péchés dans l’oubli et le silence que Jésus est venu les réformer ? La réponse est simple et connue par tout le monde sans jeter l’anathème sur les pharisiens de l’Algérie post indépendance.

Elle est simple quand on sait que la bataille que se livrent les différents clans du pouvoir pour la rente et la prébende se fait par deux canaux : le terrorisme contre le peuple et la guerre médiatique.

Tout le monde sait pour qui roule notre presse indépendante. Elle ne roule pas pour l’État algérien ni pour le peuple algérien : elle roule pour un clan contre l’autre. Elle ne roule pas pour la souveraineté nationale et la résistance contre la prédation nationale et internationale, mais elle roule pour un enjeu stratégique contre un autre enjeu aussi stratégique.

Le premier enjeu stratégique :  L’Algérie après l’indépendance et jusqu’à la fin de l’ère Chadli était un terrain de bataille entre les nationalistes (toutes idéologies et tendances politiques confondues), les partisans du Makhzen marocain (une république monarchiste avec la même matrice politique, économique et sécuritaire que celle du Maroc) et le Hizb frança,  la cinquième colonne qui veut maintenir l’Algérie dans la francophonie sur le plan culturel et politique et le comptoir commercial sur le plan économique et géopolitique.  

Le second enjeu stratégique : Les mêmes acteurs jouent et toujours très mal à qui emmènera l’Algérie dans le giron américano-qatari saoudien ou dans le giron franco-européen. 

Si le second est classique et bien rôdé avec ses clercs et ses appareils au sein des médias, des appareils administratifs et économiques pour maintenir l’Algérie comme comptoir commercial de la France et de ses partenaires européens, le premier est « moderne » et en voie de puissance pour embarquer l’Algérie comme base coloniale de l’OTAN pour jouer le rôle de gendarme en Afrique et en supplétifs dans une prochaine guerre contre l’Iran. Cet axe nouveau repose sur le « soft powerment » de Brezinski qui accorde une large part aux islamo nationalistes, aux courants maraboutiques et aux anarchistes de l’Islam infantile qui sont mus par le désir de vengeance et par la quête de pouvoir.

Les arguments du « matin » et de monsieur Benchicou  sont tellement évidents et fallacieux que nous ne sommes pas dans un réquisitoire dicté par l’éveil de conscience de l’algérianité contre les droits bafoués et les richesses spoliées, mais dans une démarche de psychopathes qui ont peur d’un scénario qui les exclut du contrôle des rouages de l’État et du partage de la rente qu’ils ont patiemment et méthodiquement élaboré depuis la « révolution agraire » par le noyautage de l’administration et de l’économie.  Servant leurs intérêts idéologiques, linguistiques, politiques  et économiques ils ne peuvent pas attaquer la monarchie saoudienne ou qatarie de vassaux de l’impérialisme et du sionisme, car ils n’ont ni le courage ni le nationalisme qui défend la souveraineté du peuple et ses valeurs arabo musulmanes. Ils ont par contre la perfidie et la lâcheté de poignarder, comme à leur habitude, le peuple algérien en le frappant dans ce qui est sacré tout en faisant de la désinformation sur les origines et les acteurs du système de prédation de l’Algérie.

Ainsi, ce qui est à retenir dans leur détraction de Bouteflika et des monarchies est cette expression perdue dans le verbiage : « Algérie réorientée vers une engeance arabo-islamique. Le terme engeance signifie bien leur embarras qui témoigne de leur désespoir de conquérir le sommet du pouvoir et de leur  doute sur leur l’efficacité de leurs alliances classiques.

Ils savent qu’à terme l’Algérie ne leur appartiendra pas. Ils ont choisi la tyrannie, l’exclusion et le monopole au nom de la liberté et de la démocratie, le temps de rendre des comptes n’est pas loin. Bouteflika est déjà sur la voie de rejoindre son créateur qui lui demandera des comptes.  

Je les mets au défi, de ramener non pas Gilles Perrault, mais un institut de sondage compétent et indépendant pour définir le nombre de vendus de leur presse, le profil de leur lecteur et les rubriques consultées.

Je fais le pari d’un litre d’huile kabyle contre une olive palestinienne que la majorité des gens qui achètent leurs journaux le font pour consulter la rubrique sportive et la rubrique nécrologique. Le diction algérien s’applique bien à ces parasites saltimbanques de foire : Yakoul al Ghalla wa iyssab al Milla ( Il mange leur nourriture et puis insulte leur confession).  Il est plus que jamais urgent de se réveiller, car il y a le feu dans la demeure Algérie, les pyromanes et les corrupteurs sont plus nombreux que les réformateur. Un changement pacifié et accompagné sous le contrôle de l'ANP  qui s'engagerait  à respecter et à  faire respecter la Constitution et à rester en dehors des luttes partisanes et politiques est urgent avant que le changement ne soit pas imposé contre la souveraineté nationale.

Faisons du slogan "pour les idées et le débat" une réalité au service de l'Algérie.  

« Notre ami Bouteflika – de l’Etat rêvé à l’Etat scélérat » : vérité ou diversion ?