Le Divin « piégé » ?! Partie 3/3

« Pratiquer » le  Coran dans sa propre langue

Même en possession de la meilleure traduction nulle ne peut faire l’impasse s’il veut travailleur sur des thèmes concernant l’islam et les musulmans de « pratiquer » le Coran  dans sa propre langue : l’Arabe. La sonorité, le rythme, la grammaire, le style, les pauses, les liens de sens, les jonctions de mots, les contextes sont autant d’indices dans la compréhension du Qur’ân.

Il ne doit pas y avoir doute, incertitude ou polysémie contradictoire dans la lecture du Qur’ân.

Ce verset

{0 vous qui croyez! Inclinez-vous, prosternez-vous, adorez votre Seigneur, et faites le bien laáalakoum thouflihoune !} 22,77

Ne peut s’accommoder d’une traduction simpliste et erronée comme celles-ci

{0 vous qui croyez! Inclinez-vous, prosternez-vous, adorez votre Seigneur, et faites le bien. Ainsi réussirez-vous !} 22,77

{0 vous qui croyez! Inclinez-vous, prosternez-vous, adorez votre Seigneur, et faites le bien. Peut-etre réussirez-vous !}

Le Qur’ân provoque une attention soutenue par la sonorité des mots, la force des syllabes, la polysémie des mots et la déconstruction grammaticale. L’énonciataire est mis dans une nouvelle situation d’énonciation, une nouvelle perspective que le non musulman a du mal à saisir n’y voyant que la redondance. Quand le non musulman encadre un musulman sur ce terrain de thèses universitaires alors  tous les dérapages objectifs et subjectifs sont possibles. Chaque fois que le récitant, connaissant la langue arabe, est « déstabilisé » par une syntaxe,  un mot ou une phrase il sait qu’il est en présence d’une nouvelle ou d’une particularité dans l’énonciation qui rend l’énoncé plus grave, plus solennel, plus imposant et plus entrainant dans l’’effort du Tadabour (réflexion a l’intérieur du Qur’ân) et du Tafakour (réflexion sur le monde et sur l’homme hors du Qur’ân, mais sucité par le Qur’ân) auquel tel ou tel autre passage du Qur’ân invite.

L’exercice spirituelle et intellectuel sans dualité entre foi et raison par la conjugaison du Tadabbour et du Tafakkour donne le sens de l’universel, le sens du monothéisme pur, parfait et sincère : L’unicité du verbe de Dieu qui se fait parole Qur’ânique dans le cœur de Mohamed (saws), Jésus dans la matrice de Marie et création dans toute sa splendeur et ses mystères dans l’instant Azaliy (pré éternité sans finitude) et l’instant Abadiy ( l’éternité dans l’ infini) qui ne font qu’Un pour le Créateur du temps et de l’espace et qu’aucun lieu ou étendue ni moment ou durée  ne peuvent contenir. La même loi qui régit l’univers visible et invisible témoigne de l’Unicité du Créateur, Ordonnateur et Gouvernant à la fois Immuable et Suffisant sans qu’il ne soit nécessaire à la raison de Lui donner rival, associé et encore moins une compagne ou un fils.

Quand la langue s’inspire des fondements mythologiques grecs ou romains qui la sous tendent elle ne peut traduire l’exactitude de la foi comme elle ne peut empêcher à la raison de dériver et au sens de se corrompre. La langue véhicule un imaginaire c’est-à-dire une compétence symbolique à évoquer le passé, à explorer le présent et à anticiper sur l’avenir. Lorsque cet imaginaire est peuplé de mythes il ne peut logiquement se prévaloir d’une suprématie de rationalité sur la langue d’autrui et son système de pensée. Quand l’imaginaire sur lequel s’appuie l’expression de la foi et de la raison s’investit dans le devenir de l’homme depuis Adam jusqu’à Mohamed (saws) en passant par les chemins empruntés par tous les Prophètes et Messager alors il devient Lumière qui éclaire la compétence de nommer de tous les hommes de foi par laquelle passent et la parole et le savoir :

{Et Il apprit à Adam tous les noms} al Baqara 31

La compétence de nommer se corrompt au contact du paganisme intellectuel qui pare l’idole pour humilier l’idée, qui magnifie le mensonge pour cacher la vérité, qui falsifie la parole pour éteindre la vérité émanant de  Dieu. Le paganisme ne peut être l’interprète des désirs de l’humain, de son imagination et de son devenir et encore moins le critère d’évaluation de la raison humaine, de sa foi et de la traduction de la parole de Dieu infalsifiable et inaltérable qui se nomme le Qur’ân :

{Dis: ‹Ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous: que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors d’Allah›. Puis, s’ils tournent le dos, dites: ‹Soyez témoins que nous, nous sommes soumis›.} ali ‘imrane 64

Nous avons pris, dans la partie précédente,  comme exemple la Sourah ahl al Kaf (la caverne) vous pouvez faire l’essai de lire le texte jusqu’au récit de Moise et là vous sentez que vous êtes emporté dans une autre dimension, un autre message. Continuez et vous rentrez dans le récit de Dhoul Qarnayn c’est encore une autre dynamique, d’autres enseignements. Cette pluralité répond à des exigences de narration qui dépasse l’entendement humain car elle garde le principe d’unité par le pouvoir d’évocation, la sonorité et le rappel des mots, la similitude des situations et surtout le message fondamental : l’Unicité de Dieu incomparable et qui défie tous les esprits qui refusent de se prosterner.

Il est donc vain de parler d’Ijtihad si ses instruments, le Tadabour et le Tafakour ne relèvent leur subtilité qu’à travers la langue arabe ou à travers une longue pratique du Qur’ân inspirée par la foi ou et le  désir sincère de chercher la vérité pour comprendre le Qur’ân :

{Nous l’avons fait descendre, un Qur’ân en langue arabe, laâalakoum vous raisonniez.} Youssef 12

Si nous acceptons cette lecture de « laâla » comme attitude spirituelle, cognitive, comportementale, intellectuelle en quête de l’espérance dans la rencontre imminente de Dieu et en crainte de son châtiment ou de la frustration d’être privé de sa rencontre alors le raisonnement, la méditation, la production intellectuelle ne sont ni un luxe ni  un privilège mais une exigence. La résonnance dramatique de « laâalakoum » d’un Dieu à la fois immanent et transcendant qui nous interpelle dans un langage d’amour qui ne veut pas voir son aimé privé de Sa Miséricorde ne peut être traduite par une autre langue que la langue originelle du Qur’ân.

Comment peut-on imaginer Allah Al Wadoud traiter son bien aimé Mohamed (saws) comme chose insignifiante et le laisser cultiver le doute sur sa destinée alors qu’il a consacré sa vie au service de Dieu jusqu’à être l’incarnation d’un Qur’ân en marche :

{Supporte patiemment leurs propos ! Célèbre les louanges de ton Seigneur avant le lever et le coucher du soleil ! Glorifie-Le au cours de la nuit ainsi qu’aux extrémités de la journée ! Peut-être seras-tu agréé.} Ta-ha – 130

II nous faut lire et traiter les thèmes se rapportant a l’islam et aux musulmans en nous impliquant dans le sens Qur’ânique comme si le Qur’ân nous interpellait personnellement. L’implication est spirituelle, cognitive, affective, imaginative, symbolique, lexicale et sémantique. L’imam Ali le Sage a dit : « Il n’y a rien de bon dans la lecture du Qur’ân qui ne soit pas méditée ».

Le Qur’ân et la langue arabe  ne sont pas  difficiles si on y entre avec sincérité au-delà de la sanction universitaire, des préjugés, des traductions imparfaites. Les premiers compagnons étaient en général de simples bergers, de petits commerçants, de modestes cultivateurs ils ont su vivre avec le Qur’ân et le Qur’ân a su les récompenser en contrepartie de leurs efforts :

{En effet, Nous avons rendu le Qur’ân facile pour la méditation. Y a-t-il quelqu’un pour reflechir?} Al-Qamar  17

Maitriser l’arabe, ses mots et sa grammaire ne suffit pas pour comprendre le Qur’ân. Il faut le lire comme une dévotion, comme un dialogue intime avec Dieu pour comprendre et sentir le miracle s’opérer : le trésor s’ouvre et offre ses joyaux inestimables même si nous ne pouvons pas voir toutes les subtilités, tous les sens, toute la vérité et celà en dépit que certaines expressions ou certains mots restent hors de notre portée comme d’autres l’ont été pour nos prédécessuers :

{Et quant a ceux qui s’efforcent en Nous, Nous les guiderons certes sur Nos sentiers, Allah est en vérité avec les bienfaisants.} al ankabout 69

Le devoir de bon conseil est de dire que le Qur’ân ne se lit pas comme un traité scientifique, une encyclopédie, un récit, mais comme la Parole de Dieu qui pénètre les cœurs pieux et les comportements vertueux. Il  peut rester fermé, inaccessible et incompréhensible aux plus intelligents et aux plus lettrés si la foi et sa douceur sont absentes de leurs cœurs :

(Nous avons mis des voiles sur leurs cœurs, de sorte qu’ils ne le comprennent pas: et dans leurs oreilles, une lourdeur. Et quand, dans le Qur’ân, tu évoques Ton Seigneur l’Unique, ils tournent le dos par répulsion.) Al Isra 46

L’étude de la langue française nous montre pourtant que le conditionnel en sa qualité de valeur temporelle  et de valeur modale peut transcrire le la’alakoum à la fois comme potentiel d’action ( il est toujours temps de croire et de faire dans une continuité qui va du présent au futur et qui ne prend fin qu’avec la fin de l’être) et comme conditions préalable c’est-à-dire comme un  futur hypothétique dont la réalisation, l’accomplissement et le devenir sont soumis à la crainte révérencieuse de Dieu et à l’espérance en Lui :

La’alakoum tataqoun est à lire « ainsi vous prendriez garde à Allah »

La’alakoum touflihoun est à lire  » ainsi vous réussiriez ».

Dans « Leçons de linguistique générale – Esquisse d’une grammaire descriptive » –  Gustave Guillaume nous fait une analyse sur le futur hypothétique comme valeur temporelle, ce conditionnel, qui  a valeur de futur inclusif par rapport au présent. Nous y trouvons le « vous réussiriez »  comme  valeur de signification à volonté de présent et de futur. Cette valeur temporelle donne à « vous réussiriez » le sens de réussir tout de suite, dans le présent même, ou dans l’avenir, réussir plus tard, mais dans telles ou telles autre circonstances favorables de réussite qui peuvent être hors d’actualité dans le présent et d’actualité dans le futur. Ceci est également valable pour le verbe craindre.

Nous ne serons plus  pris au piège de l’incertitude et de l’incertitude de la réalité et de l’énoncé qur’ânique mais nous serons dans l’ouverture idéique et spirituel à l’actuel et au virtuel (le réel en potentiel et qui n’est pas encore actuel) par dévoilement graduel ou par choc avec la réalité :

{Nous leurs vous montrerons Nos signes à l’horizon (l’Univers en dévoilement)  et en eux-mêmes jusqu’à ce que ceci (le Qur’ân, la Vérité, le Réel se dévoile} Foussilat

Nous seront aussi en phase avec l’esprit et la lettre coranique qui affirment  que le Qur’ân  est facile à lire, à prononcer, à réciter  à mémoriser et à comprendre.

Il n’y a ni certitude ni incertitude  mais projet d’idéation qui invite à un procès d’actualisation. Actualisation est le processus psycho temporel qui donne  actualité à un potentiel existant en nous et dont nous sommes les auteurs. Les circonstances ne sont uniquement que des facilitateurs à saisir  ou des réducteurs à surmonter ou à contourner. L’homme est au cœur du débat sur son devenir. Dieu est Celui qui pardonne, qui donne Miséricorde et qui agrée les œuvres. C’est le même et Unique Dieu aussi qui accorde à l’Homme ce pouvoir redoutable du libre arbitre par lequel il construit son destin et son avenir en actualisant le mal ou le bien qu’il porte en lui… Tout est ouvert jusqu’à l’ultime fin qui se prépare assez tôt dés le plus jeune âge :

{Allah accueille seulement le repentir de ceux qui font le mal par ignorance et qui aussitôt se repentent. Voilà ceux de qui Allah accueille le repentir. Et Allah est Omniscient et Sage. Mais l’absolution n’est point destinée à ceux qui font de mauvaises actions jusqu’au moment où la mort se présente à l’un d’eux, et qui s’écrie: ‹Certes, je me repens maintenant› – non plus pour ceux qui meurent mécréants. Et c’est pour eux que Nous avons préparé un châtiment douloureux. } an nissa 18

Si nous passons en revue tous les « Laâlakoum » ils expriment soit une injonction soit un conditionnel soit un subjonctif mettant le doute sur l’événement ou le comportement des mécréants. Les seuls fois où il prend le sens de « peut-être »  c’est quand il est attribué à des individus soumis au doute de la foi ou celui de la cupidité comme les courtisans et le peuple de Pharaon. En aucun cas le doute ou le peut-être ne peuvent être attribués à la parole divine et nous pouvons l’affirmer sans aucun doute, preuves à l’appui.

La culture et le Falah

Dans ce réquisitoire linguistique contre la lutte idéologique, la guerre subversive et les manœuvres de diversion  contre l’Islam nous ne pouvons le fermer sans évoquer la subtilité du terme Falah qui est escamoté dans les traductions et qui s’inscrit aussi comme une sorte de lapsus mental et langagier pour signifier que l’islam est révolu. En traduisant le « Touflihoun » qui suit « La’âlakoum » par réussir ou succès on transpose le modèle consumériste et matérialiste de la pensée occidentale qui ne voit la vie que comme réussite sociale et succès mondain.  Dieu serait donc astreint à nous offrir en récompense de notre Jihad spirituel, moral, social et politique ou militaire que les biens terrestres palpables comme butin de guerre. Nous sommes dans la logique de l’amalgame Islam Epée de Mohamed si nous refusons celui du matérialisme capitaliste.

Touflihoun ne peut être traduit par succès ou réussite du fait des amalgames entretenus mais surtout du fait que ces notions entretiennent la notion d’un constat qui se consomme et s’achève et non comme un devenir en perfection, en expansion. Dans la langue originelle du Qur’ân  touflihoun vient de Falah, cultiver qui donne Fallah, cultivateur, et ainsi le sens prend une autre signification plus large que le succès et la réussite. Il s’agit d’inscrire le Falah ou la culture ou le verbe cultiver dans la conscience du croyant pour qu’il inscrive son être spirituel, ontologique et social dans un Ijtihad permanent, un Jihad conséquent sur lui-même pour entretenir sa foi, sa personnalité, sa vertu et sa mission de Vicaire agissant  et récolter ainsi les fruits moraux, spirituels et matériels de son labeur ici et dans l’au-delà dans un processus incessant comme un devenir vers plus de perfection, plus d’efficacité, plus de sincérité, plus d’engagement et plus de purification de l’ego orgueilleux, belliqueux ou paresseux.

Il est remarquable de souligner que jusqu’au milieu du siècle dernier les Arabes se croyaient sans équivalent de culture et ils ont emprunté à un littéraire (Tewfik al Hakim si je ne m’abuse) le terme Taqafa qui est un néologisme qu’il a forgé pensant se mettre au niveau de la modernité occidentale. Il a fallu attendre Malek Bennabi pour dénoncer ce mimétisme et pour montrer que la culture est une ambiance générale qui fait que l’ensemble de la société est alignée sur une même visée, un même objectif dans un sillon droit qui rappelle les sillons des champs de choux. Malek Bennabi n’est ni un arabisant  ni un éxégète du Coran mais sa rationalité fondée sur la foi et la quête de la vérité lui a montré la culture dans sa dimension coranique de Falah et de cultivateur qui fait l’effort de semer, de desherber, de parcourir son champ, d’aligner ses plants et de les arroser, de contempler l’oeuvre d’Allah qui fait sortir de la terre ce qui donne subistance aux bouches à nourir et ravissement aux yeux en quête de signes.

Toutes les paraboles du Qur’an citant l’effort de l’homme dans sa lutte pour le bien et la foi ont la nature pour champ d’expression : la pluie, l’arbre, la fourmi, l’abeille, ces vivants qui produisent du bien en respectant leur Fitra qui leur commande de se soumettre à Allah. La nature en œuvre  incite à cette aspiration mystico temporelle et psycho spirituelle à laquelle le Qurân invite l’homme de foi à se cultiver c’est-à-dire à semer avant de récolter et à long terme à se civiliser pour devenir civilisateur :

{N’as-tu pas vu comment Allah A Fourni une parabole ? Une bonne parole est comme un arbre bon : sa racine est stable et sa ramure est au ciel. Il donne ses fruits en chaque saison, par le Vouloir de son Seigneur. Et Allah fournit les paraboles pour les hommes, pour qu’ils se souviennent. Et la semblance d’une mauvaise parole est comme un arbre mauvais, qui fut arraché de sur la terre, qui n’a nulle stabilité. Allah Affermit ceux qui devinrent croyants, par la ferme parole, dans la vie terrestre et dans la vie Future. Et Allah Fourvoie les injustes.} Ibrahim 24

{N’ont-ils donc pas vu que Nous Conduisons l’eau vers la terre aride, puis, Nous Faisons pousser avec des plantes dont se nourrissent leur bétail et eux-mêmes ? Ne le voient-ils donc pas !} Sajda 27

Partant de la règle d’or islamique qui dit que le Qur’ân explique le Qur’an on ne peut que rester ébahi par l’évidence qui se dégage du verset suivant qui définit l’effort de cultiver et ses fruits qui ne sont pas seulement matériels :

{Muhammad est le Messager d’Allah, et ceux qui sont avec lui sont durs envers les mécréants, miséricordieux entre eux. Tu les vois inclinés, prosternés, aspirant à une Munificence de la part d’Allah et un agrément. Leurs signes sont sur leurs visages, comme trace de la prosternation. Cela est leur exemple dans la Torah. Et leur exemple dans l’Évangile : comme une semence qui fit sortir ses rameaux, puis les renforce, puis les grossit, puis elle s’égalise sur ses tiges, donnant plaisir aux cultivateurs, afin qu’Il Fasse exaspérer ceux qui devinrent mécréants. Allah A Promis à ceux qui devinrent croyants et ceux d’entre eux qui ont fait les œuvres méritoires, une absolution et une immense rémunération.} Al Fath 29

Dans cette sourate al Fath, l’Ouverture de la Mecque et  le Triomphe de la foi, il n’ y a ni butin à partager, ni attitude triomphaliste ni  réussite mondaine ni succès guerrier mais bel et bien la double inscription de l’effort dans la continuité des Prophètes et dans l’harmonie avec la nature : cultiver la foi, cultiver la vie, cultiver son Paradis, la récompense appartient à Dieu : l’absolution et une immense rémunération que seule Dieu connait et que le Qur’âne révèle sous des formes variées. La plus grande rémunération dans cette vie est conserver une foi pure et sincère, dans l’au-delà est de contempler la Beauté absolue sans voile. La’âlakoum Touflihoun sont indissociables dans l’énoncé que nous avons traité pour l’exemple. Pour cet exemple et  les autres que nous n’avons pas cité il ne faut pas perdre de vue que tout est soumis à la volonté de Dieu y compris l’effort de cultiver ou de récolter les fruits comme le mentionne le Qur’âne :

{Dites-moi donc, ce que vous labourez, est-ce vous qui le cultivez ou bien est-ce Nous le Cultivateur ? Si Nous Voulions, Nous le Réduirions en débris …} Al Waqui’a 67

Cette réflexion ayant pris son essor dans la défense d’un pilier de l’Islam, Al Hajj, il est important de souligner que le pèlerinage est valide s’il a rempli les conditions cultuelles et celles de son intention. Seul son acceptation par Dieu  en fait un rite agrée et méritoire. Dieu dans Sa Bonté nous a montré les signes de l’acceptation du Hajj : se cultiver c’est-à-dire agir après l’accomplissement du pèlerinage comme un croyant qui a renouvelé son alliance avec Dieu et qui fait effort de cultiver sa foi, son savoir, sa probité, sa sincérité, son devoir, ses relations humaines, son travail avec la même ferveur que celle qu’il avait manifesté lors de son séjour aux Lieux saints. Une fois de plus ce n’est pas notre interprétation qui fait foi mais la lettre du Qur’an :

{Le Pèlerinage : ce sont des mois connus. Quiconque s’y impose le Pèlerinage, alors pas de jouissance, de perversité ou de controverse durant le Pèlerinage. Ce que vous faites de bien, Allah le Sait. Et approvisionnez-vous. Oui, sans doute, le meilleur approvisionnement, c’est la piété. Et craignez Allah, ô doués d’entendement.} Al Baqara 197

 

« Il faut savoir provoquer le scandale pour ne pas devenir sa proie ».

 

Nous n’allons pas comme K. Marx provoquer du scandale en ouvrant feu et pamphlet contre les collaborateurs de classes et les philosophes qui ne veulent pas changer le monde se contentant juste de la décrire. Et pourtant le scandale est salutaire comme les catastrophes naturelles : réveiller les consciences. Nous allons rester dans le cadre de notre éthique musulmane et dire ce que le  Prophète (saws)  a dit trois fois de suite :

« La religion c’est le bon conseil sincère. »

À la troisième fois on lui demanda : « Envers qui ô Messager d’Allah? » Il dit :

« Envers Allah, Son Livre, Son Messager, les gouvernants et l’ensemble de la communauté. «

Il n’est pas dans nos intentions d’accuser ou de jeter l’anathème sur quiconque mais de défendre l’islam et exercer notre devoir de bon conseil aux jeunes qui veulent nous écouter et profiter de nos expériences. Ceux qui veulent mettre en défi le Qur’ân et lui trouver une faille pour le tourner en dérision ou le proposer à la réforme comme chose obsolète nous n’avons ni le pouvoir ni l’envie de leur dire non. Bien au contraire nous leur souhaitons d’aller jusqu’au bout de leur logique, la’âlahom, peut-être qu’ils parviendront à l’impasse ou qu’ils découvriront ce que des esprits intègres ont découvert : la beauté incomparable et la vérité inégalée de ce Livre et que cette découverte leur fasse découvrir le gout spirituel et cette soif de chercher la proximité divine qui leur donne une autre vocation à leur intelligence hors du commun :

{Qui donc est meilleur que celui qui incite vers Allah, qui fait œuvre méritoire et dit : « Je suis du nombre des musulmans ? ». L’œuvre méritoire et l’œuvre vile ne sont point égales. Avance celle qui est la meilleure (pour repousser le mal), et voilà que celui avec qui il y a une animosité entre toi et lui, devient comme s’il était un ami chaleureux. Et ne l’obtiendront que ceux qui ont persévéré, et ne l’obtiendra que celui qui a une chance immense.} fussilat 33

Ceux qui, au nom d’un néo soufisme, veulent appliquer au texte sacré les travaux de l’herméneutique ou de la sémiologie nous n’avons aucun préjugé ni qualification pour confirmer ou réfuter cette approche. Nous tenons juste à souligner que l’herméneutique peut se fixer comme objectif une démarche philosophique, chercher le sens. Maintenant si on veut absolument donner un sens ésotérique réservé aux initiés faisant une fois encore le jeu des partisans des islams fragmentés, un islam pour la plèbe et un islam pour les érudits versés dans les sciences occultes, ceci est un autre débat. La voie mystique, des anciens est un cheminement d’étapes en étapes spirituelle ou de station spirituelle vers des stations plus élevées conduite par le Zuhd (le renoncement au monde) et les prières assidues et le secret révélé aux maitres n’est pas du ressort de l’herméneutique mais du secret de la retraite spirituelle. Ce secret ne se divulgue pas car le commun ne comprendrait pas. Ne pouvant se communiquer il n’est d’aucun intérêt dans la conduite des mouvements de libération à moins qu’il ne se présente comme l’Emir Abdelkader à l’avant-garde du combat contre l’occupant.

L’herméneutique ou science de déchiffrement des réalités au-delà du signe n’est pas une mais un ensemble multiple. Il nous faut une précision sur le type d’ herméneutique qu’on applique  pour faire dire au Qu’rân ce qu’il cache ou ce qu’il dit avec limpidité et dont le sens nous échappe car le Dessein de Dieu nous échappe: celle de l’esthétique, celle de l’historicité, celle de la syntaxe, celle des paraboles, celle de l’ontologie, celle de la métaphysique, celles des cabales judaïques, celle de la scolastique cléricale, celle de l’astrologie médiévale…Précisons les concepts, les méthodes et l’objet d’exploration.

Le Qur’ân a déjà libéré l’homme des mythes, des idoles, du messianisme et de l’ésotérisme pour en faire un croyant honoré et missionné. Le combat réel est comment lui redonner les moyens concrets pour lutter contre ce qui l’aliène, l’agresse et dénature son droit au sens et son devoir d’agir comme Abou dherr al Ghifari ou Mou’âd Ibn Jabal ou al Rumi ou al Farissi et tant de compagnons qui ont pris la défense de l’islam sans faux fuyant et sans casuistique pour cacher leur peur d’affronter les négateurs de l’Islam et les colonisateurs des musulmans.

Ce n’est pas le cas des élites « franco musulmanes » qui se veulent une nouvelle vocation : réinterpréter le Qur’ân ou le traduire à leur guise dans la continuité des orientalistes en confirmant la volonté idéologique de banaliser le texte comme si c’était la prose de monsieur Jourdain.  Chacun y va de son Ijtihad en  cherchant des signes cabalistiques, un sens ésotérique, un complexe d’Œdipe inversé. La majorité, en réalité, ne cherchent  que les oripeaux brillants de la mondanité intellectualiste pour gagner du pain et un prestige social. Combien elle est belle cette métaphore de Jalal Eddine Rumi dans ce panier à crabes :  « Le miroir ne peut redevenir du fer et le pain ne peut ne peut redevenir du blé mais toi si tu te vois fleur tu es parterre fleuri, si tu te vois âme tu es royaume de l’âme, tu es ce que ton œil à contemplé ». Par oeil il entend non l’organe mais le regard spirituel.

Dans la lutte idéologique il faut insister sur une évidence qui pourtant nous échappe : nous devons être toujours mis en diversion sur des problèmes complexes,  byzantins ou dépassant notre compétence pour ne pas nous occuper des problèmes flagrants qui produisent notre sous-développement : le despotisme intérieur et le colonialisme extérieur alliés pour laisser les musulmans dans une ignorance sur leur propre problèmes,  leur propre devenir et leurs ennemis qui leur invente des problèmes et leur bouche l’horizon.

Nous laissons le soin à Dhoul Noun al Masri, considéré comme l’un des plus grands maitres mystiques,  de répondre sur toutes ces pistes d’Ijtihad (qui donnent le vertige au musulman)  :

« La sincérité est le sabre de Dieu sur la terre ; où qu’elle soit appliquée, elle ne peut que trancher ».

Il ne peut que se prononcer en conformité avec la lettre et l’esprit du Coran :

{Certes, ce Coran  relate à la postérité d’Israël la plupart de ce en quoi ils divergent. Et il est sûrement une Direction infaillible et une Miséricorde pour les croyants. Certes, ton Seigneur Tranchera entre eux par Son Jugement et Il Est, Lui, l’Invincible, le Tout-Scient. Fie-toi donc à Allah : tu es certainement dans le vrai évident. Toi, tu ne peux faire entendre les morts, et tu ne peux faire entendre l’appel aux sourds quand ils s’écartent en fuyant. Et tu ne peux, toi, guider les aveugles loin de leur fourvoiement. Tu ne peux faire entendre que celui qui croit en Nos Versets, et de fait sont musulmans.} Al Qasas 76

{Il Connaît la traîtrise du regard furtif, et ce que cachent les consciences.Et Allah Tranche en toute Vérité. Et ceux qu’ils invoquent à l’exclusion de Lui ne tranchent rien. Certes, Allah Est l’Omni-Audient, l’Omnivoyant.} Ghafir 19

Il est plus simple et plus efficace de revenir à l’esprit de l’Islam matinal que de se fourvoyer en doctes sectes entre soufis herméneutes et islamologues modernistes.

Ceux qui nous ont légué l’Islam, religion et civilisation, se font appelés Musulmans ou Croyants. La seule distinction entre ses croyants et ses musulmans qui ont donné naissance à l’homme nouveau post Hégirien, le civilisé civilisateur, est le titre pour les uns de Mouhajirines et pour les autres d’Ançars, ou le titre de prédécessuers et de successeurs dans la foi . Les uns ont abandonné vie, patrie, biens et famille pour suivre Mohamed (saws), les autres ont offert vie  patrie, biens et famille pour accueillir l’islam. Les uns ont suivi le Prophète lui faisant confiance et les autres ont suivi le message du Prophète sans jamais le voir se fiant à son oeuvre et à celle de ses compagnons et tirant les enseignements du Coran et de la Sunna. Ils se rejoignent tous dans le même sacrifice, le même amour, le même pacte : la fratrie en Dieu. Don ou abandon de soi telle est la voie de l’Islam.

 

Trouver excuse à la jeunesse et lui témoigner nos encouragements malgré les erreurs, les oublis et les fautes des uns et des autres

 

La probité morale et intellectuelle exige de chercher une excuse pour nos jeunes dont il faut reconnaître le talent d’écriture et l’effort de production intellectuelle même si nous ne partageons pas leur vision en l’état actuel des choses. Notre démarche avait un but didactique :  prendre pour prétexte quelques  lacunes et non sens trouvés dans des travaux universitaires pour attirer l’attention sur la vigilance que l’esprit musulman doit avoir pour traiter des problèmes relevant de sa religion et de sa communauté musulmane pour que la lutte idéologique ne le coopte pas et en fasse un clerc au service de la manipulation ou le coupe de sa base populaire qui attend l’émergence d’élites nobles et généreuses portant  en charge les soucis, les désirs et les ambitions d’une communauté qui n’arrive pas à constituer sa conscience de communauté du fait des séquelles de l’émigration, de la colonisation et de l’exclusion. La discrimination positive ne consiste pas à reconnaitre la communauté mais à l’écrémer, en garder ce qui est bon pour la République et rejeter le reste dans le ghetto urbain, culturel et social au nom de Liberté, égalité, fraternité.

Nous avons donc témoigné selon notre style et notre façon d’aimer sans complaisance et sans fard et nous avons tenté d’attirer l’’attention des jeunes universitaires français qui travaillent, animés d’une bonne intention, sur des thèmes islamiques et qui se piègent par le recours a une mauvaise traduction ou a une mauvaise connaissance du Qur’ân. Se piégeant ils dénaturent le sens et induisent d’autres dans l’erreur ou l’égarement. Pour enlever toute équivoque nos  observations aussi acerbes soient-elles ne nous interdisent pas de trouver et reconnaître dans les travaux consultés des mérites et des efforts qui ont malgré toutes leurs imperfections notre estime et nos encouragements.

Dans la défense de l’islam les jeunes se doivent d’apprendre l’Arabe et le faire aimer à leurs enfants. Etre biculturel est une force et cette force se décuple quand elle s’inscrit dans une cause : le devenir de la oumma musulmane.

Il ne faut pas considérer l’apprentissage de la langue Arabe comme un luxe mais comme un fard (obligation) comme le stipule la Fatwa de Cheikh al Islam Ibn Taymiya dans « Se conformer au chemin de la rectitude » :

«  […] Le meilleur chemin est devenir habitué à parler l’arabe afin que les jeunes gens l’apprennent dans leurs maisons et à l’école, afin que le symbole de l’Islam et ses gens prédominent. Cela facilitera l’apprentissage du Coran et de la Sunna pour les gens de l’islam, et les mots des Salafs […]  Sachez qu’être habitué à utiliser une langue a un effet clair et fort sur notre mode de penser, notre comportement et notre engagement religieux. Il a aussi un effet en nous faisant ressembler aux premières générations de cet oummah, les Compagnons et les Taabi’in. Être comme eux améliore notre mode de penser, notre engagement religieux et notre comportement. De plus, la langue arabe elle-même fait partie de l’Islam, et parler l’arabe est un devoir obligatoire. Si c’est un devoir de comprendre le Coran et Sunna, alors ils ne peuvent pas être compris sans parler l’arabe, alors les moyens qui sont exigés afin de réaliser ce devoir devient lui aussi obligatoire […] Omar a ordonné  à Abou Moussa al-Ash’ari : “Apprenez la Sounnah et apprenez l’arabe; apprenez le Coran en arabe car il est en arabe.” D’après un autre hadith rapporté par Omar : “Apprenez l’arabe car cela fait partie de votre Religion, et apprenez comment la propriété du défunt devra être divisée (faraa‘id) car cela fait partie de votre Religion.” […] Cet ordre de ‘ Omar, d’apprendre l’arabe et la  Shari’a combine les choses qui sont exigées pour la Religion qui implique la compréhension des mots et des actions. Comprendre l’arabe est la façon de comprendre les mots de l’Islam, et comprendre la Sunnah est la façon de comprendre les actions d’Islam… »

En attendant l’apprentissage de la langue Arabe nous recommandons au jeune en quête de compréhension du Qur’ân de le lire avec les yeux d’un vivant comme si le livre s’adresse directement à lui et surtout qu’il ne perde pas de vue que ce Livre est la parole d’Allah et à ce titre il faut le lire, le comprendre dans le cadre du Tawhid, le monothéisme pur, parfait et sincère qui exige le Tanzih c’est-à-dire la vigilance pour garder la pureté et l’esprit sain sur tout ce qui touche  à la parole ou aux attributs d’Allah qui ne peuvent être rabaissés ou escamotés ou tronqués : A Allah revient la perfection et l’absolu.

{A Lui appartient tout ce qui est dans les Cieux et la terre, tous L’invoquent. Et c’est Lui qui Commence la Création ensuite la Ramène, et cela Lui est bien plus facile. Et a Lui appartient la Perfection dans les Cieux et la terre, et Il Est l’Invincible, le Sage.} Ar Rum 27

Dans notre article, la guerre contre l’Arabe, nous avons montré la lutte contre l’Arabe comme lutte idéologique pour casser le lien qui unit le Qur’ân à l’Arabe. Pour comprendre le Coran et en faire le canevas objectif et subjectif de nos idées, de nos intentions, de nos actions, de nos ambitions et de nos désirs il faut le lire avec des yeux de vivant comme si nous vivions l’époque et le lieu de sa révélation et comme si en étions le premier destinataire qui en prend connaissance pour la première fois avec crainte et émerveillement. L’indien Al  Mawdudi qui fait partie de cet héritage du siècle dernier qui a formé des générations de militants et de penseurs musulmans nous donne la clé, dans son livre « Comprendre le Coran », pour  entendre, voir , sentir, frémir  et vivre le Coran. Nous en avons publié quelques extraits sur ce site.

 Avec ou sans la maîtrise de la langue Arabe il est utile de rappeler, le rappel est bénéfique pour les croyants,  que la seconde clé pour comprendre le sens du Coran, avec bien entendu une bonne traduction si on est francophone, est la Biographie scientifique du Prophète car la Sunnah est l’incarnation du Qur’ân en la personne de Mohamed (saws) le meilleur homme que la terre à porté.

Nous sommes partis dans un procès contre les dérives mises à profit pour saper un pilier important de l’Islam : Al Hadj. Nous avons la conviction que la lutte idéologique menée contre l’islam cherchera d’autres batailles, d’autres symboles, d’autres piliers à ébranler en ébranlant notre propre lecture du Qur’ân. Pour des raisons de déontologie nous n’avons cité aucun nom, aucun titre d’article, aucune université, aucun étudiant ni professeur mais nous pouvons citer quelques versets de la Sourah al Hadj qui mettrait de l’effroi dans le cœur de tout croyant instrumentalisant l’islam, la communauté,  un pilier ou un rite à sa réussite sociale, politique ou intellectuelle :

 {Tel, parmi les hommes, discute au sujet de Dieu sans détenir la moindre connaissance, et se laisse entraîner par tout démon rebelle} 6

{Tel, parmi les hommes, discute de Dieu sans aucune connaissance, sans direction et sans livre pour éclairer sa lanterne} 8

Mohamed (saws) a dit : « Rien n’est plus pernicieux pour la religion islamique que ces trois choses :

–  Un savant en religion dévergondé,

–  Un gouvernant despotique,

–  Un ignare interprétant le texte Qur’ânique

Ses trois catégories de personnes on les voit en œuvre dans le monde musulman et dans le monde occidental pour saper au nom de la modernité, du berbérisme et du pharaonisme le socle de l’islam : la langue arabe.

Nous trouvons excuse à la jeunesse musulmane francophone  de tronquer le message coranique par ses lacunes sur la langue Arabe. C’est notre amour pour cette jeunesse et le potentiel qu’elle porte que nous avons décidé de sortir de notre réserve et d’avertir. Il ne faut pas se laisser leurrer par les titres, les positions sociales, les publications, la rhétorique et surtout la mise sous les feux de la rampe par la lutte idéologique qui sait occulter ses adversaires et magnifier ses alliés comme le dit le metteur en scène Berthold Brecht « On voit ceux qui sont sous la lumière et on ne voit pas  ceux qui sont dans l’ombre ».

Notre boussole idéique doit être orientée non sur les hommes mais sur la vérité. C’est la vérité qui fait découvrir les hommes et non l’inverse. La vérité dans le Qur’ân nous montre les enjeux et les pièges de la lutte idéologique ainsi que la conduite à tenir pour rester un homme libre maitre de son destin, de ses choix et de ses convictions:

{Prenez garde à Allah et sachez que vous serez tous conduits vers Lui. Il est parmi les hommes celui dont les paroles dans la vie terrestre te plaisent, qui prend Allah en témoin sur ses bonnes intentions, alors qu’il est le pire des ennemis ; et s’il se détourne, il s’évertue de par la terre pour y corrompre, détruire la récolte et le bétail, mais Allah n’Aime pas la corruption. Et si on lui dit : « Crains Allah », il est pris d’orgueil par sa coulpe. Que la Géhenne lui suffise donc, et quelles piètres couches ! Et il est parmi les hommes : celui qui se sacrifie pour l’agrément d’Allah. Allah Est Compatissant pour Ses créatures. O vous qui devîntes croyants, entrez dans la paix en totalité et ne suivez point les pas de Satan. Il est pour vous un ennemi évident.} Al Baqara 203

La vérité émanant du Qur’ân nous appelle à être vigilant avant de donner des titres de vertus ou jeter l’anathème sur autrui : il faut le pratiquer, le comparer, l’examiner dans sa cohérence interne (sa logique de conception et de conviction) et dans sa cohérence externe (la conformité entre le dire et le faire), tenir du crédit de ses sources et de ses motivations ainsi que des forces qui l’animent dans telle ou telle autre direction. Le Qur’ân nous appelle à la vigilance pour ne pas confondre l’ami et l’ennemi, l’allié et l’adversaire dans cette lutte idéologique qui vise à conquérir le monde des idées et des croyances :

{O vous qui êtes devenus  croyants, si vous vous lancez pour la cause d’Allah, discernez bien et ne dites pas à qui vous offre la paix : « Tu n’es pas croyant », aspirant aux vanités de la vie terrestre, alors qu’Allah Possède d’innombrables biens. Ainsi étiez-vous auparavant, mais Allah vous A Gratifiés. Discernez bien.} An Nissa 94

{O vous qui êtes devenus  croyants, si un perverti vous apporte une nouvelle, examinez-la pour que vous ne portiez atteinte à des gens par ignorance, et que vous ne vous repentiez de ce que vous avez fait. Et sachez que le Messager d’Allah est parmi vous. S’il vous obéissait en beaucoup de choses, vous vous en ressentiriez, mais Allah vous A Fait aimer la foi, et l’A Embellie en vos cœurs, et vous A Fait haïr la mécréance, la perversité et la désobéissance. Ceux-là sont ceux qui suivent le droit chemin} Al Hujurat 6

Malgré le matraquage médiatique la France reste relativement un pays de relative liberté. Même si les espaces de manœuvre sont limités il est possible de comparer, de trouver des alternatives. Ce n’est pas le cas dans les pays arabes ou le travail de sape est un travail délibéré orienté contre la personnalité musulmane et celle-ci n’a aucun espace de liberté pour se défendre ou être une force de proposition sans risquer sa vie ou mettre en péril sa subssitance.

 La décolonisation de la langue et des mots est, après le constat culturel de l’indépendance inachevée, plus important que la décolonisation de la terre.

L’instruction, fondée sur le dénigrement ou la caricature de l’islam par les intellectomanes modernistes qui supervisent l’administration et les grands commis de la pédagogie nationale ont produit ce que Malek Bennabi surnomme l’Alpha-bêtisme. Au porteur de haillons de la période coloniale ils  lui ont  ajouté le porteur de lambeaux scientifiques en délabrant le système d’enseignement et en s’attaquant à l’œuvre nationale d’Arabisation. L’intellectomane de Malek Bennabi, l’intellectuel négatif de Bourdieu ou l’intellectuel organique de Gramsci, sous la couverture de leurs diplômes et de leur rang social et politique, leurrent le peuple en devenant eux-mêmes des instruments consentant de la diversion idéologique menée par le colonialisme. Leurs cerveaux ne sont pas élaborés pour produire des idées et de la science utile à la société mais des discours au service de la mal gouvernance. Leur savoir sans conscience en fait d’eux, dans le meilleur des cas des rentiers et au pire des ramasses miettes, des symboles de  la déliquescence morale, de faces brillantes de la fausse monnaie intellectuelle…

Une politique d’alphabétisation et d’arabisation conduite par les analpha-bêtes sans conscience et sans morale politique ne peut que conduire à la ruine de la nation et à l’abêtissement de ses individus qui perdent la compétence adamique de nommer non seulement les idées et les sentiments mais les choses et les lieux. Le parler algérien par exemple n’est ni du berbère ni de l’arabe mais du FLE terme inventé par les pédagogues en France pour « Français langue étrangère ». Pour illustrer le fossé culturel et idéologique entre les pays arabes et le France dans la prise en charge de l’enseignement de la langue nationale nous citons quelques  paragraphes du Livre blanc de la Culture-Langue française :

« La didactique du français langue étrangère (FLE), du français langue seconde ou de scolarisation (FLS) est au cœur du dispositif qui touche à ce domaine de l’enseignement de la langue et de la culture française, tant en France qu’à l’étranger – accueil des migrants, des étrangers ou actualisation des compétences de communication de Français en difficultés – pour soutenir le rayonnement culturel, linguistique et économique de notre pays (…) S’engager dans l’enseignement-apprentissage d’une langue-culture étrangère ou seconde (le français en l’occurrence) implique par conséquent des choix à la fois sociétaux, professionnels et éthiques (…) La valorisation de l’intégration par l’étude des langues-cultures constitue aussi de nos jours un enjeu quant à la participation positive et constructive des populations (migrantes ou non) et de leurs descendants à la vie de la société dans laquelle ils vivent. »

Ce n’est pas le cas des pays arabes qui font des concessions au Français, à l’Anglais et au dialecte au détriment de la langue Arabe. Il leur manque la vision française, par exemple, celle du devoir national de soutenir le rayonnement culturel, linguistique et économique de leur nation. Il leur manque le débat démocratique sur le principe de sens qui donne naissance au développement économique, à l’indépendance politique et au rayonnement culturel…

Ignorant le travail qui produit la liberté, la liberté  qui donne les garanties à la dignité humaine, et l’élégance qui donne respect et admiration mais aussi incitation à écouter son témoignage de foi ils ne peuvent qu’ignorer la signification de la langue et de la parole.

La parole traduit aussi bien l’efficience de l’idée que l’efficacité du travail. Le travail taylorisé ne peut se contenter de mots vagues et de phrases de badinage. L’usine, le laboratoire, le centre de recherche développement, l’amphithéâtre d’université ont besoin de la logique de la pensée et cette logique ne peut naitre que si elle est portée par une logique de la langue. La logique exige qu’il y ait des emprunts mais elle refuse qu’il y ait confusion. Entre l’être et l’agir, tous les deux sous-tendus par la langue, on a tendance à oublier que l’être est l’intériorisation de l’action et l’action extériorisation de l’être et qu’il suffit que la langue qui est à la  fois le lien de communication et le ciment de fédération entre l’intérieur et l’extérieur, soit corrompue ou lacunaire pour que l’être et son action soient déficient dans leur expression et entropique dans leur relation.

Ni la politique ni l’économique ne peuvent se passer de la culture et de son socle linguistique pour créer la tension de l’être, de l’action et de la communication qui produisent et accompagnent l’élan civilisateur d’une société. L’école, l’université, l’administration et l’usine ne peuvent se résumer à n’être que  des lieux de communication d’un alphabet tronqué ou confus mais des temples où la conscience reçoit la parole  et les valeurs véhiculées par cette parole sans interférences d’inculture ou de brigandage sur la langue. L’espace ne devient temple que s’il inscrit la civilisation dans le temps. Il n’y a civilisation que s’il y a au préalable décolonisation des mentalités qui donne à l’homme la conscience du devoir d’inscrire le sens avec les signes de sa langue. Pour nous les signes sont ceux de la langue arabe, langue du Qur’ân.

La décolonisation de la langue et des mots est, après le constat culturel de l’indépendance inachevée, plus important que la décolonisation de la terre. Malek Bennabi a montré le changement de paradigme par le changement des mots et son exemple a toute sa signification ici : « Les mots marquent des positions idéologiques déterminées… Si on les modifie, le changement d’un terme ne marquera pas seulement l’abandon d’une position idéologique qu’il désignait, mais il marquera aussi un changement dans le comportement révolutionnaire lui-même. Quand le combattant cesse de se nommer « El Moudjahid » c’est le comportement du « troufion » qui réapparait, comme dans un régime de tirailleurs »… Une révolution doit maintenir sa rigueur même dans le langage pour garder sa portée rédemptrice sur l’homme. Certaines licences de langage – qui se veulent audaces révolutionnaires – ne sont en fait que des trahisons de la révolution dans son objet essentiel : la transformation de l’homme selon la loi coranique. »

Tous les penseurs musulmans, d’exprimant en arabe, en français, en anglais, en persan, en kurde ou dans une langue d’Asie, sont remplies de  vérité sur la question linguale et son rapport à la personnalité. Tous ils s’inspirent de la vigilance coranique qui met en garde contre le laxisme langagier qui fait naitre des contre sens et des dérives idéologiques, culturelles et civilisationnelles catastrophiques :

{Les nomades affirment : «Nous croyons en Dieu !» Dis-leur : «Vous n’avez pas encore la foi ! Dites plutôt : “Nous nous sommes en apparence soumis”, car la foi n’a pas encore pénétré dans vos cœurs.} Al-Hujurat – 14.

{Parmi les Juifs, il en est qui altèrent le sens du discours, et disent : «Nous avons entendu et nous refusons d’obéir. Écoute ! Puisses-tu ne rien entendre !» Et ils ajoutent : «Aie des égards pour nous !», en employant le terme équivoque râ`inâ, avec l’intention de dénigrer la religion. Que ne disent-ils plutôt : «Nous avons entendu et nous avons obéi ! Écoute et regarde-nous !» C’eût été préférable pour eux et plus loyal. Mais Allah les a maudits pour leur impiété et pour la tiédeur de leur croyance.} An-Nisaa – 46.

{C’est en raison de leur iniquité et du grand nombre de gens qu’ils ont détournés de la Voie d’Allah que Nous avons interdit aux Juifs l’usage d’excellentes nourritures autrefois autorisées.} An-Nisaa – 160.

 

Lever les équivoques fait partie de l’éthique et de l’esthétique de l’Islam.

L’éthique et l’esthétique de l’Islam que les Maîtres spirituels de l’Islam appellent les règles de Bienséance de l’Ego envers Allah exigent du croyant un cœur qui tangue entre la Taqwa (crainte révérencieuse de Dieu) et l’Espérance qui donne courage de lutter en s’accrochant à la Miséricorde divine qui s’interpose entre l’homme et le désespoir ou l’abandon. Le grand théologien de l’examen de conscience, Al Muhasibi, met l’accent sur la connaissance de Dieu et le respect que celle-ci confère au croyant dans ses pensées comme dans ses actes, le moteur de ce respect est justement la crainte et l’espérance :

« Sache ! ô mon frère que les gens ne sont autant sincères dans leurs œuvres que selon le degré de la connaissance qu’ils ont de Dieu, qu’ils ne sont humbles devant Lui que selon le degré de leur connaissance à Son sujet, qu’ils ne Lui rendent grâce pour Ses bienfaits que selon le degré de leur connaissance à Son sujet, qu’ils craignent et espèrent en Lui qu’en fonction du degré de cette connaissance. Qu’ils ont une bonne opinion de Lui en fonction du degré de cette connaissance, qu’ils endurent Son obéissance, évitent Sa désobéissance et supportent la dissimulation de Son obéissance et les épreuves que leur imposent ses Arrêts en fonction du degré de la connaissance qu’ils ont de Dieu, qu’ils aiment ce qu’Il aime et abhorrent ce qu’Il déteste en fonction de degré de cette connaissance. Dieu s’expose à la déficience dans tout ce que nous avons indiqué selon ce qu’il a raté de cette connaissance et selon ce qu’il en a reçu. Il en va de même de sa part en matière de bien et de mal.

Aussi, cherche ô mon frère cette connaissance auprès de celui qui la possède avec l’attitude de l’humble qui ne la mérite pas si l’on se tient à sa propre valeur. Car les savants n’ont atteint autant de sommets en matière de savoir que grâce à leur sincérité dans la recherche et au fait qu’ils accordent aux choses leurs justes places… »

Comme Al Muhasibi, Ibn Al Qayyim Al Jawziya met en relief l’auto critique (al mouhasabah) qui témoigne de la Taqwa des cœurs (la piété des cœurs) et qui prend racine  dans la crainte (al Khawf) et l’Espérance (ar Raja) lesquelles prennent à leur tour racine dans la Promesse (al Wa’d) et la Menace (al Wa’id). Dans « Le sentier des itinérants » il montre que la station spirituelle de la crainte est la plus bénéfique pour le cœur du croyant en plus qu’elle est la plus obligatoire comme le stipule le verset

{Ne le craignez pas, craignez-Moi si vous êtes croyants} ali ‘imrane 175

Dans toutes nos actions, écrire, travailler, parler ou lutter, nous sommes soumis à cette règle de la crainte de déplaire à Dieu si nous voulons mériter le titre de croyants : Crainte de désobéir, de trahir, d’être déloyal, insouciant, de manquer de vigilance, de perdre le sens …

{Ceux qui, de la crainte de leur Seigneur, sont pénétrés,  qui croient aux versets de leur Seigneur,   qui n’associent rien à leur Seigneur,  qui donnent ce qu’ils donnent, tandis que leurs cœurs sont pleins de crainte [à la pensée] qu’ils doivent retourner à leur Seigneur.  Ceux-là se précipitent vers les bonnes actions et sont les premiers à les accomplir.  Nous n’imposons à personne que selon sa capacité. Et auprès de Nous existe un Livre qui dit la vérité, et ils ne seront pas lésés.} al Mouminoun 57 à 62

Il montre que l’Espérance est une étape spirituelle qui conduit le croyant vers l’amour en lui facilitant le cheminement jusqu’à l’aboutissement final comme le signifie d’ailleurs le verset suivant clôturant la Surah de la Caverne  et donnant sens ultime à toutes les péripéties et actions des récits qu’elle a narré se rapportant aux grands défis de l’homme et de la civilisation que lui posent la foi, la science, la technologie, la bonne gouvernance et la langue :

{Quiconque, donc, espère rencontrer son Seigneur, qu’il fasse de bonnes actions et qu’il n’associe dans son adoration aucun à son Seigneur›.} al Kahf 110

Ibn Al Qayyim montre la différence entre le cœur vaillant mis en mouvement sur le chemin de Dieu et le cœur défaillant mis en inertie par le fatalisme hérité de la conjugaison de la décadence musulmane et de la colonisation occidentale :

« Mais la différence entre l’espérance (al-rajâ’) et le faux espoir (tamannî), c’est que le tamannî s’accompagne de la paresse. Il ne mène pas son auteur sur la voie du sérieux et de l’effort, contrairement à l’espérance qui implique le déploiement de l’effort et de la bonne remise confiante (al-tawakkul). Ainsi, le premier s’apparente à l’état de celui qui souhaite avoir une terre pour la semer et la moissonner, tandis que l’état du second s’apparente à celui qui laboure son terrain, le prépare et l’ensemence avec l’espoir que sa culture va pousser et grandir, Voilà pourquoi les maîtres de la connaissance sont unanimes pour affirmer que l’espérance n’est valable que si elle est accompagnée de l’action.

Il faut savoir que l’itinérant possède deux regards. Par l’un d’eux il voit son âme, ses défauts et les fléaux qui détruisent ses œuvres et se donne une ouverture sur la crainte pour puiser auprès des faveurs de Son Seigneur, de Sa générosité et de Sa libéralité. Par l’autre regard il se donne une ouverture sur l’espérance.

C’est pourquoi on a dit à propos de la définition de l’espérance que c’est la vision de l’ampleur de la miséricorde divine.

Pour sa part Abû ‘Ali al-Rûdhabârî a dit : « L’espérance et la crainte s’apparentent aux deux ailes de l’oiseau. Lorsqu’elles se déploient parfaitement l’oiseau retrouve son équilibre en vol. Lorsque l’une d’elles se déploie imparfaitement son vol s’en ressent. Et lorsqu’elles se détériorent l’oiseau s’expose à sa perte ».

Dans ce cheminement spirituel Ibn al Qayyim montre le chemin celui de la fuite vers Dieu, le même que celui de la partance vers Dieu :

{Fuyez vers Dieu}

Il s’agit de fuir les réprouvés et les fourvoyés décrits dans la Fâtiha (l’Inaugurale du Qur’ân). La fuite n’est pas physique mais spirituelle, mentale, comportementale, idéique pour une partance vers Dieu :

{Je suis partant vers Dieu, Il me guidera certainement}

La partance est résumé dans la Fâtiha par :

{C’est Toi que nous adorons, c’est Toi que nous implorons à notre secours, guide-nous sur la voie de la rectitude}.

La voie de la rectitude, celle de la certitude, qui prend appui sur la crainte d’être parmi les réprouvés et les fourvoyés et l’espérance d’être agréé parmi les Croyants bien guidés, confirme une fois de plus notre refus de traduire « la’alakoum » par « peut être » ou par « ainsi ». Entre la crainte et l’espérance il n’y a pas de place aux dérives spirituelles et praxitiques car il n’y a pas de place, du point de vue linguistique comme du point de vue religieux à l’incertitude dans l’énoncé de l’énonciateur divin ni de certitude dans l’énoncé de l’énonciataire humain il y a un conditionnel : mus à la fois  par la crainte de l’insuffisance de nos œuvres et par l’Espérance en  la miséricorde divine nous pourrions atteindre  la piété du cœur, la réussite dans ce monde et le salut dans l’autre, sinon  aspirer à s’en approcher le plus fidèlement et le plus sincèrement.

{Et redoutez le jour où nulle âme ne suffira en quoi que ce soit à une autre; où l’on n’acceptera d’elle aucune intercession; et où on ne recevra d’elle aucune compensation. Et ils ne seront point secourus.} al Baqara  48

{Et votre Seigneur dit: ‹Appelez-Moi, Je vous répondrai. Ceux qui, par orgueil, se refusent à M’adorer entreront bientòt dans l’Enfer, humiliés›.} Ghafir 60

 

 La clé pour comprendre le Coran : la Taqwah

 

La clé pour comprendre la lecture du Qur’ân dans n’importe quelle langue et agir en se conformant à ses injonctions dans n’importe quel endroit du monde est la Taqwa qu’on traduit par crainte, crainte révérencieuse ou crainte espérante.

Bien entendu le mot Taqwa du Qur’ân nécessite un développement particulier que nous ne ferons pas ici. Il faut juste retenir que ce développement s’inscrit toujours dans le cadre du Monothéisme islamique qui donne sens au contexte, à la phrase et au mot dans l’énoncé Qur’ânique.

La compréhension du monothéisme, qui semble échapper aux stylistes qui brodent sur l’islam des mensonges, est dans la réponse à ce questionnement que les illustres doctes doivent préparer avant que ne survienne le jour inéluctable qui demandera des comptes à leur intellect:

{Ont-ils pris des divinités qui peuvent ressusciter les morts de la terre ?  S’il y avait dans le ciel et la terre des divinités autre qu’Allah, tous deux seraient certes dans le désordre. Gloire, donc à Allah, Seigneur du Trône; Il est au- dessus de ce qu’ils Lui attribuent!  Il n’est pas interrogé sur ce qu’Il fait, mais ce sont eux qui devront rendre compte de leurs actes.  Ont-ils pris des divinités en dehors de Lui? Dis: ‹Apportez votre preuve›.} Al Anbiya (les Prophètes)  21

{Allah ne S’est point attribué d’enfant et il n’existe point de divinité avec Lui; sinon, chaque divinité s’en irait avec ce qu’elle a créé et certaines seraient supérieures aux autres. (Gloire et pureté) à Allah! Il est au dessus de tout ce qu’ils décrivent.} Al Mouminoune (les Croyants) 91

{Qui est le mieux : des Seigneurs éparpillés ou Allah l’Unique} Yusuf 39

Qui est le mieux ? Quelle est la meilleure communauté ? Quelle est la meilleure récitation du Qur’ân ? Quelle est la meilleure traduction du Qur’ân ? Tant de questions et tant de réponses qu’il est impossible d’en faire l’inventaire ici. Nous nous contenterons d’inviter celui qui est en quête de détails, d’arguments plus approfondis et mieux fournis sur la thématique de la traduction du Qur’ân  à tirer profit de ll’esprit scientifique que l’islam a cultivé chez le lecteur et le récitant du Qur’ân :

{Apportez vos preuves si vous êtes véridiques}

Il vient après une série de défis à la raison :

{N’est-ce pas Lui qui a créé les cieux et la terre et qui vous a fait descendre du ciel une eau avec laquelle Nous avons fait pousser des jardins pleins de beauté. Vous n’étiez nullement capables de faire pousser leurs arbres. Y-a-t-il donc une divinité avec Allah? } an naml 60

{N’est-ce pas Lui qui a établi la terre comme lieu de séjour, placé des rivières à travers elle, lui a assigné des montagnes fermes et établi une séparation entre les deux mers, – Y a-t-il donc une divinité avec Allah?} an naml 61

{N’est-ce pas Lui qui répond à l’angoissé quand il L’invoque, et qui enlève le mal, et qui vous fait succéder sur la terre, génération après génération, – Y a-t-il donc une divinité avec Allah?} an naml 62

{N’est-ce pas Lui qui vous guide dans les ténèbres de la terre et de la mer, et qui envoie les vents, comme une bonne annonce précédant Sa grâce. – Y a-t-il donc une divinité avec Allah? } an naml 63

{N’est-ce pas Lui qui commence la création, puis la refait, et qui vous nourrit du ciel et de la terre. Y a-t-il donc une divinité avec Allah? Dis: ‹Apportez votre preuve, si vous êtes véridiques!› } an naml 64

L’argumentation spirituelle, éthique, esthétique, scientifique et linguistique met dos au mur les doxas religieuses et idéologiques dans toutes les langues.

Nous avons répondu à l’interrogation et à l’exclamation sur le Divin « piégé » par la traduction. Cette réponse serait imparfaite et incomplète si nous ne donnions pas la source sur laquelle nous nous appuyons et le mobile qui nous a guidé :

{O vous qui devîntes croyants, ne trahissez point Allah et le Messager et ne trahissez pas ce qu’on vous a confié, tout en le sachant. Et sachez que vos biens et vos enfants ne sont qu’une tentation, et qu’Allah Possède  une immense rémunération. O vous qui devîntes croyants, si vous craignez Allah, Il vous Accordera un Critère, vous Expiera vos mauvaises actions et vous Absoudra. Allah Possède la Munificence immense. Et lorsque ceux qui devinrent mécréants planifiaient contre toi pour t’emprisonner, ou te tuer, ou te chasser. Ils rusent et Allah Planifie, mais Allah Est le Meilleur des Planificateurs.} Al Anfal 27

 

Le Divin « piégé » ?! Partie 1/3

Le Divin « piégé » ?! Partie 2/3

Le Divin « piégé » ?! Partie 2/3

Cohérence de l’Islam

Si nous voulons traiter de l’islam et de ses thèmes il faut donc le traiter dans sa propre cohérence et avec la signification de sa spiritualité et de son système idéique et civilisationnel. Opérer un transfert de concepts et de méthodes de l’Eglise et de la laïcité vers l’Islam est une trahison envers le contenant et le contenu Qur’ânique : l’Arabe et l’Islam.

C’est l’amour de la vérité et le droit à la différence qui nous donnent le devoir de témoigner contre cette trahison volontaire ou inconsciente et d’appeler à plus de vigilance au sein des jeunes qui vivent dans un monde qui n’a plus le temps de lire ou de chercher le sens pris par  le spectacle des produits de  la civilisation matérialiste mis en scène par les spécialistes qui savant manier les signes et les symboles arrivent à manipuler  le public même si ce public est un amphithéâtre universitaire et non pas des  gradins d’un stade de football ou une  salle d’un dancing ou d’un casino.

La différence en Islam atteint un seuil de justice nulle part connu : chaque communauté vivant sous une gouvernance islamique n’a pas le statut de minorité mais de communauté qui a non seulement sa liberté de culte et de croyance mais son droit de recourir à ses propres références culturelles et idéologiques en matière de droit personnel et familial et même en matière de  justice. Un chrétien ou un juif avait le choix entre un juge et des lois musulmans ou de son propre culte. La Chariâa musulmane tant décriée ne s’applique pas d’une manière indifférenciée et forcée sur le musulman et le non musulman. C’était le temps où l’humanité ne connaissait qu’un seul Islam celui enseigné par Mohamed et transmis par ses compagnons qui ne sortaient ni de la Sorbonne ni d’Al Azhar ni d’ Oum al Qora.

Accepter la différence c’est vivre avec l’exigence de justice et d’équité en tenant compte des besoins réels et des possibilités réelles. La véritable égalité est dans le droit à la différence. La véritable sagesse est dans la reconnaissance de cette différence et non d’imposer une égalité indifférenciée qui finit par détruire l’esprit d’émulation, la revendication légitime au mérite et met fin à l’esprit de justice et d’équité. L’être rationnel et dont la rationalité est quantitative commet une injustice quand il  prive l’homme de sa liberté d’être lui-même et le prive de sa sanction personnalisée mais juste (conforme à l’esprit de justesse et à l’esprit de loi) et équitable (la justice appliquée comme elle a été rendue sans oubli, sans dénaturation et avec le même souci d’être impartial mais humain) :

{En vérité, les propos que vous tenez sont pleins de contradictions  et seul un dévoyé se détourne de la Révélation !  Périssent donc les menteurs qui, indifférents à leur sort, se laissent distraire par leurs passions} az Dhariyat 9

Cette différence n’exclue pas le dénominateur commun et sacré entre tous les hommes qu’on retrouve dans l’appel Qur’ânique al Insane ou dans celui de Nafs cette entité globale qui fait de l’être un corps de chair, un esprit, une respiration vitale, une conscience  et une âme et chaque partie a sa nourriture et chaque partie œuvre pour la cohérence et la cohésion du tout inséparable d’aucune de ses parties.  Cette Nafs, par sa foi mais aussi par  son déploiement praxitique de la foi est une conscience individuelle, spirituelle, sociale, politique et morale qui se blâme, qui s’auto critique, qui s’évalue, qui faute, qui se repentit, qui fait effort de s’améliorer, qui doute de soi, qui est prise entre la crainte et l’espérance est une lutte incessante entre le bien et le mal entre la vrai et la faux, entre la détermination et l’irrésolution, entre la constance et la tentation : elle vit le drame humain dans sa splendeur, dans sa grandeur, dans cette vérité qui a fait que Dieu s’exprime par un serment pour montrer le caractère solennel et grave du drame humain qui se joue dans la conscience humaine source de son salut ou de sa perdition :

{Je Jure formellement par le Jour de la Résurrection ! Et Je Jure formellement par la conscience en blâme continuellement !} al Qiyama 1

Cette conscience vigilante, celle du croyant agissant pour le bien, malgré ses souffrances dans sa quête de vérité et sa lutte pour la justice, trouve l’apaisement du juste, du bien guidé dans cette vie et au moment ultime lorsqu’il faut quitter cette vie pour une autre éternelle :

{Et Nous Donnâmes, en fait, à Moïse et à Aaron le Critère comme Lumière et Rappel pour les pieux : ceux qui craignent leur Seigneur en conscience et prennent garde de l’Heure.} al anbiya 48

{O toi, âme tranquille, reviens à ton Seigneur satisfaite d’Allah, et satisfaite par Lui. Entre donc parmi Mes serviteurs (bien-aimés), et entre dans Mon Paradis.} al Fajr 27

En opposition à cette Nafs en Jihad permanent il y a celle des insouciants, des mécréants, des hypocrites, des  fauteurs de troubles, des corrompus et corrupteurs, tous ceux qui ont une conscience sans scrupules, sans foi, sans frein contre les incitations au mal et au mensonge :

{Certes, l’ego insiste sur le mal, sauf celui qu’Allah A Pris en Sa Miséricorde. Certes, mon Seigneur Est Absoluteur, Miséricordieux.} Yussef 53

Ce sont les réprouvés et les fourvoyés de la Fatiha, puisse Dieu nous épargner leur sort, nous éviter leur compagnie et nous purifier de leurs travers.

 Les dérives du rationalisme qui font perdre à la raison toute rationalité, à la conscience toute vigilance et à l’érudit toute crédibilité:

Comment un esprit « rationnel » formaté dans l’idéologique égalitariste peut-il voir l’équité et l’égalité (ou l’inégalité)  entre les sacrifices et les risques du Pèlerin d’un coté et les bienfaits divins de l’autre :

{Appelle les hommes au pèlerinage hajj ! Ils répondront à ton appel, à pied et sur toute monture, venant des contrées les plus éloignées, pour participer aux bienfaits du pèlerinage et invoquer le Nom du Seigneur aux jours fixés, en immolant la bête prise sur le bétail que Dieu leur a accordé. Mangez-en vous-mêmes et donnez-en à manger aux pauvres démunis.} al hadj 28

Quand les musulmans font  du zèle en transformant la vocation du pèlerinage « parcours du combattant » pour la défense de la foi, de l’islam, de la communauté musulmane en  supplices, en arnaques, en mensonges, en négligence, en business…ils perdent les bienfaits et la récompense. Tous à un titre ou à un autre nous sommes redevables du bon accomplissement du Hadj. Dans le passé les véritables serviteurs (servants) des lieux saints étaient les Moutawifs et les Zamzami qui se consacraient au service du pèlerin par amour de Dieu et par respect des traditions abrahamiques et mohammadiennes. Pourtant le Qur’ân, du vivant du Prophète,  ne leur a pas donné un statut égal à ceux qui se consacrent à la cause de la vérité et des droits de l’homme :

{Comment pouvez-vous assimiler celui qui est chargé de distribuer l’eau aux pèlerins ou d’entretenir la Mosquée sacrée à celui qui croit en Dieu, au Jugement dernier et qui combat pour la Cause de Dieu? Non, ils ne sont pas égaux devant Dieu, et Dieu ne guide point les injustes.} At-Tauba – 19.

Aujourd’hui tout est devenu rentabilité, productivité, gain, bénéfices sous  la domination de la  culture moderne  capitalise qui favorise l’émergence de courtiers, de rentiers, de traders de voyagistes attirés par le gain facile et la naïveté des pèlerins souvent vieux et ignorants des rites.

Sur ce terrain les associations musulmanes, les représentants de l’état, les imams méritent un procès verbal de carence et d’incompétence. Sur le plan de la pensée politique et économique nous sommes en réalité, même si nous admettons l’opportunité et la pertinence des termes de théomarketing et d’économie de dévotion, loin des problèmes essentiels que les véreux ne peuvent cacher en l’occurrence les ravages de l’économie mondiale dans les esprits du musulman qui est amené sur l’autel du monothéisme du marché à renier sa foi et ses valeurs par l’adoption d’un modèle consumériste et financier fondé sur le Riba et l’exploitation de l’homme. On ne peut poursuivre un but aussi noble soit-il si on se trompe de priorité et de cibles en tentant de redresser l’ombre au lieu de l’arbre tordu.

Les trois représentations  les plus connues en France, la GMP, le CFCM ET l’UOIF portent la responsabilité la plus importante. Nous en portons une partie moindre certes car nous n’avons ni mandat ni représentativité mais en vertu du fard kifaya la défaillance des uns engage la responsabilité des autres. Dans l’islam la communauté en aucun moment de son existence et des ses circonstances ne peut être dégagée de ses responsabilités car sa vitalité, sa considération, sa promotion, son déploiement, sa survie même dépendent de sa vigilance et de sa compétence à assumer ses responsabilités. Par cette contribution nous participons au débat et nous invitons chaque musulman et chaque être libre et conscient d’y souscrire pour la dignité de l’homme, pour la promotion de la vérité, pour donner sens à la parole…

Notre défaillance, nos problèmes hérités de la décadence de la civilisation musulmane et de la colonisation ne peuvent nous faire oublier que la raison éclairée ne peut construire un argumentaire fallacieux sous prétexte qu’une agence de voyage ou un guide mal intentionné a arnaqué de vieux pèlerins. Il est honteux sur le plan intellectuel de confondre intentionnellement le contrat entre le pèlerin et le voyagiste ou le guide et le contrat avec Dieu. Il est honteux pour un intellectuel de profiter de ces défaillances pour étaler notre misère que nul n’ignore et oublier l’essentiel : la défaillance de l’état français qui laisse les musulmans français ou résidents sur son sol vivre comme des citoyens bannis des lieux de la loi et livré aux trafiquants de tout genre dans le marché du hallal et dans l’accomplissement des rites du Hadj et de la Omra.

Ce sont les conditions sociologiques et l’amalgame entretenu qui font que l’esprit rationnel du mécréant perfide et la foi raisonnée du croyant  sincère se trouve face à la même énigme devant l’organisation et le déroulement du pèlerinage chaque année mais avec des mobiles opposés : «  sacrifices de quelques jours éphémères en échange du Paradis  eternel ?»

On veut nous faire croire que notre religion est aussi une utopie spirituelle dont la réalité n’est que magouilles et intérêts sordides. Dans la lutte idéologique contre l’islam rien n’est gratuit. Il s’agit sans doute de faire  perdre aux piliers de l’islam leur crédibilité en s’appuyant un peu sur la  dérive de certains de nos coreligionnaires et beaucoup plus sur la  dérive sémantique et le matraquage idéologique des écrivaillons sur l’islam. Les démagogues de l’islam ont tout fait pour présenter Mohamed comme un miracle impossible à réaliser. Un passé fabuleux, certes, mais un passé dépassé qu’il faut surmonter en s’ancrant dans la modernité et l’Occident. Les musulmans francisés pris dans les limites de la connaissance de leur propre langue et de la langue française qui n’est pas leur langue maternelle tombent dans le piège de la raison et de la traduction qui devient arme idéologique de subversion contre la foi. A titre d’exemple : l’appel Qur’ânique qui fait frémir les cœurs et jaillir des perles de pluie des yeux éveillés YA ÂYOUHA LAZINA ÂMAOU est traduit par « O vous qui  avez cru ». Des islamologues académiciens et des grammairiens avertis utilisent le passé composé sachant que dans la langue française, si riche et si complexe, le passé composé exprime une action ponctuelle qui s’est déroulée et achevée dans le passé laissant ainsi sous entendre que  cette croyance est passagère, consommée dans le temps et le lieu du bédouin arabe. L’islam serait une illumination volatile dans le désert d’Arabie comme l’est la mémoire d’un poisson rouge dans un bocal.

Dans la langue coranique le passé ou Madhi est un accompli qui peut continuer à s’accomplir,  ce n’est pas un passé révolu comme le passé simple ou le passé composé de la langue française. La posture cognitive de l’accomplissement et celle du révolu ne peuvent se représenter le monde de la même manière du fait de leur culture différente laquelle culture repose sur des syntaxes et des langues différentes. Quand l’islam dit que le hokm Allah est madhi fina celà ne veut pas dire qu’il est passé mais qu’il est immuable de l’aube à la nuit des temps.

Le dernier bastion de la foi musulmane, ne faisant pas de distinguo entre le temporel et le spirituel, serait  tombé avec la chute du Khalifat Ottoman et le partage du monde musulman par les accords de Sykes-Picot : l’islam dans l’imaginaire du colonialisme ne devrait se conjuguer qu’au passé composé et au passé simple, une finitude consommée dans le temps et l’espace sans présent ni devenir. Dans l’esprit du colonisé qui fréquente l’école de la République on lui assène le passé composé et le passé simple  comme une réclusion historique dont il ne devrait pas sortir. La foi comme le Message Mohammadien sont implicitement enracinés dans notre imaginaire, dans notre reflexe langagier et idéique comme phénomène  passager comme on aurait dit vulgairement « O tu as cru ceci et cela … sans suite, sans vocation, sans continuité… » L’islam et le Coran seraient donc des  événements  comme la Bible et la Thora  déroulés à un moment du passé, qui peut ne pas être précisé ni connu précisément. Ce qui est faux ! Le but du jeu est de créer une falsification imaginaire en jouant sur l’impact de la langue dans notre perception des événements, des idées et des choses. La langue n’est pas neutre, elle est message ou témoignage : un parti pris.

Traduire cet appel Qur’ânique par

{ O vous qui êtes devenus croyants}

Nous sommes dans le passé  non historique mais narratif et ontologique. La narration nous informe qu’un événement durable a eu lieu au passé et que cet événement est essentiel dans la trame narrative ou dans le canevas historique. Il va être déterminant pour la suite des événements. Il s’inscrit dans un devenir, dans un projet… Sur le plan ontologique le passédans la langue arabe signifie que la foi est achevée et non dépassée. Elle est achevée, il n’y a plus de doute ni confusion. D’ailleurs le Qur’an signifie cet achèvement de la foi comme un parachèvement et dans l’histoire du monothéisme il y aura pour l’individu un avant la foi et un après la foi et pour l’histoire de l’humanité il y  au  un avant  et il y aura un après pour  l’islam et pour le processus prophétique; il y a eu  un avant Mohamed (saws) et il y aura  un après Mohamed (saws) :

{Aujourd’hui, ceux qui devinrent mécréants ont désespéré de votre religion, ne les craignez donc plus et craignez Moi. Aujourd’hui, J’Ai Parachevé pour vous votre religion, J’Ai Parfait ma Grâce envers vous, et J’Ai Agréé pour vous l’Islam comme religion.} Al Maidah 3

Dans la langue arabe le verbe croire ou avoir la foi est conjugué dans le Màdhi (passé) pour signifier que l’action ou l’événement est antérieur non au présent  des convertis  mais à la narration sur leur conversion pour devenir phénomène historique s’inscrivant dans la conituité du temps hors du lieu et du moment des sujets incarnés en ce moment et en ce lieu. Les compagnons du Prophète deviennent ainsi des modèles c’est à dire des schémas de conduite et de pensée reproductibles en tout lieu et tout moment dans le monde en reproduisant leur motivation, la posture  du Prophète (saws) qui les a mis en mouvement et le discours du Coran qui les a réveillés et les a guidés. Il n’y a pas signification une fois de plus de finitude mais d’antériorité qui réconforte l’idée que Dieu est savant d’une part et qu’il confirme la conversion à l’islam introduisant ainsi la joie, la sérénité et l’espérance dans le cœur des croyants appelés à jouer un rôle majeur dans l’histoire de l’humanité. Le doute n’est plus permis sur la foi des convertis à l’islam. Le même passé va être utilisé pour les Mécréants et les hypocrites signifiant qu’il n’y a plus de doute sur leur mauvaise foi par l’attestation solennel d’Allah l’Omniscient.

Par ailleurs la formule « O vous qui êtes devenus croyants » introduit le verbe devenir pour confirmer la transition historique et ontologique du croyant entre un passé achevé mais non révolu et un avenir où la question fondamentale n’est plus croire mais agir animé par la foi, agir pour la foi ce que Roger Raja Garaudy nomme « qu’as-tu fait pour ta foi et qu’a fait de toi ta foi ? ». Donc il y a mise en exergue de l’option résolu du croyant transformé par la foi en devenir, en projet c’est-à-dire une idée prenant racine dans le passé et se projetant dans le présent et l’avenir à la fois comme mémoire, attention et attente ou espérance. Le temps de l’insouciance et de la marginalisation dans l’histoire  est révolu c’est l’ère des croyants résolus à témoigner de leur foi et de la transformation de leur être par cette foi dans la vie sociale, culturelle, spirituelle, artistique, politique… La foi comme œuvre civilisatrice. L’être est en devenir ainsi que sa foi et le cadre d’expression de sa foi : le social, le politique, l’idéologique, le culturel, le scientifique et la civilisation. Après l’affirmation de l’appartenance au monothéisme il faut passer à une seconde étape celle de l’implication pour le monothéisme dans le devenir de soi et de l’humanité par le témoignage (Chahada) de ce qu’on fait de sa vie, de son temps, de son argent, de son intelligence, de son pouvoir…

Par le passé de la conjugaison arabe  on crée aussi une liaison avec l’humanité achevée avec ses Prophètes et leurs disciples et une continuité avec  les générations à venir liées par le même pacte de foi transcendant les frontières du temps et de l’espace et ce   depuis Adam  jusqu’au retour de Jésus comme le fait la sourah al Baqara du début à la fin et la sourate AT Tawbah à titre d’illustration :

{Ce Livre-là, sans aucun doute, est une Direction infaillible pour les pieux, ceux qui croient en l’Occulte, accomplissent la prière et dépensent de ce que Nous leur Avons Octroyé, et ceux qui croient en ce qui t’as été Révélé, en ce qui a été Révélé avant toi, et qui croient  foncièrement en la vie Future. Ceux-là sont sous une Direction infaillible de leur Seigneur, et ceux-là sont ceux qui cultivent.} al baqarah 2

{Le Messager eut foi en ce qui lui a été Révélé par son Seigneur, ainsi que les croyants. Chacun devint croyant en Allah, en ses Anges, en ses Livres et en ses Messagers : Nous ne faisons de distinction entre aucun de ses Messagers. Et ils dirent : « Nous avons écouté et nous avons obéi. Ton Absolution, Notre Seigneur, c’est vers Toi le Devenir ».} al Baqarah 284

{Les prédécesseurs, les tout premiers parmi les Mouhajirines et les Ançars, et ceux qui les ont suivi au mieux, Allah est satisfait d’eux et ils sont satisfaits de Lui. Il leur a préparé des Paradis sous lesquels coulent les fleuves. Ils s’y éterniseront à jamais. Cela est le triomphe grandiose.} At Tawbah 100

On introduit ainsi le sens de la continuité visée par le Qur’ân. On introduit la quête, l’aboutissement et la sanction de cette quête dans un devenir de lutte pour la foi, pour la vérité, pour le témoignage sans discontinuité, sans relâche, sans autre alternative que continuer à croire en Dieu, Son Messager Mohamed et Son Livre. La phonétique arabe prend tout son sens dans ce Âmanou, le « ou » prolongé final signifiant la continuité dans le temps et non un simple  constat dépassé. Nous sommes mis en face à nos responsabilités de croyant : durabilité ou réversibilité.  Pour Dieu, Allah al Hay le Vivant, la règle est de faire vivre la foi dans le cœur, dans l’esprit, dans la langue et dans l’être social pour revivre dans l’éternité dans la gloire et le bonheur :

{Dieu ne saurait laisser les croyants dans l’état difficile où vous vous trouvez que le temps de distinguer le bon du mauvais, de même qu’Il ne saurait vous dévoiler l’Occulte. Mais Il choisit, à cet effet, parmi Ses messagers qui Il veut. Ayez donc foi en Dieu et en Ses prophètes, car si vous croyez en Dieu et si vous Le craignez, une généreuse récompense vous sera attribuée.} Al-i’Imran – 179.

La durabilité de la foi dans l’appel Qur’ânique – que les spécialistes tronquent et déforment- vise aussi à mettre en exergue l’aspiration naturelle de l’âme qui entend comme souvenir, comme rappel le divin qu’elle porte en elle comme Souffle de vie et qui pousse l’être humain à se libérer de son animalité et des contingences du temps et du lieu pour s’inscrire dans une aspiration psycho spirituelle : être en devenir de perfection, en quête de la récompense divine, en quête du salut, en quête du meilleur rang  le plus élevé au Paradis :

{Hâtez-vous de mériter l’absolution de votre Seigneur et un Paradis aussi vaste que les Cieux et la Terre, destiné à ceux qui craignent Dieu} Al-i’Imran – 133.

{Voilà ceux qui, en récompense de leur endurance, occuperont les lieux les plus élevés du Paradis, et y seront accueillis par des vœux de salut et de paix.} Al-Furqan – .75.

Ce devenir promu est occulté par l’amalgame des détracteurs de l’islam mais aussi par les partisans de la lettre qui ont tout fait pour donner au culte et au Fiqh (jurisprudence islamique) plus d’importance que la lutte du musulman pour le savoir, la liberté, la dignité humaine et la foi sincère. En mettant l’accent sur la morale et la loi ils ont oublié l’essentiel de l’islam : la conscience des  responsabilités qui découlent de la foi et l’amour de Dieu qui donnent à la morale une justification, une conduite, un pathos. Dans la décadence des uns et l’expansionnisme raciste des autres  le colonisable rencontre le colonisateur dans la même supercherie et les mêmes dérives qui dénaturent le sens et briment les vocations. Le terme Fiqh – qui signifie compréhension du verbe faqiha comprendre et tafaqaha faire effort de comprendre – est galvaudé dans les traductions qui en font jurisprudence islamique et dans la routine mimétique  du musulman qui en fait une doctrine ou des écoles doctrinaire focalisés sur le rite. Et pourtant le Qur’ân qui le référent vise autre chose de plus complexe et de plus vital pour la communauté : comprendre pour être guidé vers ce qui est sensé,  pour témoigner de la vérité et s’acquitter de sa mission de libérateur, d’édificateur, de civilisateur :

C’est l’invocation de Moise qui résume la trame :

{Il dit : « Mon Seigneur, Épanouis mon cœur, facilite ma mission, et délie une défectuosité de ma langue, afin qu’ils comprennent ce que je dis, et Donne-moi un assistant de ma famille, Aaron mon frère, pour me donner courage, et Fais-le participer à ma Mission, afin que nous T’exaltions beaucoup, et que nous T’invoquions beaucoup} TAHA 24 à 34

C’est le sens du hadith :

« Le meilleur d’entre vous dans la Jahiliya (le paganisme ante islamique) est le meilleur d’entre vous dans l’Islam s’il fait l’effort de comprendre sa religion »

L’évidence simple et concise. C’est la même évidence pour la Shari’a qu’on a déformée en ahkam (lois islamiques, code pénal) alors que les lois ne représentent qu’une infime partie du Qur’ân qui est lui-même dans son intégralité Shari’a dans sa signification arabe de « Minhaj » la Méthode, la Voie ou la Direction à suivre dans son intégralité :

{Ensuite, Nous t’Avons Mis sur une voie claire en ce qui concerne la constitution de la Religion. Suis-la donc et ne suis pas les passions de ceux qui ne savent pas.} Al Jatiya  18

{Et Nous te Révélâmes le Livre en vérité, corroborant ce qui le précéda du Livre, et le contrôlant. Juge donc entre eux d’après ce qu’Allah A Révélé. Ne suis pas leurs passions au lieu de ce que tu as reçu de la Vérité. A chacun d’entre vous Nous Fîmes une Loi et une Méthode. Si Allah le Voulait, Il vous Aurait Fait une seule communauté, mais c’est pour vous éprouver en ce qu’Il vous A Donné. Concourez donc en œuvres de bienfaisance.} Al-Maidah  48

Comme le dit hegel « On entend l’arbre qui tombe mais on ne voit pas la forêt qui pousse », on agrandit les peines et on crie contre la Shari’a sans voir la Miséricorde, la sagesse et la vérité qui enveloppe tout le texte Qur’ânique comme une symphonie d’espérance qui prend son essor et sa voix à chaque page lue et comprise chantant les Louanges du Seigneur des mondes et appelant les hommes à témoigner de leur humanité, de leur islamité qui leur donne dignité dans ce monde et salut dans l’autre.

Mêmes les intellectuels musulmans, les plus brillants, se laissent détourner de leur vocation de témoigner pour se laisser entraîner dans un débat secondaire sur les lois de l’Islam oubliant que ces lois n’ont pour l’instant ni territoire ni tribune et que la priorité n’est pas de prononcer des moratoires contre la lapidation, la polygamie  ou le voile mais de conduire la renaissance musulmane et  la défendre contre les prédateurs. La priorité est de faire reprendre conscience aux musulmans leur devoir de Vicaire de Dieu et de Soumis à Dieu : mission et soumission sont indissociables pour former la conscience. La morale est le contenant. Le monothéisme est le contenu. La priorité est au contenu de la vocation du musulman. L’islam est vivant dans le cœur des musulmans, la tâche est de le faire sortir des cœurs pour le placer dans la cité des hommes pour témoigner de son efficacité et de son universalité à soulager l’humanité souffrante et en panne de projet de vie.

Après les premières fascinations devant le  Hadj et devant l’ampleur du phénomène des jeunes qui effectuent le pèlerinage pour compléter leur religion et non comme des vieux retraités qui vont laver leurs os,   l’Occident a compris ce que nous n’avons toujours pas compris : la force de fédération internationale des musulmans lors de ce congrès annuel des musulmans qui se regroupent transcendant sans les nier ou les indifférencier toutes les différences ethniques, géographiques, linguistiques, sociales, sexuelles, générationnelles pour proclamer la grandeur d’Allah, pour témoigner de l’Unicité de la Oumma islamique, pour accomplir un pilier de l’islam qui est le dernier pilier de l’islam qui couronne l’appartenance à l’islam et non une corvée ou un accessoire de l’islam. L’Occident avait compris ce phénomène lors de la colonisation et il avait mis ses espions, ses orientalistes, ses experts de la guerre psychologique pour encadrer, profaner et détourner les saintes pérégrinations des indigènes qui pourraient devenir porteur d’un projet fédérateur de résistance comme l’ont été ceux qui les ont précédé dans les mouvements insurrectionnels et qui tous portaient le titre de Hadj comme symbole de purification de toute souillure y compris celle de la colonisation. La situation, aujourd’hui,  est plus névralgique car il ne s’agit pas de vieux os mais de jeunes cerveaux qui vont accomplir le pèlerinage comme pilier porteur de l’islam.

Il faut lire la seule Sourah qui porte le nom d’un pilier porteur de l’islam en l’occurrence Al Hadj pour comprendre la portée de ce pilier  dans le Djihad an nafs et le Djihad contre l’ennemi : Satan dans ses version de Djinn et d’Ins. Nous les musulmans nous ne voyons que la partie visible en l’occurrence le rite. L’esprit occidental cartésien, rationnel et efficace voit la portée du pèlerinage, son influence, sa dynamique sociale et politique. Il a ses officines qui lui traduisent les commentaires de la Sourah al Hadj où il est question de monothéisme et de Jihad, de résurrection et du devoir de témoignage :

{Soyez exclusivement acquis à la religion d’Allah ne Lui associez rien; car quiconque associe à Allah, c’est comme s’il tombait du haut du ciel et que les oiseaux le happaient, ou que le vent le précipitait dans un abîme très profond.  Voilà ce qui est prescrit. Et quiconque exalte les injonctions sacrées d’Allah, s’inspire en effet de la piété des cœurs.} al hadj 31

{Autorisation est donnée à ceux qui sont attaqués de se défendre – parce que vraiment ils sont lésés; et Allah est certes Capable de les secourir –  ceux qui ont été expulsés de leurs demeures, – contre toute justice, simplement parce qu’ils disaient: ‹Allah est notre Seigneur›. – Si Allah ne repoussait pas les gens les uns par les autres, les ermitages seraient démolis, ainsi que les églises, les synagogues et les mosquées où le nom d’Allah est beaucoup invoqué. Allah soutient, certes, ceux qui soutiennent (Sa Religion). Allah est assurément Fort et Puissant,  ceux qui, si Nous leur donnons la puissance sur terre, accomplissent la Salat, acquittent la Zakat, ordonnent le convenable et interdisent le blâmable. Cependant, l’issue finale de toute chose appartient à Allah. } al hadj 39

{Ceux à qui le savoir a été donné sachent que (le Qur’ân) est en effet, la Vérité venant de ton Seigneur, qu’ils y croient alors, et que leurs cœurs s’y soumettent en toute humilité. Allah guide certes vers le droit chemin ceux qui croient.} al hadj 54

{Ô vous qui croyez! Inclinez-vous, prosternez-vous, adorez votre Seigneur, et faites le bien. Pour cultiver!   Et luttez pour Allah avec tout l’effort qu’Il mérite. C’est Lui qui vous a élus; et Il ne vous a imposé aucune gêne dans la religion, celle de votre père Abraham, lequel vous a déjà nommés ‹Musulmans› avant (ce Livre) et dans ce (Livre), afin que le Messager soit témoin contre vous, et que vous soyez vous-mêmes témoins contre les gens. Accomplissez donc la Salat, acquittez la Zakat et attachez-vous fortement à Allah. C’est Lui votre Maître. Et quel Excellent Maître! Et quel Excellent soutien! } al hadj 77

Décryptant nos signes, nos symboles, nos textes et nos références ils anticipent pour nous livrer à toutes les sauces de leur propre signification pour créer écran entre nous et le principe de sens. La colère qui nous anime ici n’est pas contre le procédé qui est légitime pour eux puisque nous sommes perçus comme un danger potentiel, des infidèles, des insoumis mais contre le liant de la sauce qui la rend attrayante et digeste : notre propre chair (jaldatina). Elle est plus liant mais aussi  ingrédient et servitude aux ordres de son maitre par inconscience, par incompétence ou par concupiscence.

Que ceux qui opèrent des transferts « républicanisés » ou latinisés  pour dénigrer un pilier de l’islam, semer la confusion ou spéculer sur ce qu’ils ignorent pour fabriquer des produits intellectuels musulmans politiquement corrects comme pour nous même qui tentons de comprendre et de réagir il y a urgence à méditer cette sentence qui donne le frisson et l’envie de ne plus dire du  mal gratuitement ou d’instrumentaliser l’islam à des fins personnelles ou partisanes : « Quelle terre me portera et quel ciel me protègera si je ne  fais qu’exprimer mon opinion personnelle dans interprétation du Qur’ân ? »

 Quelle interprétation donner au verset sous entendu par les détracteurs des rites musulmans et en particulier du Hadj assimilé à une économie de la dévotion ou à un tourisme cultuel du pèlerinage

Quand Allah dit :

{Certes, Allah a acheté des croyants, leurs personnes et leurs biens en échange du Paradis.)

L’énonciation qui parle d’achat, de vente et d’échange est de l’ordre de l’allégorique pour rendre l’énoncé accessible et attirant a l’âme et a la conscience. Même si la suite des versets donne l’impression qu’il y ait une transaction d’égal a égal il ne peut y avoir entre Dieu et l’homme dans leur essence, leurs attributs, leur offre et leur demande ni égalité ni inégalité ni différences mais incomparabilité totale. L’allégorie est la pour rendre l’incomparable (donc l’inaccessible, l’invisible,  et l’indicible) facilement imaginable et compréhensible :

{Certes, Allah a acheté des croyants, leurs personnes et leurs biens en échange du Paradis. Ils combattent dans le sentier Allah: ils tuent, et ils se font tuer. C’est une promesse authentique qu’ill a prise sur Lui-même dans la Thora, l’Evangile et le Qur’ân. Et qui est plus fidele qu’Allah a son engagement? Réjouissez-vous donc de l’echange (vente) que vous avez fait: Et c’est la le très grand succès. Ils sont ceux qui se repentent, qui adorent, qui louent, qui parcourent la terre (ou qui jeûnent), qui s’inclinent, qui se prosternent, qui commandent le convenable et interdisent le blâmable et qui observent les lois Allah. Et fais bonne annonce aux croyants. } at thawba 111

C’est sous la même perspective qu’il faut lire les versets suivants :

{Parmi Ses dévoués, seuls les savants craignent Allah. Allah est, certes, Puissant et Pardonneur. Ceux qui récitent le Livre Allah, accomplissent la Salat, et dépensent, en secret et en public de ce que Nous leur avons attribué, espèrent ainsi faire un commerce qui ne périra jamais. Afin qu’Allah les récompense pleinement et leur ajoute Sa grâce.} Fatir 28

{O vous qui avez cru! Vous indiquerai-je un commerce qui vous sauvera d’un châtiment douloureux? Vous croyez en Allah et en Son messager et vous combattez avec vos biens et vos personnes dans le chemin Allah, et cela vous est bien meilleur, si vous saviez! Il vous pardonnera vos péchés et vous fera entrer dans des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, et dans des demeures agréables dans les jardins d’Eden? Voila l’énorme succès et il vous accordera d’autres choses encore que vous aimez bien: un secours venant Allah et une victoire prochaine. Et annonce la bonne nouvelle aux croyants.} As-Saff 10

Il y a incomparabilité entre les cocontractants en leurs qualités respectives d’être divin et d’être humain. Même si nous prenons au sens littéral l’échange celui-ci demeure inégale et cette inégalité est tellement grande qu’elle devient incomparable, non mesurable. Quelle est la valeur de la vraie vie éternelle dans le bonheur ? Inestimable ! Quelle est la valeur de notre dévotion, de nos sacrifices, de nos souffrances éphémères face à l’étendue d’un Paradis eternel aussi vaste que les cieux et la terre avec des délices incomparables en beauté, en goût, en innovation  à ceux connus sur terre ? Quelle est la signification de la transaction quand Celui qui propose la transaction incomparable est le créateur de l’homme partenaire de la transaction, de ses œuvres objet de la transaction et du Paradis  récompense de la transaction ? La miséricorde divine ! Quel est notre part dans cette transaction ? Un infiniment petit de patience dans le malheur et de gratitude dans le bonheur sur cette terre qui ne vaut pas l’aile d’un moustique ou d’un moucheron comparativement à la valeur de la vraie vie. Mathématiquement parlant notre part est équivalent au rapport d’une valeur par rapport à l’infini c’est-à-dire zéro ce qui ne signifie pas rien ou le vide absolu mais le pas de valeur.

Dans la question de l’échange égal ou inégal avec Dieu nous ne devons jamais perdre de vue l’humilité et la crainte révérencieuse que nous devons avoir dès qu’il s’agit de Dieu. II est incomparable et son incomparabilité même dans les attributs divins qu’il a fait connaitre dépasse notre entendement car nous proclamons Allah Akbar : Dieu est le plus grand dans toutes nos conceptions, nos imaginations et nos rapports à Sa Beauté, a Sa Perfection, a Sa Puissance, a Sa Science, a Sa miséricorde. Allah est plus grand que tout ce que nous pouvons imaginer, il est au dessus de toute comparaison, il est comme le dit l’imam Ali créateur du lieu et du temps sans être soumis lui-même aux notions de temps et de lieux sur lesquels nous construisons notre jugement et notre système de comparaison et d’évaluation.

C’est sa Miséricorde qui nous fait entrer au Paradis, ce ne sont pas nos œuvres. Nos œuvres ne sont rien en égard aux bienfaits de la vision des formes et des couleurs du Paradis, de l’amour du bien aimé, de l’intelligence libérée de toute forme de bridage, des sens nouveaux pour apprécier l’odeur, la vision, le  gout des saveurs et de ce qui est impossible a recenser car il relève encore du Ghayb auquel nous croyons. Nos oeuvres les plus ferventes et les plus sincères, dans une vie aussi courte que la notre et dans laquelle nous passons plus de 90% de notre temps a s’occuper de nos affaires mondaines, sont insignifiantes par rapport aux délices du Paradis eternel.

Le Paradis lui même n’est rien devant la rencontre de Dieu et la vie en  sa proximité sans voile : amour sur amour, beauté sur beauté dans une dialectique inédite dont parle Ibn Arabi : «  L’amour éperdu de beauté et la beauté inspirant un amour plus grand et elle-même sublimée par l’amour pour être plus embellie : et ceci à l’infini, sans se rassasier ». Parler d’échange égal ou  inégal c’est faire preuve de manquement d’égard a Celui qui nous a créés et ne pas comprendre la vocation et la mission pour laquelle nous avons été existenciés.

{Ils n’ont pas estimé Allah comme Il devrait l’être alors qu’au Jour de la Resurrection, Il fera de la terre entière une poignée, et les cieux seront pliés dans sa main droite. Gloire a Lui! Il est au-dessus de ce qu’ils Lui associent.) Az-Zumar 67

Il est au dessus de tout : Il est incomparable ! Par conséquent, le libre arbitre de croire ou de ne pas croire, de dire ou de ne pas dire, de faire ou de ne pas faire a des limites. Ces limites découlent du rapport entre le Créateur et le créé, entre l’ordonnateur et l’ordonné, entre l’Adore et l’adorateur, entre le Sanctionneur et le sanctionné, entre le Bienfaiteur et le nécessiteux… Pour l’islam la parole est divine, sacrée, responsable, sensée et pertinente :

{O vous qui devîntes croyants, craignez Allah et dites de vraies paroles pertinentes, Il vous Amendera vos œuvres et vous Absoudra vos péchés. Et quiconque obéi à Allah et à Son Messager, il a gagné un vrai immense gain.} al ahzab 70

{O vous qui devîntes croyants : si vous faites triompher la Cause d’Allah, Il vous Fera triompher et Affermira vos pas.} Mohamed 7

Vouloir se situer a tout prix d’égalité entre le sacré et le profane, le temporel et le spirituel, le mondain et l’au delà, l’homme et Dieu est du non sens. Il n’y a pas d’égalité entre le Bienfaiteur généreux et les pauvres que nous sommes  mais incitation à  faire de bonnes œuvres pour s’inspirer des attributs divins :

{Et obéissez à Allah et au Messager afin qu’il vous soit fait miséricorde! Et concourez au pardon de votre Seigneur, et a un Jardin (paradis) large comme les cieux et la terre} ali imrane, 132

{Aucun être ne sait ce qu’on a réservé pour eux comme réjouissance pour les yeux, en récompense de ce qu’ils œuvraient!} As-Sajda 17

 

L’Arabe est le référent linguistique pour interpréter le Coran

Pour étudier le Coran ou le Hadith les grands savants musulmans – qui ont laissé l’empreinte de leur savoir jusqu’à nos jours – même s’ils n’étaient pas d’origine arabe apprenaient l’Arabe et en maitrisait la syntaxe, la grammaire, le style et le lexique. Ce fut le cas du plus grand grammairien arabe Sibaweyh d’origine persane et Buhkhari l’un des plus grands spécialistes des hadiths d’origine du Khorasan en extrême orient de l’Iran. Nos vénérables savants confirmant la règle mohammadienne : « est Arabe celui qui parle l’Arabe ».

En effet le sens se corrompt quand le référent linguistique fait défaut. En voulant rendre justice aux efforts faits et en cherchant où se trouve la faille du dérapage nous avons trouvé, entre autres, le problème de la traduction des versets Qur’âniques et en particulier celui du terme  « laâalakoum » par «peut-être » qui fait dire a certains que la relation entre d’homme et Dieu est inégalitaire pour ne pas dire arbitraire voire inique. Nous pouvons croire sans exercice de culte, sans épreuves, sans destin sans obligations oubliant que Dieu peut se passer de nous et Il n’a pas besoin ni de nos rites ni de notre dévotion. Le rite et la dévotion sont un lien (religare) pour garder le contact avec Dieu et pour nourrir l’âme de nourritures spirituelles. Sans nourritures l’âme s’épuise et seule l’animalité du corps répond aux impulsions de la moelle épinière et aux tempêtes de l’esprit. C’est dans cet esprit que Jésus a dit dans le sermon sur le Montagne « Bienheureux sont les faibles d’esprit ». L’esprit, spiritus, ici est la tempête dans le crane, le vent de folie de la pensée et cette idolâtrie de l’idée et du moi pensant qui croit savoir mieux que Dieu ce qui convient ou ne convient pas à l’homme, qui « pense comprendre » les Desseins de Dieu sans lire le Qur’ân. Ce paganisme intellectuel est proscrit par l’Islam monothéiste.

Aucun Prophète n’a invité à faire le culte des sots et des niais mais à cultiver la sagesse cet esprit qui sait  apprendre à donner à chaque chose sa juste place, à chaque être son juste rang et à chaque événement sa juste priorité. L’esprit de justesse s’apparente à l’esprit de sens sans se confondre avec lui. A Dieu lui revient le rang et la place qu’Il s’est donné Lui et non ce que nous imaginons en confondant la mythologie grecque, les influences des Saintes Ecritures falisifiées  et le Qur’ân. Même sa Sainteté le Pape, intellectuel de premier plan, s’est laissé piégé dans une lecture qui présente les musulmans comme des croyants irrationnels, sans raison,  devant ce qu’il ne nomme pas mais qu’il sous entend en l’’occurrence « l’arbitraire » de l’Absolu du Dieu des musulmans.

Un dialogue débile, que sépare une décade mouvementée entre son déroulement, en 1390, et sa rédaction aux toutes dernières années du XIVe siècle, comme dit Théodore Khawam à l’introduction du livre. Bien plus, « Manuel affirme en effet qu’il va citer les paroles des uns et des autres aussi fidèlement que sa mémoire le lui permettra » (p. 27). Aveu qui supprime toute crédibilité à ce texte. Rédiger un dialogue aussi long, de mémoire, sur un sujet aussi crucial, et opposé, avec « des interprètes qui n’entendaient pas le grec, qui n’étaient pas de bons théologiens ou des personnes compétentes en matières religieuses » (p. 118), et Manuel Paléologue ignorant leur langue, refusant de reconnaître l’authenticité de la Mission de Mohammad, et l’interlocuteur parlant arabe, on ne peut qu’affirmer : c’est un texte de prosélytisme pour sauver la chrétienté de Byzance.

C’est bien dommage que sa Sainteté, malgré une érudition académique applaudie, ait recourt à un texte qui relève plutôt de la contrefaçon, pour mener sa guerre contre l’Islam. La probité intellectuelle et le devoir religieux dans leur volonté d’apporter la détraction à l’islam auraient été bien inspirés par la raison dont se réclame le professeur émérite de démontrer la fausseté du message Qur’ânique avec des arguments historiques et religieux lorsque ce message fait le procès des Rabbins et docteurs chrétiens de la foi au lieu de recourir à l’amalgame facile. L’intelligence, la rationalité, l’historicité qui permettent de faire intrusion dans le champ sémantique islamique pour le dénigrer auraient du inspirer les négateurs à chercher comme le dit Jésus lui-même la poutre qui est dans leur œil au lieu de chercher la paille qui est dans l’œil du voisin. Ce voisin vous dit sans détours répondez à ces accusations que les musulmans « colportent » et apportez vos justifications :

{Et tu verras beaucoup d’entre eux se précipiter vers le péché et l’iniquité, et manger des gains illicites. Comme est donc mauvais ce qu’ils œuvrent! Pourquoi les rabbins et les docteurs (de la Loi religieuse) ne les empêchent-ils pas de tenir des propos mensongers et de manger des gains illicites? Que leurs actions sont donc mauvaises!} Al-Maidah – 62.

{Ils ont élevé au rang de divinités en dehors de Dieu leurs rabbins et leurs moines, ainsi que le Messie, fils de Marie, alors qu’ils avaient reçu ordre de n’adorer que Dieu l’Unique} At-Tauba – 9.31

Pouvons nous croire un instant, sans blasphémer, que Dieu Omniscient, Omnipotent, Justice et Vérité  puisse s’exprimer comme un philosophe sceptique, un cynique ou un  désabusé créant le doute et la confusion dans l’’esprit du croyant ? C’est ce doute entretenu par des traductions fausses qui dénaturent le sens de certains versets et entrainent certains a parler d’échange inéquitable, sous entendant arbitraire. Par exemple le verset 9 de la Sourah al Al-Jumuâa est traduit dans certaines versions françaises du Qur’ân ainsi :

{O vous qui avez cru! Quand on appelle a la Salat du jour du Vendredi, accourez à l’invocation Allah et laissez tout négoce. Cela est Bien meilleur pour vous, si vous saviez ! Puis quand la Salat est achevée, dispersez-vous sur la terre, et recherchez quelque faveur de la grâce d’Allah, et invoquez beaucoup Allah peut-étre réussirez vous (laaalakoum thouflihoune)} 62, 9

Avant d’apporter de la lumière sur la subtilité de ce verset et de tant d’autres il nous faut une fois de plus confirmer la règle fondamentale : l’incomparabilité de Dieu et non l’égalité ou l’inégalité dans le rapport Dieu homme englobe son être, ses attributs, sa création, son verbe et sa parole

{Il n’y a rien qui Lui ressemble} As Choura 11

C’est toujours avec l’esprit de ce verset qu’il faut lire le Qur’ân et appréhender ses allégories, ses paraboles et ses signes. Il faut donc lire le Qur’ân convenablement et ne pas se contenter de n’importe quelle traduction quitte a se faire assister par un musulman arabophone qui connait l’exégèse Qur’ânique ou qui sait consulter les ouvrages des exégètes musulmans pour donner aux versets le sens le plus proche dans la langue française. La langue arabe est une des langues les plus vielles de l’humanité et c’est le Qur’ân qui lui a donné sa syntaxe moderne. L’Arabe utilise la syntaxe générale avec très peu d’exceptions et de dérogations comme la langue française mais Dieu n’est pas contraint à cette restriction car Il est  créateur de la lettre, de son signe, de son signifiant, de sa sémantique, de son lexique et de sa syntaxe. Ce n’est pas de l’arbitraire mais le prodige de la Révélation Qur’ânique d’être aussi riche, accessible au commun des mortels et un défi pour l’expert scientifique et le grammairien.  En révélant le Qur’ân dans une dualité exceptionnelle contenu riche transcendant le temps et l’espace et  forme figée immuable il pose un défi linguistique, grammatical, symbolique, allégorique, sémantique à toutes les générations pratiquant l’arabe avec l’excellence du lettré savant :

{C’est Lui qui t’a révélé le Livre contenant des versets à la fois clairs et précis, qui en constituent la base même, ainsi que d’autres versets susceptibles d’être différemment interprétés. Et c’est à ces derniers versets que les sceptiques, avides de discorde, prêtent des interprétations tendancieuses, alors que nul autre que Dieu n’en connaît la signification exacte. Quant aux vrais initiés, ils se contentent de dire : «Nous croyons en ce Livre, car tout ce qu’il renferme vient de notre Seigneur.» Ainsi, seuls sont enclins à méditer ceux qui sont doués d’intelligence.} Al-imran 7.

{Et si vous êtes dans le doute au sujet de ce que Nous avons révélé à Notre Serviteur, essayez donc de composer une seule Sourah semblable à une Sourah du Qur’ân, et faites venir les témoins que vous vous êtes donnés en dehors de Dieu, si vous êtes véridiques.} Al-Baqara 23.

{S’ils disent : «C’est cet homme qui l’a inventé», réponds-leur : «Composez donc une seule Sourah semblable à celles de ce Livre, et faites-vous aider, pour ce faire, de qui vous voudrez, en dehors de Dieu, si vous détenez réellement la Vérité !»} Yunus 38.

Dieu, gloire et pureté à Lui est Vérité et sa parole est la vérité que ni le mensonge ni la falsification ne peuvent corrompre Il ne peut donc sur le plan logique prononcer une parole qui sème le doute dans le cœur du croyant ou porter à confusion par le potentiel d’incertitude qu’elle contient. Le « laâalakoum thouflihoune » ne peut sur le plan logique et stylistique être traduit pas peut être réussirez-vous. Le lire et l’accepter ainsi c’est faire de tous les versets qui parlent de crainte révérencieuse c’est-à-dire de la quintessence du Qur’ân en l’occurrence la Thaqwa de putatif, incertain, inaccessible et arbitraire par l’incertitude soulevée car tous les versets relatifs à la Thaqwa s’énonce par le «laâalakoum thathaqoune. La thaqwa est le signe de la progression de la foi vers davantage de certitude et de sérénité.

Pour les grammairiens arabes  le « laâalakoum touflihoun » ou le « laâalakoum thathaqoun » doivent être traduit par « Afin que vous obtenez la réussite » et « afin que vous obtenez la piété ».

Tout l’arbitraire supposé dans ces versets et dans les autres disparait et la théorie de l’échange égal ou inégal disparaît. Nous serions face à un troc direct : donnant donnant. En vérité il n’y a pas de donnant donnant mais d’option. La langue française si riche avec son conditionnel et son subjonctif exprimant des futurs hypothétiques n’a pas la compétence à exprimer l’optionnel comme le fait le Coran. C’est avec un regard sur l’option et l’alternative que le Coran propose aux croyants et aux futurs croyants qu’il faut lire le verset coranique qui semble un conditionnel ou une proposition avec un adverbe introduisant en apparence le doute :

{Et invoquez beaucoup Allah ainsi vous réussirez (laáalakoum thouflihoune)} 62, 9

Dieu ne peut donc être un énonciateur « putatif » entretenant le doute dans le cœur et l’esprit d’un énonciataire confus qui serait conduit à être mené à craindre  un Dieu inique, arbitraire et imprévisible au lieu d’aimer un Dieu  Miséricordieux (Rahim) et Aimant (Wadoud).

La langue Qur’ânique est la langue arabe dans sa forme la plus raffinée et la plus subtile et la plus évocatrice de sens en s’adressant à l’homme sous toutes ses facettes ontologiques, cognitives, affectives, spirituelles, sociales, temporelles et spatiales. Elle n’est pas la langue du désert de l’Arabie et du bédouin arabe mais la langue du renoncement de l’homme aux idoles et fantasmes qui peuplent ses mondanités, ses illusions et ses rapport tant avec Dieu qu’avec l’humanité

Faudrait-il pour autant accepter le sens obligatoire de certitude pour l’homme qui reçoit l’énoncé divin. La richesse, la subtilité du Qur’ân est de parvenir dans un énoncé bref à toucher la fibre de l’énonciataire pour cela il faut comme pour tout style narratif travailler sur l’énoncé et l’énonciation c’est-à-dire toutes les conditions de la communication de l’énoncé. L’homme recevant l’énoncé Qur’ânique peut être réceptif, rebelle, méritant ou déméritant et dans cette situation d’incertitude de la condition de l’énonciataire qui n’échappe pas à Dieu bien avant que le lecteur du Qur’ân ne soit existencié. Dieu sait avec certitude et sa Parole est certitude mais l’homme qui reçoit le message ne peut recevoir, par l’exigence de l’épreuve à accomplir au préalable,  le résultat avant l’accomplissement de l’épreuve. Traduire  donc le verset par :

{Et invoquez beaucoup Allah ainsi vous réussirez (laáalakoum thouflihoune)} 62, 9

Est sémantiquement faux car la décision finale appartient à Dieu. Il nous appartient dans tout ce que nous entreprenons, sans aucun intermédiaire, d’être sincère dans nos intentions mais si nous pouvons nous prononcer sur la  validité formelle de nos intentions et de nos actions nous ne pouvons nous prononcer sur leur validité et leur agrément par Dieu. Que faire pour avoir une bonne traduction qui reflète le sens subtil. Cherchons dans le Qur’ân quelques pistes remarquables par leur évidence. Il n’ y a pas de meilleure évidence que la proximité des Prophètes :

{Et pendant qu’Abraham et Ismaël élevaient les assises de la Ka`ba, ils disaient : «Seigneur ! Daigne accepter de nous cet ouvrage ! Tu es l’Audient, Tu es l’Omniscient !} Al-Baqara 127.

{La femme d’Imran dit un jour : «Seigneur ! Je Te voue en toute exclusivité l’enfant que je porte en mon sein (Marie) ! Daigne, Seigneur, l’accepter! Tu es, en vérité, Celui qui entend tout, qui sait tout.»} Al-i’Imran 35.

L’exemple le plus édifiant est celui de Salomon, roi prophète et doué de savoir et de pouvoir, qui se trouve dans l’incapacité à exprimer sa reconnaissance à Allah pour les faveurs dont Il l’a comblé et qui sollicite Allah de lui inspirer l’évocation qui sied à la grandeur d’Allah et à Sa qualité de donnateur sans laquelle nous ne serions ni capable de nous exprimer ni d’agir ni d’être reconnaissant et de prétendre à accéder au Paradis :

 وَقَالَ رَبِّ أَوْزِعْنِيۤ أَنْ أَشْكُرَ نِعْمَتَكَ ٱلَّتِيۤ أَنْعَمْتَ عَلَيَّ وَعَلَىٰ وَالِدَيَّ وَأَنْ أَعْمَلَ صَالِحاً تَرْضَاهُ وَأَدْخِلْنِي بِرَحْمَتِكَ فِي عِبَادِكَ ٱلصَّالِحِينَ

{… il dit : « Mon Seigneur, Aide-moi à être reconnaissant de la Grâce dont tu m’As Gratifié, moi et mes père et mère, et à ce que je fasse œuvre méritoire que Tu Agrées, et Fais-moi entrer, par Ta Miséricorde, parmi Tes serviteurs vertueux ».} An Naml 17

Le Qouboul ou l’acceptation est une prérogative divine et non humaine c’est ce que le Prophète Choaib a proclamé comme  vérité qui relève du Thawhid dans sa compréhension la plus saine : tout doit revenir à Dieu :

{Je ne veux que la réforme dans la limite de mes capacités et ma réussite ne dépend que de Dieu}

C’est cet esprit monothéiste qui fait défaut dans beaucoup de traduction du Qur’ân et qui laisse un chercheur perplexe entre la certitude et l’incertitude, entre la justice et l’arbitraire, entre l’égalité et l’incomparabilité de ses déductions et de ses implications non seulement spirituelles mais aussi intellectuelles, politiques, sociales, culturelles et ontologiques.

Entre la certitude de la vérité divine comme énonciateur de la vérité et l’incertitude de l’accomplissement de l’épreuve par l’énonciataire il y a l’énonciation et dans le Qur’ân elle est la culture du musulman qui tangue entre le Raja (l’espérance dans la miséricorde de Dieu) et  Al Khawf min al Jalil (la crainte de Dieu), entre le Tharghib (la bonne nouvelle) et le tharhib   (l’avertissement).

Si les Prophètes par amour et respect de Dieu cherchent son consentement, son contentement et son acceptation de leur dévotion, de leurs œuvres, de leur vie et de leur mort que dire du simple mortel qui passe sa vie entre le péché et l’insouciance et quelque fois le repentir. Dieu répond au commun par ce verset magistral :

{Ne vous attribuez pas des titres de vertu}.

En clair nous ne pouvons ni préjuger de l’acceptation de nos œuvres ni de celles des autres comme nous ne pouvons jeter l’anathème sur autrui nous considérant supérieur ou ayant fait quelque chose d’exceptionnel qui nous met au dessus des autres et qui rend Dieu obligé envers nous : Il serait redevable envers notre  dévotion au lieu que ce soit nous qui lui sommes redevables de notre existence, de nos dons et de sa Miséricorde. Cette redevance rend une fois de plus l’échange entre Dieu et l’homme incomparable même s’il y a des Hadiths qui disent que Dieu a des devoirs envers l’homme et l’homme a des devoirs envers Dieu. Leur lecture est symbolique et non littérale.

Laâalakoum dans la parole de Dieu s’il n’est pas « un peut être » il n’est pas une « certitude » mais une invitation à l’espérance et à la crainte pour agir en ascension spirituelle car telle est d’une part la vocation de notre vie sur terre et d’autre part la Justice divine qui ne peut pratiquer l’indifférenciation en donnant accès au Paradis d’une manière égalitariste sans tenir compte des mérites :

{Ceux des croyants qui restent tranquillement chez eux, sans y être astreints par une incapacité  quelconque, ne peuvent être considérés comme égaux aux croyants qui, dans le combat qu’ils mènent au service de Dieu, s’exposent aux dangers corps et biens. Aussi Dieu tient-Il en plus grande estime ceux qui Lui sacrifient leurs biens et leurs personnes. Et bien que les promesses divines s’étendent aux uns et aux autres, un rang infiniment supérieur est réservé  aux combattants, ainsi qu’une récompense sans limite.} An-Nisaa 95.

{Ceux qui ont cru, qui ont émigré et qui ont combattu au service de Dieu, par leurs biens et leurs personnes, ceux-là occuperont auprès de Lui un très haut rang, et ce sont ceux-là  qui seront les victorieux.} At-Tauba 20.

{Ô  vous qui croyez ! Lorsqu’on vous dit : «Faites place aux autres dans les assemblées !», faites-le, Dieu vous mettra à l’aise au Paradis ! Et lorsqu’on vous dit : «Levez-vous !», faites-le, Dieu élèvera de plusieurs rangs ceux d’entre vous qui ont la foi et qui ont reçu la science. Dieu est parfaitement Informé de ce que vous faites.} Al-Mujadila 11

{A chacun le rang qui correspond à son œuvre (action)}

Dans ce dernier verset la graduation est vers le haut (le paradis) et vers le bas (l’Enfer) en vertu du principe de justice divine infaillible, équitable et impartiale.

Quand on a compris l’énonciation on comprend le sens du hadith prophétique :

« Quelle belle situation que celle du musulman, s’il lui arrive un bien et rends grâce à Dieu (Louanges) c’est un bienfait pour lui, et s’il lui arrive un malheur et endure avec patience c’est un bienfait pour lui »

Le malheur est pour l’ingrat, le rebelle, le transgresseur, le négateur des bienfaits et celui qui incrimine Dieu de ce que lui-même s’est occasionné à lui et à autrui comme torts et préjudices.

Dans le langage occidental il y a sans doute Nietzche qui a approché cette réalité : « Sortir du désespoir le plus profond l’espoir le plus indicible » par le surpassement de soi, par l’action sur son environnement sans se soumettre à la fatalité et au fait accompli.

Si dans la langue arabe classique le laâala signifie « peut-être », dans le Qur’ân il signifie éprouver en même temps ou en fonction de la situation l’espérance, la crainte ou les deux en même temps. Nous sommes en présence d’un état spirituel particulier : l’abandon avec confiance aux mains de Dieu tout en agissant pour mériter son amour, sa miséricorde et son repentir pour gagner son salut final.  Comment le traduire en langue française ?

Toute l’expérience du Pèlerinage se résume à cette équation : la validation de l’examen. Pour le savoir c’est simple il faut se voir agissant, réfléchissant et méditant dans les nouvelles épreuves car rien n’est acquis définitivement ni irréversible mais tout est en devenir.

Le miracle Qur’ânique en sa qualité de défi littéraire et grammaticale  pour les arabes maitrisant la langue arabe doit inciter les francophones à ne pas prendre pour argent comptant n’importe quelle traduction.  Surtout lorsqu’on apprend que « sous l’influence de Rome, et du Pape, Pierre le Vénérable, à la faveur d’un voyage en Espagne entre 1141 et 1143, conçut l’idée de faire traduire en latin, par Robert de Rétines, assisté de moines de l’ordre de Cîteaux, le livre révéré des Sarazins ; l’initiative procédait à la fois de l’esprit de croisade, comme le prouve la lettre que Pierre le Vénérable adressa à saint Bernard avec une copie de la traduction effectuée, et d’autre part du besoin d’effacer de l’esprit de convertis musulmans, tout vestige de leur fois première » (Régis Blachère, Le Qur’ân, p. 9).

Sur ce terme Sarrazin qui a été  collé à la peau des musulmans durant les Croisades comme une gale contagieuse il est intéressant de noter  qu’il est antérieur aux Croisades. Des recherches étymologiques occidentales semblent converger vers l’Evêque Isidore de Séville (570- 636) dans son traité  Étymologies qui aurait dit parlant des arabes ou des musulmans « Les Sarrasins ainsi nommés soit parce qu’ils se prétendent descendants de Sara, soit, au dire des païens, parce qu’ils sont d’origine syrienne. Ils habitent un très vaste désert. On les appelle Ismaélites parce qu’ils sont issus d’Ismaël. Ou encore Cedar du nom d’un fils d’Ismaël. Ou encore Agaréniens d’après Agar. On les appelle à tort Sarrasins parce qu’ils se vantent de descendre de Sara. »

C’est confus mais ça explique la confusion du terme Sarrazin : Sarracenus (pluriel: Sarraceni). Sarra pour Sarah et Cene pour peuple ou fils. Confusion étymologique et historique et par conséquent erreur de traduction puisque les Arabes descendants d’Ismaël sont fils de Hagar (Hajar) et non de Sarah et aucun Arabe ou Musulman lettré ou illettré n’a prétendu le contraire s’il connait un tant soit peu la biographie  du Prophète Mohamed (saws). C’est toujours cet esprit gréco romain et judéo chrétien de suffisance qui méprise les autres et viole leur identité pour les bannir sur des préjugés de race. Ce sont ces préjugés qui ont donné justification morale aux Croisades, au colonialisme. La référence de ses errements se trouve  dans  la Genèse Livre 21 qui a le mérite de ne pas confondre Sarah et Hajar :

« L’Éternel se souvint de ce qu’il avait dit à Sara, et l’Éternel accomplit pour Sara ce qu’il avait promis. Sara devint enceinte, et elle enfanta un fils à Abraham dans sa vieillesse, au temps fixé dont Dieu lui avait parlé. Abraham donna le nom d’Isaac au fils qui lui était né, que Sara lui avait enfanté [ …] Sara vit rire le fils qu’Agar, l’Égyptienne, avait enfanté à Abraham ; et elle dit à Abraham : Chasse cette servante et son fils, car le fils de cette servante n’héritera pas avec mon fils, avec Isaac. Cette parole déplut fort aux yeux d’Abraham, à cause de son fils. Mais Dieu dit à Abraham : Que cela ne déplaise pas à tes yeux, à cause de l’enfant et de ta servante. Accorde à Sara tout ce qu’elle te demandera ; car c’est d’Isaac que sortira une postérité qui te sera propre. »

Nous sommes dans une spirale de traduction de l’araméen au grec, du grec au latin et du latin au français en passant par une série de copies et de traductions les unes différentes des autres dans le style et le contenu. Le Coran dans son unique version en langue arabe non seulement  les met en défi d’apporter une preuve authentique mais dévoile leur racisme et leur sectarisme :

{Les Juifs et les Nazaréens ont dit : « Nous sommes les fils d’Allah et Ses bien-aimés » ! Dis : « Pourquoi alors vous Châtie-t-Il en raison de vos péchés ? » Bien au contraire, vous êtes des êtres humains de parmi ceux qu’Il A créés.} Al Maida 18

{Les Juifs ont dit : « ‘Uzayr est fils d’Allah », et les Nazaréens ont dit : « Le Messie est fils d’Allah ». Ce sont leurs paroles de leurs propres bouches. Ils imitent les dires de ceux qui devinrent mécréants auparavant. Qu’Allah les Combatte où qu’ils louvoient !  Ils ont pris leurs savants, leurs moines, et le Messie fils de Marie comme Seigneurs, à l’exception d’Allah, alors qu’il ne leur a été ordonné que d’adorer un Dieu Unique.} at Tawba 30

{O gens du Livre, pourquoi disputez-vous d’Abraham alors que la Torah et l’Évangile ne furent Révélés qu’après lui : Ne raisonnez-vous donc pas!} Al ‘Imrane  65

 

Le défi de la rationalité est renvoyé aux accusateurs :

{Et ils dirent : « Soyez juifs ou nazaréens, vous serez guidés ». Dis : « Bien au contraire : la confession d’Abraham, pur monothéiste, et qui ne fut point du nombre des polythéistes ». Dites : « Nous devînmes croyants en Allah, en ce qui nous a été Révélé, et en ce qui a été Révélé à Abraham, à  Ismaël, à Isaac, à Jacob, aux Tribus, et en ce qui a été Révélé à Moïse, à Jésus, et en ce qui a été Révélé aux Prophètes par leur Seigneur. Nous ne faisons de distinction entre aucun d’entre eux et nous nous remettons à Lui ».} al Baqarah 135

Le jour où ils assumeront leurs contradictions avec le monothéisme ils reconnaitront Mohamed (saws) comme l’Ultime Prophète et à ce moment là les préjugés sauteront les uns après les autres dans une fratrie universelle qui interdira la volonté de bannissement du musulman dans sa colonie ou dans banlieue. Aucun interprète ne viendra fausser la loi générale de l’harmonie à laquelle le Qur’ân convie :

{Dis : « O gens du Livre, venez-en à une parole normative entre nous et vous : de n’adorer qu’Allah, de ne rien Lui associer, et que nous ne nous prenions point les uns les autres pour Seigneurs à l’exclusion d’Allah ». Et s’ils s’en détournent, alors dites : « Témoignez que nous sommes musulmans ».} Al ‘Imrane  65

Omar Mazri et Zeineb Abdelaziz

Le Divin « piégé » ?! Partie 1/3

Le Divin « piégé » ?! Partie 3/3

Le Divin « piégé » ?! Partie 1/3

Depuis la colonisation jusqu’à aujourd’hui, ce qu’on appelle « l’islam français » tente incessamment de se manifester  en se cherchant une légitimité, une vocation, une stratégie, une audience.  Comme la République des Césars a récupéré puis instrumentalisé le message de Jésus la République tente de récupérer et d’instrumentaliser l’islam originel. L’œuvre n’est pas inédite, elle se manifestait déjà à la Renaissance en latinisant le nom des savants musulmans pour éradiquer la source arabe et islamique  quand il était impossible d’occulter purement et simplement leur existence faisant abstraction de mille ans d’apports scientifiques et civilisationnels de l’Orient musulman promouvant sa modernité à l’Occident judéo chrétien enfoncé dans son obscurantisme médiéval et à l’Occident gréco romain englouti dans ses mythologies . O tempora, o mores !

Nourris à l’école Mohammadienne nous avons foi en la parole divine :

{Vous attendez-vous donc à ce qu’ils vous croient, alors qu’un groupe d’entre eux : ils entendaient les paroles d’Allah puis les falsifiaient après les avoir raisonnées, en le sachant ?} al Baqra 79

Cette foi nous oblige, tout particulièrement  dans cette période du Pèlerinage à pointer du doigt quelques problèmes récurrents dont il faudrait un jour ou l’autre s’en débarrasser avant d’aller à l’essentiel de notre vocation.

  1. Emergence programmée des islams contre l’Islam
  2. La manipulation des concepts et le détournement des idées par le maniement de la langue : une voie de sape  parmi tant d’autres
  3. Nos responsabilités
  4. L’influence de la pensée cléricale et laïque dans les thèses sur l’Islam et dans la vision de l’homme dans le monde
  5. Les dérives du rationalisme qui font perdre à la raison toute rationalité, à la conscience toute vigilance et à l’érudit toute crédibilité
  6. Quelle interprétation donner au verset sous entendu par les détracteurs des rites musulmans et en particulier du Hadj assimilé à une économie de la dévotion ou à un tourisme cultuel
  7. L’Arabe est le référent linguistique pour interpréter le Qur’ân
  8. « Il faut savoir provoquer le scandale pour ne pas devenir sa proie ».
  9. Trouver excuse à la jeunesse et lui témoigner nos encouragements malgré les erreurs et les fautes
  10. La décolonisation de la langue et des mots est, après le constat culturel de l’indépendance inachevée, plus important que la décolonisation de la terre.
  11. Lever les équivoques fait partie de l’éthique et de l’esthétique de l’Islam.

 

Emergence programmée des islams contre l’Islam

Ainsi on assiste à l’émergence d’un islam  progressiste, d’un islam libéral voire un islam laïc comme si l’islam ne peut exister en France qu’avec les attributs historiques de la République française et non avec ses propres valeurs, ses propres attributs et ses propres références Qur’âniques et mohammadiennes : Din al Qayyim ou la religion de la rectitude,   Fitra d’Allah ou religion naturelle et conscience innée de Dieu qui met fin au débat sur la transcendance et l’immanence. Les musulmans n’ont ni à craindre ces débats stériles ni les calomnies qui les sous-tendent :

{Quelle injustice plus flagrante que celle que commet celui qui tisse des mensonges sur Dieu au moment même où il est convié à l’islam? Dieu ne guide point les êtres iniques qui veulent éteindre la lumière de Dieu par leurs calomnies, mais Dieu parachèvera Sa lumière, dussent les infidèles en souffrir ! C’est Lui qui a envoyé Son Prophète pour tracer la voie à suivre et prêcher la vraie religion qu’Il élèvera au-dessus de toute autre croyance, dussent les idolâtres en souffrir !} As-Saff 7

{Ne les craignez plus ! Mais craignez-Moi ! Aujourd’hui, J’ai amené votre religion à son point de perfection, Je vous ai accordé Ma grâce tout entière et J’ai agréé l’islam pour vous comme religion !} al maida 3

On assiste également à l’émergence d’un islam lyrico mystique qui  cherche un rapprochement avec  le «mysticisme » chrétien et  la mode bouddhiste de plus en vogue dans un monde occidental de plus en plus  face à la prophétie de Malraux : « Le nouveau millénaire sera spirituel ou ne sera pas ».  L’islam s’il n’est pas vu comme une spiritualité suffisante  par ignorance et préjugés est surtout perçu  comme un potentiel de Jihad qu’il faut anesthésier par crainte de perdre les Colonies. L’expérience des Croisades qui ont mis l’Occident judéo chrétien  monolâtrie païenne   en contact violent avec l’Orient musulman monothéiste reste une cicatrice béante qui ne peut se fermer que par la négation de l’islam et des musulmans.  Le musulman ne doit pas perdre de vue cette vérité :

{Tu ne seras agréé ni des juifs ni des chrétiens que lorsque tu auras suivi leur confession. Dis : «Il n’est d’autre voie de la vérité que Celle de Dieu !» Cependant, si par hasard tu accédais à leurs désirs, après la science que tu as reçue, tu te trouverais devant Dieu sans défense ni secours.} Al-Baqara – 120.

L’effort de « bouddhisation »  est bien réel, il est aussi réel que la « sionisation » de certains intellectuels et politiciens du monde arabe et musulman. Pour les musulmans sionisant il faut lire leurs écrits dans la presse et voir leurs interventions sur les médias ou mieux encore se rendre sur le site des Affaires Etrangères de l’occupant sioniste pour voir s’afficher le nom des bons arabes et des bons musulmans « amis » d’Israël. L’islam « bouddhiste » se contente de revendiquer une pure spiritualité sans obligation de rites, sans conformités aux normes religieuses, sans Jihad, sans politique, sans communauté de foi autre que la confrérie maraboutique… Une errance vers le Nirvana.

La France  a depuis longtemps joué un rang de premier plan dans la formation des élites musulmanes de langue française, une sorte de faculté franco musulmane où il est question d’islamologie, d’orientalisme à destination, aujourd’hui,  non plus des missionnaires, des évangélistes et des  idéologues colonisateurs, colonisables ou colonisés mais des  français allogènes d’extraction musulmane et des  indigènes en voyage d’études islamiques comme si le cœur de l’islam n’est plus la Mecque et sa périphérie culturelle et spirituelle :  le Caire, Damas, Bagdad et Téhéran mais Paris.

Il s’agit de favoriser la division et l’incohérence dans les rangs musulmans déjà fragilisés par une décadence ni assumée ni surmontée d’une part et d’une colonisation dont la libération n’est pas encore achevée d’autre part. Dans cet effort de « diviser pour régner » il est normal de voir l’apparition d’absurdité langagière telle que : islam français, musulmans non pratiquants, islam démocratique, islam égyptien, islam algérien, islam iranien. Il y a autant d’islam que d’enjeux géo stratégiques ou de manœuvres tactiques sur une carte du monde qui échappe à notre regard de musulmans confinés dans les débats stériles sur la barbe, le nikab et la longueur du pantalon.

Ceci est normal dans l’histoire des religions et des civilisations. Du vivant de Mohamed (saws) et  de ses successeurs qualifiés pour leur bonne gouvernance ( Khoulafa rachidiyoun) il fallait combattre les idoles, l’obscurantisme des lettrés arabes, la falsification des docteurs en lois juives et chrétiennes et l’apparition des faux prophètes. Il est donc normal que dans leur continuité nous dénoncions les dérives sectaires de certains musulmans  et la lutte idéologique menée par les officines sous couvert du culturel, du cultuel et de la science qui prennent comme fer de lance des musulmans suffisamment naïfs ou foncièrement véreux.

Ce qui n’est pas normal c’est  de voir des entités se réclamant de l’islam se faire ou l’écho de ce beau monde   ou le silence total sous prétexte de véhiculer le véritable message de l’islam et de combattre par exemple le wahhabisme en France sans se donner la peine de lire les écrits de l’imam Abdelawab et  de comprendre ses motivations et les défis de son temps : le néo  paganisme de l’Arabie déjà en proie aux appétits des empires colonialistes. Sous prétexte de lutter contre le Wahhâbisme on fait l’impasse sur la récupération politicienne des rois et princes saoudiens de sa vie et de son œuvre pour cacher leur vassalité à l’Amérique et on change de vocabulaire dans la lutte menée contre ce qu’on appelle les « fondamentalistes » musulmans. Bien entendu on accrédite la thèse d’un autre islam : l’islam saoudien.

Cultivant l’esprit tribal et despotique des actuelles élites arabes et musulmanes les spécialistes de la lutte idéologique nous rendent stériles en cultivant en nous la rivalité entre ces islams qui prennent racine tant en Occident qu’en Orient nous rendant non seulement vulnérables mais en contradiction avec la foi et la parole du Qur’ân :

{O vous qui devîntes croyants, inclinez-vous, prosternez-vous, adorez votre Seigneur et faites le bien, afin que vous cultiviez. Et luttez pour Allah comme il se doit de lutter pour Lui. Il vous A Élus et ne vous Imposa nulle gêne en religion, la confession de votre père Abraham. C’est Lui qui vous A déjà Nommés musulmans, auparavant, et dans ceci (le Qur’ān) : afin que le Messager soit témoin sur vous et que vous soyez témoins sur les hommes. Accomplissez donc la prière, acquittez-vous de la Zakāt, attachez-vous à Allah, Il Est votre Protecteur, le meilleur Protecteur et le meilleur Partisan.} al Hajj 77

Cette contradiction, qui nous fait fuir l’attribut de musulman vers d’autres attributs, n’est pas une invention du colonialisme mais une faille dans notre système de pensée qui croit qu’en changeant les mots nous allions changer  la tragédie de notre présent et inventer un avenir radieux pour nos enfants. Surfant sur nos failles et nos défaillances le spécialiste de la lutte idéologique ne fait que nous renvoyer le miroir qui renvoie nos reflets qu’il se charge d’embellir ou d’enlaidir selon les nécessités et les circonstances de la lutte. L’efficacité et la crédibilité ne leur permettent pas de travailler sur les leurres de leur imagination mais sur nos illusions et nos représentations. Pour l’instant les enjeux fondamentaux sont le terme « muslimine » qui est fédérateur dans le sens Qu’rânique et qui doit devenir, dans l’espace social, cultuel et politique, sujet de doute, de controverse et d’anathème  pour disloquer la communauté musulmane en petites tribus et sectes autarciques faciles à gérer et à mater. Le second enjeu est dans la compréhension et l’exécution de la vocation du musulman « afin que vous cultiviez » : il nous est interdit de nous cultiver au sens propre et figuré. Notre ego, notre sol, notre argent, nos idées et notre foi doivent être incultes, stériles, sans devenir, sans projet, sans fruits. L’inconscience des uns est conjuguée à l’inefficience des autres. Le tout donne une inconséquence, une incohérence et parfois une entropie qui dépasse l’entendement de ceux là même qui nous manipulent.

A titre d’illustration voici un pays, l’Algérie dénommé la Mecque des révolutionnaires, qui sombre dans l’involution à cause de l’incurie de ses gouvernants. Ces derniers ont pourtant trouvé la compétence de faire voler en mille éclats de  plus en plus insignifiants de grands partis les uns prônant la solution islamique les autres la voie démocratique. Que dire alors des conséquences de l’œuvre des spécialistes occidentaux de la subversion et de la diversion idéologique et culturelle. Comme Satan ils connaissent nos faiblesses et ils savent devant notre inculture cultiver les moyens et les instruments de  la tentation, de la séduction et de la suggestion pour nous mener là où nous sommes vulnérables :

 {Je n’avais sur vous nul pouvoir que de vous inciter, et vous m’avez obéi ! Ne me blâmez donc pas et blâmez-vous vous-mêmes.} Ibrahim 24

 

La manipulation des concepts et le détournement des idées par le maniement de la langue : une voie de sape  parmi tant d’autres

L’action du musulman est  analysée sous des vocables scientifiques et idéologiques  de théo mercatique, de théo politique, d’économie de la dévotion, de tourisme religieux évacuant du champ lexical et sémantique les concepts et les réalités spirituelles, sociales, morales et  civilisationnelles de la  Zakat, de la monnaie sans  Riba, du pèlerinage et de la Omra…

Nous n’allons pas intervenir sur la problématique de l’islam français proclamé ouvertement  par le Président Sarkozy   mais déja  initié par Jacques Berques et ensuite par Chevènement. Nous allons  juste prendre le temps de souligner quelques aspects  pour mettre en exergue  les dérives,  les mécanismes  de manipulation et surtout l’ignorance qui est la source de tous les maux.  L’ignorance des gens du peuple ne portent pas loin mais celle des élites et des lettrés est catastrophique.  Elle est catastrophique car elle intervient sur trois niveaux fertiles pour sa propagation :

–  Une jeunesse en quête de vérité et de savoir et qui faute de méthodologie et d’imams compétents se trouve  attirée par les oripeaux intellectualistes parlant de l’islam.

–  Une prétention à l’Ijtihad dans un monde où la circulation des idées, de l’argent et des hommes est exponentialisée alors que le monde musulman est encore en léthargie incapable de produire sa pensée autonome ni de poser un diagnostic sans complaisance sur ses pathologies sociales, politiques, culturelles, économiques et spirituelles.

–  L’absence de production intellectuelle conséquente du monde musulman en langue française pour répondre aux attentes et aux défis que rencontre le francophone. Les rares productions se font en arabe ou en anglais. Le monde musulman est devenu un comptoir commercial sans projet de devenir, sans défi autre que vendre du pétrole et importer les produits de la modernité occidentale. Produire ses idées, son armement, ses élites, son argent, ses vêtements, sa nourriture, son indépendance ne  sont ni une priorité ni un objet de débat ou de réflexion. Produire des idées et les traduire c’est unh luxe au-delà de nos moyens sauf s’il s’agit d’encenser ou de brûler aussi bien nos gouvernants que notre histoire vecue comme une mythologie. Ce qui n’est pas occupé par les musulmans est occupé par les autres car la nature a horreur du vide et de l’immobilisme comme l’énonce le Qur’ân : « Tels sont les jours nous les alternons entre les gens ». Il n’ ya pas d’alternance ni de perspective pour ceux qui s’excluent de la bataille et du projet de civilisation. Les maisons d’édition et les librairies, à vocation « musulmane »  préfèrent publier et vendre les livres anciens. Elles sont sures ainsi de gagner de l’argent sans droit d’auteur à régler et surtout sans risque à prendre comme cela se fait pour la promotion d’idées nouvelles. Le livre est une chose à vendre ou un objet d’ornement dans une bibliothèque et non un stock d’idées, une proposition de projet, une expérience de vie, une déchirure de l’âme avide de vérité et de justice…

L’ignorance des lettrés a des conséquences sur l’imaginaire et le système de représentation tant du musulman que du non musulman.  Elle enferme le musulman dans une ignorance plus grande et le non musulman dans des préjugés plus négatifs et des stéréotypes plus caricaturaux. Au lieu de remplir sa mission de témoignage, l’intellectuel traitant de l’islam devient un instrument de la guerre idéologique contre sa communauté, sa religion en acceptant de travailler sur des mots et non sur des principes. Le jeu de mots devient un jeu de maux accablant le présent et l’avenir par la compétence de nuisance subversive et de désinformation que la servilité, la colonisabilité et la colonialité transportent. L’imaginaire, ce champ d’exploration de l’imagination devient dans ce contexte improductif, négatif, nuisible à  tout projet d’évocation, de cognition, de sens….

Malek Bennabi, intellectuel probe et sincère, a dénoncé ce qu’il appelle les intellectomanes ces intellectunnels  qui vendent des idées mortes, mortelles et mortifères, celles qui produisent l’idolâtrie car « Chaque fois que l’idée disparait, l’idole règne de nouveau et réciproquement ». Contre les fabricants d’idoles il développe une analyse courte et percutante : «  Le Qur’ân a nommé Djahiliya, c’est-à-dire « ignorance » le paganisme qui a régné, en Arabie, avant l’islam. Cependant la Djahiliya, n’était pas pauvre, en technique littéraire, les plus grands noms des lettres arabes sont de cette époque. Elle demeure quand même la Djahiliya, l’ignorance par excellence, parce que le verbe arabe ne contenait que des mots étincelants mais vides de tout germe créateur. Réciproquement, si le paganisme est une ignorance, l’ignorance est païenne : elle ne cultive pas des idées, mais des idoles, comme la Djahiliya. Ce n’est pas pur hasard que les peuples primitifs ont été fétichistes ».

Traiter de l’islam ou analyser un aspect de la civilisation ou de la communauté musulmane c’est nécessairement embrasser l’éthique et l’esthétique de l’islam qui sont dans le Thawhid, le monothéisme pur et parfait,  sinon c’est de la spéculation, de la rhétorique (bien dire au lieu de dire le bien ou le vrai), de la casuistique (utiliser la rhétorique pour convaincre à des fins religieuses ou idéologiques, pour évangéliser les esprits et les colonies) ou du Khobsisme ( faire de son gagne pain ou  de sa réussite sociale un système de pensée, de valeurs et de comportements… une finalité en soi et non un moyen).

A Médine  tous les renouveaux de l’homme musulman, de son environnement, de sa civilisation, de sa victoire sur les défis du temps, du sol et des ennemis  ont commencé  avec  quelques rudiments de syntaxe et de sémantique et quelques versets Qur’âniques  pour une finalité : être le Vicaire de Dieu sur terre pour exercer le talent des dons innés et acquis, être honoré et vivre dans la dignité en sa qualité de créature  créée par Dieu dans une étreinte d’amour  (malaxé dans les Mains divines et prendre vie et sens en recevant  le Souffle divin) et  accomplir sa vocation d’être soumis librement à Dieu et investit de la mission de témoigner par la parole et   par l’acte de la présence du Créateur, du Bienfaiteur, du Donateur à qui nous devons rendre compte.

A Paris, Alger, Le Caire ou ailleurs la langue Arabe est devenu un instrument de diversion idéologique pour saper l’islam et rompre l’unité de liens qui rassemblent les musulmans au Qur’an et au système de valeurs, de croyance et de représentations de la foi monothéiste.

La langue est témoignage… Elle est l’inscription de sens par des signes  relevant du mystère :

{Alif, Lam Mim – C’est le Livre au sujet duquel il n’y a aucun doute, c’est un guide pour les pieux.} al Baqara 1

Même en changeant la ponctuation (absente dans le texte Qur’ânique) par la pause dans la respiration du texte le sens reste magistralement le même dans la langue Qur’ânique :

{Alif, Lam Mim – C’est le Livre qui est  guide, sans aucun,  doute pour les pieux.} al Baqara 1

Après la signification de la foi et de la religion comme croyance, relation avec Dieu et invocation dans la Fatiha (le prologue, l’ouverture, l’Inaugurale,  la clé du Qur’ân, la réussite ici et là bas) le Qur’ân dans sa première Sourah pose le problème fondamental de la foi et de la raison : le doute. Le doute cartésien ou le doute nihiliste peuvent trouver raison et justification sauf dans le Qur’ân et la langue qui véhicule son sens. Il n’y a aucun doute sur Dieu, Son Message, Ses Prophètes, Ses Anges, Sa Promesse et Sa sanction. Tout ce qui est dans le Livre écrit (al Kitab al mastour) et dans le Livre de la création visible (al Kitab al mandhour)  témoigne de la certitude des croyants contre l’incertitude des sceptiques et la  négation des mécréants. Il n’y a aucun doute y compris sur l’homme et son devenir selon qu’il soit croyant, négateur avéré ou hypocrite sournois. Il n’y a aucun doute sur la foi et l’expression de la foi dans la vie intérieure comme dans la  vie extérieure sociale, politique, intellectuelle et cultuelle : trois modèles d’être, trois types de lecture, trois voies à suivre :

  • La lumière du savoir :

{Ceux qui croient à ce qui t’a été descendu (révélé) et à ce qui a été descendu avant toi et qui croient fermement à la vie future.  Ceux-là sont sur le bon chemin de leur Seigneur, et ce sont eux qui réussissent (dans cette vie et dans la vie future).} al Baqara 3

  • Les ténèbres de l’ingratitude qui rendent inopérant les instruments perceptifs, intellectuels, affectifs et ontologiques pour acquérir la connaissance ou se mettre en quête de la vérité :

{Les Mécréants  ne croient pas, cela leur est égal, que tu les avertisses ou non: ils ne croiront jamais.  Allah a scellé leurs cœurs et leurs oreilles; et un voile épais leur couvre la vue} al Baqara 6

  • La confusion, la sournoiserie, la lâcheté et la traîtrise des dissimulateurs :

{Il y a ceux qui disent: ‹Nous croyons en Allah et au Jour dernier!› tandis qu’en fait, ils n’y croient pas.  Ils cherchent à tromper Allah et les croyants; mais ils ne trompent qu’eux-mêmes, et ils ne s’en rendent pas compte.  Il y a dans leurs cœurs une maladie (de doute et d’hypocrisie), et Allah laisse croître leur maladie. Ils auront un châtiment douloureux, pour avoir menti.  Et quand on leur dit: ‹Ne semez pas la corruption sur la terre›, ils disent: ‹Au contraire nous ne sommes que des réformateurs!›  Certes, ce sont eux les véritables corrupteurs, mais ils ne s’en rendent pas compte. Et quand on leur dit: ‹Croyez comme les gens ont cru›, ils disent: ‹Croirons-nous comme ont cru les faibles d’esprit?› Certes, ce sont eux les véritables faibles d’esprit, mais ils ne le savent pas.} al Baqara 8

Chacun est responsable de ses convictions  et de ce qu’il fait de ses convictions  et de ce que ses convictions font de lui sur le plan spirituel et existentiel. La langue comme interprétation de sens ou traduction de signe est engagement sur un de ces trois chemins et à ce titre elle est responsabilité.

La langue arabe et la langue française se rejoignent magistralement sur cette notion de témoignage qui engage la responsabilité individuelle et collective. En effet  être responsable c’est avoir la capacité et la charge à donner réponse. En arabe être mess’oul c’est exactement avoir la capacité, la fonction et la charge de répondre aux questions et notamment à celle-ci : qu’as-tu fait de ton esprit, de ton savoir, de ta jeunesse, de ton argent, de ton temps, de tes dons… ? Hélas nous agissons comme des analphabètes bilingues c’est-à-dire des irresponsables dans toutes les conjugaisons,  des insouciants en tout lieu et en tout moment indépendamment des circonstances les nôtres ou celles de nos ennemis :

{Nous avons destiné à l’Enfer un grand nombre de djinns et d’hommes qui ont des cœurs pour ne pas comprendre, des yeux pour ne pas voir et des oreilles pour ne pas entendre. Comparés à des bestiaux, ils sont plus égarés encore. Tels sont ceux qui vivent dans l’insouciance !} Al-A’raf 179.

L’engagement n’était pas dans la quête de grands diplômes ni dans  la démagogie de spectacle mais dans les problèmes de fond  c’est-à-dire dans les questions relatives à l’exercice de ses devoirs de musulmans envers Dieu et envers les hommes. Pas de bavardage ni de discours stériles mais la quête de la vérité comme le veut  l’enseignement de Mohamed « saws) :

« Vous n’aurez point la foi tant que vous n’aurez pas inspiré aux autres l’amour de la vérité »

« La religion c’est le bon conseil et la loyauté… Pour Dieu, pour Son Livre, pour Son Prophète, pour les  gouvernants des musulmans et pour l’ensemble des gens du commun »

Tout le travail de sape est de vider les mots arabes de leur sens coranique et de les emprisonner d’une manière docte dans une historicité ou une linguistique pour leur enlever le cachet divin de Révélation, de vérité. L’expérience de l’Occident dans sa lutte contre l’Eglise est mise à profit : profanation de l’islam, désacralisation de ses valeurs, laïcisation de ses préceptes, nationalisation de sa dimension pour lui enlever l’universel de son message.

C’est dans ce cadre général que nous réagissons sur quelques  thèses de doctorat sur l’islam et sur  les musulmans dans leur approche moderniste  sur la théo politique, la théo économie, la théo mercatique, l’économie de dévotion,  l’économie islamique,  l’islam politique, le tourisme cultuel, le marketing  théo-politique à la Mecque…  Cette réaction est la même devant ce qu’on appelle l’islamologie qui croit que  la rupture épistémologique, la linguistique moderne générale de Saussure jusqu’à la grammaire générative de Chomsky ou l’analyse narrative de Greimas et des néo constructivistes permet de comprendre le Qur’ân, la voie islamique et le cœur des musulmans pour proposer une voie d’Ijtihad qui permet au musulman non pas de se réformer mais de réformer leur Qur’ân, leur Sunna non plus Révélation mais production littéraire, création  intellectuelle.

Nos responsabilités

Il est vrai que notre comportement festif et irresponsable travestit le culte et le rend aux yeux de l’étranger à l’islam  presque une forme de carnaval païen. Nous fabriquons notre propre échec en fabriquant par notre comportement ridicule l’argumentaire des détracteurs de l’islam. Ces derniers sans probité préfèrent confondre la faille des musulmans avec l’islam et refuse de voir l’islam dans sa globalité et qui ne se reconnait pas dans notre misère morale, sociale, politique et économique. Nous devenons des faussaires, des fabricants de fausses monnaies, et nous l’injectons dans le circuit de la culture mondiale et elle nous revient en pire par effet boule de neige entretenu par les islamophobes. Le microbe c’est nous-mêmes qui le produisons, les détracteurs ne font que le mettre en incubation puis le propager et l’inoculer à plus grande échelle. Le Qur’ân énonce cette vérité sans détours :

{Ce qui vous arrive de néfaste provient de vous-mêmes (de vos propres agissements et comportements)}

Nous demeurons pourtant au-delà de nos égarements et de notre irresponsabilité une latence de potentialité, une virtualité d’islam authentique qui peut se réaliser pour le bien de l’humanité et pour le malheur des idoles et des idolâtres, des tyrans et de leurs courtisans. Notre responsabilité est de continuer à témoigner et à chercher des arguments et des moyens de défense en attendant l’éveil islamique qui s’annonce déferlant sur le monde comme une marée spirituelle salvatrice.

Notre responsabilité nous devons la faire partager en priorité par les jeunes qui ont un potentiel de cognition car ils sont la relève capable de vivre son temps et de prendre en charge ses défis. Ces jeunes, en particulier ceux qui traitent de l’islam et des musulmans doivent se libérer du regard des orientalistes et des islamologues français pour former leur propre regard à la lumière du Qur’ân et de la Sunna tels qu’ils s’offrent à eux sans la falsification du détour par autrui.

Le Qur’ân met en relief l’importance du rôle de la jeunesse dans le projet de libération contre la Tyrannie et contre l’idolâtrie : Abraham, David, Salomon, Joseph, Saleh, Houd, Moise, Jésus, Mohamed, leurs disciples et compagnons sont dans leur majorité des jeunes remplis de foi et de vitalité.  Leur science et leur force sont au service d’une cause juste. Chaque jeudi ou vendredi matin soir nous sommes invités à lire et à méditer la Sourah al Kahf dont nous nous allons attirer l’attention sur trois points que chaque jeune impliqué dans un travail de recherche théorique ou pratique ne doit pas perdre en vue s’il se met en tête qu’il est au service d’une cause et qu’il est représentant d’une communauté de foi :

  • Le premier point est le modèle de foi des jeunes gens de la caverne qui ont fui matériellement et symboliquement la cité impie pour ne pas corrompre leur foi. Le récit Qur’ânique en réalité ne parle pas de fuite mais de résurrection dans une dialectique entre l’apparent et le caché, le passé et l’avenir, la forme et le fond :

{Nous avons placé ce qu’il y a sur la terre pour l’embellir, afin d’éprouver (les hommes et afin de savoir) qui d’entre eux sont les meilleurs dans leurs actions.  Puis, Nous allons sûrement transformer sa surface en sol aride.  Penses-tu que les gens de la Caverne et d’ar-Raquim ont constitué une chose extraordinaire d’entre Nos prodiges?  Quand les jeunes se furent réfugiés dans la caverne, ils dirent : ‹Ô notre Seigneur, donne nous de Ta part une miséricorde; et assure nous la droiture dans tout ce qui nous concerne›.  Alors, Nous avons assourdi leurs oreilles, dans la caverne pendant nombreuses années.  Ensuite, Nous les avons ressuscités, afin de savoir lequel des deux groupes saurait le mieux calculer la durée exacte de leur séjour.  Nous allons te raconter leur récit en toute vérité. Ce sont des jeunes gens qui croyaient en leur Seigneur; et Nous leurs avons accordé les plus grands moyens de se diriger [dans la bonne voie].  Nous avons fortifié leurs cœurs lorsqu’ils s’étaient levés pour dire: ‹Notre Seigneur est le Seigneur des cieux et de la terre: jamais nous n’invoquerons de divinité en dehors de Lui, sans quoi, nous transgresserions dans nos paroles.  Voilà que nos concitoyens ont adopté en dehors de Lui des divinités. Que n’apportent-ils sur elles une preuve évidente? Quel pire injuste, donc que celui qui invente un mensonge contre Allah? Et quand vous vous serez séparés d’eux et de ce qu’ils adorent en dehors d’Allah, réfugiez-vous donc dans la caverne: votre Seigneur répandra de Sa miséricorde sur vous et disposera pour vous un adoucissement à votre sort›. } al kahf 7 à 16

La quête de la vérité prime sur toute autre considération sociale, intellectuelle ou politique. La quête de la vérité ne peut emprunter qu’un chemin celui de la droiture et ne vouloir comme récompense que la miséricorde divine. Elle ne peut être animée que par un seul moteur : le monothéisme. Les mots étincelants empruntés à la rhétorique grecque, à la casuistique cléricale ou au monde du spectacle de la post modernité sont à bannir s’ils portent un risque de contradiction avec l’islam, ses valeurs et ses principes. Pour cela il faut s’armer d’islamité maitrisée avant de se confronter aux outils conceptuels, lexicaux ou sémantiques de la modernité et post modernité. Les mythes de Prométhée ou du péché originel ont été mis à mort par l’esprit scientifique de l’être Qur’ânique dès que l’idée du monothéisme a pénétré le cœur des bédouins arabes faisant d’eux des tombeurs d’idoles. Allah Akbar fait trembler les tyrans et prosterner les croyants. L’ordre nouveau est dans l’islam bien compris et bien appliqué avec les mots et la langue qui ont mis fin à l’ordre ancien et qui ont apporté à l’Europe sa Renaissance.

  • Le second point est le primat à donner sur le sens et ne pas se contenter de l’accessoire, de l’apparent ou de la forme. Les versets suivants montrent qu’il n’est pas important de savoir le nombre de reclus dans la caverne mais de savoir la finalité, le principe, les mobiles, l’issue finale de la réclusion et en tirer les enseignements pour construire sa vie dans tous les domaines de l’existence ontologique, sociale, affective et spirituelle :

{Ils diront: ‹ils étaient trois et le quatrième était leur chien›. Et ils diront en conjecturant sur leur mystère qu’ils étaient cinq, le sixième étant leur chien et ils diront: ‹sept, le huitième étant leur chien›. Dis: ‹Mon Seigneur connaît mieux leur nombre. Il n’en est que peu qui le savent›. Ne discute à leur sujet que d’une façon apparente et ne consulte personne en ce qui les concerne.  Et ne dis jamais, à propos d’une chose: ‹Je la ferai sûrement demain›.  sans ajouter: ‹Si Allah le veut›, et invoque ton Seigneur quand tu oublies et dis: ‹Je souhaite que mon Seigneur me guide et me mène plus près de ce qui est correct›.  Or, ils demeurèrent dans leur caverne trois cent ans et en ajoutèrent neuf (années). Dis: ‹Allah sait mieux combien de temps ils demeurèrent là. A Lui appartient l’Inconnaissable des cieux et de la terre. Comme Il est Voyant et Audient! Ils n’ont aucun allié en dehors de Lui et Il n’associe personne à Son commandement. } al Kahf  22 à 26

Le signe n’est qu’un indice dans la quête de sens. La quête du signe est avant tout une quête de signification. Au delà des conjectures et des conjonctures ce qui doit guider notre éthique, notre esthétique et notre cognition est le principe de sens : la cause ultime, la finalité ultime. Nos sens ne perçoivent qu’une infime partie du monde connu. Notre savoir est imparfait, limité. Dieu nous a donné à croire, à lire et à méditer sur une partie de l’Inconnaissable des Cieux et de la terre pour donner une autre perspective à notre regard trop distrait par l’apparat et l’ostensible de la richesse, des beaux discours, des belles théories, des tentations et des séductions de tout genre dont la pire est celle de l’ego qui se flatte au lieu de se blâmer. Ce signe pour qu’il soit un signifiant il ne peut être déboité de son référentiel moral, idéologique, culturel et social. Si en toute logique linguistique le signe, le rite, la praxis, le texte musulmans  ne peuvent être  signifiant dans un contexte, une démarche ou une langue non Qur’ânique comment peuvent-ils être signifiés dans un contexte, une démarche et une parole volontairement anti islamique ?

Le texte Qur’ânique dans toute sa splendeur révèle l’étendue de la bataille idéologique c’est-à-dire la bataille de signification et d’appropriation des idées et du principe du sens :

{Et récite ce qui t’a été révélé du Livre de ton Seigneur. Nul ne peut changer Ses paroles. Et tu ne trouveras, en dehors de Lui, aucun refuge.  Fais preuve de patience [en restant] avec ceux qui invoquent leur Seigneur matin et soir, désirant Sa Face. Et que tes yeux ne se détachent point d’eux, en cherchant (le faux) brillant de la vie sur terre. Et n’obéis pas à celui dont Nous avons rendu le cœur inattentif à Notre Rappel, qui poursuit sa passion et dont le comportement est outrancier.  Et dis: ‹La vérité émane de votre Seigneur›. Quiconque le veut, qu’il croit, et quiconque le veut qu’il mécroie›.} al Kahf  27 à 29

{Ceux qui croient et font de bonnes œuvres, vraiment Nous ne laissons pas perdre la récompense de celui qui fait le bien.} al Kahf 30

  • Enfin le Qur’ân nous montre par la conjugaison du symbole, du signe, de la réalité au delà du seul apparent visible que du verset 7 au verset 46 il y a une seule loi qui gouverne le monde de l’inerte et du vivant, du visible et du caché, d’hier et de demain :

{Et propose-leur l’exemple de la vie ici-bas. Elle est semblable à une eau que Nous faisons descendre du ciel; la végétation de la terre se mélange à elle. Puis elle devient de l’herbe desséchée que les vents dispersent. Allah est certes Puissant en toutes choses!  Les biens et les enfants sont l’ornement de la vie de ce monde. Cependant, les bonnes œuvres qui persistent ont auprès de ton Seigneur une meilleure récompense et [suscitent] une belle espérance.} al Kahf  45 à 46

Cette loi, la dialectique universelle, gouverne les oppositions et les devenirs en perpétuel changement entre l’aridité d’une terre stérile ou asséchée, d’un cœur malade, d’un esprit vain, d’une génération corrompue ou d’une civilisation en décadence  et la fertilité d’une terre arrosée, d’un cœur purifié, d’un esprit dynamisé, d’une génération en conquête de son avenir, d’une civilisation en déploiement moral, spirituel, économique, social et intellectuel. Quand le Qur’ân énonce cette vérité qui semble évidente il y a sans doute matière à réflexion autre que le constat simpliste que nos sens aperçoivent chaque jour et chaque nuit :

{Dans l’alternance de la nuit et du jour il y a certainement un signe}

La même loi préside au sens du signe qui se cache derrière  l’alternance des signes : les indices pour découvrir la vérité dans le symbole  qui forme la représentation de la langue, de l’atome ou de la parole divine : l’unité dans la diversité, la variété dans l’unité comme les différences et la pluralité de la création obéissant à un seul principe fédérateur, signifiant, cohérent et immuable :

{Alif, Lam, Ra. Voici les versets du Livre plein de sagesse} Yunès 1

{Alif, Lam, Ra. C’est un Livre dont les versets sont parfaits en style et en sens, émanant d’un Sage, Parfaitement Connaisseur.} Houd 1

{ Alif, Lam, Ra. Tels sont les versets du Livre explicite.  Nous l’avons fait descendre, un Qur’ân en langue arabe, afin que vous raisonniez.} Yussef 1

{Alif, Lam, Mim, Ra. Voici les versets du Livre; et ce que t’a été révélé par ton Seigneur est la vérité} ar Ra’âd 1

{Alif, Lam, Ra. Voici le livre que nous avons fait descendre sur toi, afin que – par la permission de leur Seigneur – tu fasses sortir les gens des ténèbres vers la lumière, sur la voie du Tout Puissant, du Digne de louange (Al Hamid)} Ibrahim 1

{Alif, Lam, Ra. Voici les versets du Livre et d’une Lecture explicite.} al Hijr 1

{Ta, Sin. Voici les versets du Qur’ân, un Livre explicite} An Naml 1

{Sad. Par le Qur’ân, au renom glorieux (Zikr) !} Sad 1

{Noun. Par la plume et ce qu’ils écrivent!} al Qalam 1

Des centaines de milliers de milliards de combinaisons, d’alternances et de modèles d’harmonie dans la lettre de l’inerte et du vivant, du scriptural et du génétique, de la physique et de la chimie, de l’homme et du cosmos pour témoigner par un seul Livre d’une seule vérité, celle d’Allah Al Ahad Al Qahar l’Immuable sans associé ni rival :

{Quand bien même tous les arbres de la terre se transformeraient en plumes, et quand bien même la mer, grossie de sept autres mers, deviendrait un océan d’encre pour écrire la Parole divine, que Dieu aurait encore d’autres messages à transmettre ! Car Dieu est, en vérité, le Tout-Puissant, le Sage.} Luqman – 27.

C’est cette vérité sur la richesse prodigieuse de la multiplicité par l’Unicité qui est énoncé d’une autre manière

{Dis : «Si la mer se changeait en encre pour transcrire les paroles de mon Seigneur, la mer serait assurément tarie avant que ne soient épuisées les paroles divines, dussions-nous y ajouter une quantité d’encre égale à la première.»} Al-Kahf – 109.

Cette richesse met en défi la langue Arabe, la langue la plus riche et la plus complexe dans ses combinaisons, pour témoigner de la  richesse langagière du Qur’ân et de son défi littéraire aussi bien dans sa langue originelle que dans ses traductions :

{Si vous êtes dans le doute, de ce que Nous Avons Révélé à Notre Serviteur, apportez-donc une Sūrah qui lui soit semblable et convoquez vos témoins, à l’exclusion d’Allah, si vous êtes véridiques. Si vous ne le faites pas, et vous ne le ferez point, craignez-donc le Feu dont la proie est d’hommes et de pierres,  préparé pour les mécréants.} al Baqarah 24

{La plupart d’entre eux ne suivent que conjecture. La conjecture ne dispense en rien de la Vérité. Certes, Allah Est Tout-Scient de ce qu’ils font. Il n’est pas de mise que ce Qur’ān puisse être inventé de la part d’un autre qu’Allah. Mais c’est une corroboration de ce qui existe déjà et précision du Livre. Sans aucun doute, cela vient de la part du Seigneur des Univers. Ou bien disent-ils qu’il l’a controuvé ? Dis : « Apportez alors une Sūrah qui lui soit semblable et convoquez qui vous pourrez, à l’exclusion d’Allah, si vous êtes véridiques. » Bien plus, ils démentirent ce dont ils n’ont aucune notion de sa science, et dont ils n’ont encore reçu son interprétation. Ainsi ont démenti ceux qui étaient avant eux. Regarde alors quel ne fut le sort des injustes.} Younes 36

  • Le troisième point est la démarche initiatique sur le chemin de l’islam, de ses valeurs, de ses pratiques et de son engagement dans la vie politique, sociale, culturelle, intellectuelle comme d’ailleurs le met en exergue la Sourah al Kahf à travers le récit des jeunes gens cachés dans la caverne pour protéger leur foi des tyrans, de Moise en quête de savoir, de Zul-al-Qarnayn dans ses expéditions de l’Orient à l’Occident pour y faire régner la justice et le sens de la foi. Ce point, le troisième donc,   est résumé dans la phrase contractuelle entre Moise et Khadr le sage envoyé par Dieu pour enseigner à Moise qu’au dessus de tout savant il y a plus savant :

{Comment endurerais-tu sur des choses que tu n’embrasses pas par ta connaissance?} al Kahf  68

La relation entre l’apprenant et son maitre est une relation de respect et d’obéissance. Elle exige de l’apprenant de la patience et une stratégie d’apprentissage qui exige du temps pour se former et devenir efficace. Elle exige du maitre, du savoir, de la patience et une stratégie pédagogique pour mettre en place des environnements de situation de formation. La relation entre l’apprenant et le savoir est dynamique, elle n’est intéressante que si elle change le rapport de l’apprenant au savoir puis à la finalité du savoir et enfin à la responsabilité de ce savoir. Il ne s’agit pas de se gaver de mots, de concepts et de formalismes mais de s’imprégner du principe de sens. Cela exige des efforts pénibles, des moments de découragements, des abandons, de la reprise de confiance car le moteur n’est pas intellectuel mais spirituel.

La cognition est un instrument. Elle s’éduque et se développe par l’effort et la concentration qui s’appuient sur  l’endurance pour supporter cette éducation qui souvent va à contrario de l’appel de l’ego paresseux et vaniteux. Et c’est là ou intervient la connaissance qui se distingue du savoir. La connaissance porte sur les fins, l’éthique, l’esthétique et les mobiles tant du savoir que  de l’action. Elle est la substance qui donne au cœur une visée, à l’esprit une intention, à une génération un projet d’histoire. Le savoir porte sur  le contenu de l’information théorique ou pratique et les moyens de mise en œuvre pour trouver, stocker, diffuser, transférer et capitaliser l’information utile et efficace abstraction faite de ses fins. Le fameux «  science sans conscience n’est que ruine de l’âme » est une des formes d’expression de cette loi Qur’ânique qui met en corrélation le savoir, l’endurance et la connaissance.

Il n’est pas étonnant que vers la fin de cette Sourah un avertissement est donné  à tous ceux qui œuvrent sans principe de sens, sans finalité, sans connaissance :

{Dis: ‹Voulez-vous que Nous vous apprenions lesquels sont les plus grands perdants, en œuvres?  Ceux dont l’effort, dans la vie présente, s’est égaré, alors qu’ils s’imaginent faire le bien. } al Kahf 103

Il n’est pas étonnant aussi que la fin de la Sourah se termine par le verset merveilleux que nous avons cité plus haut et devant lequel toutes les intelligences nobles doivent se prosterner et les cœurs vivants se recueillir :

{Dis: ‹Si la mer était une encre [pour écrire] les paroles de mon Seigneur, certes la mer s’épuiserait avant que ne soient épuisées les paroles de mon Seigneur, quand même Nous lui apporterions son équivalent comme renfort›. } al Kahf  105

L’influence de la pensée cléricale et laïque dans les thèses sur l’Islam et dans la vision de l’homme dans le monde

Ceci dit nous allons revenir au thème central de notre analyse : l’influence de la pensée cléricale et laïque dans les thèses sur l’islam ( français). Dans notre analyse nous  n’allons pas jouer le jeu de la polémique et  faire le parallèle entre le voyage à Lourdes et le pèlerinage à la Mecque  et comparer les aspects festifs, conviviaux ou les   objets de souvenirs. La raison simple et objective est que les deux processus sont incomparables. Celui qui a fait le pèlerinage  à la Mecque constate qu’il n’ya aucune comparaison à faire entre le pèlerinage au Vatican ou à Lourdes. Chez les civilisés de l’Occident on ne trouve pas la même ferveur, le même émerveillement que manifestent les misérables musulmans, ces  petites gens illettrés qui viennent par exemple des arrières pays de l’Afghanistan et qui n’ont connu ni la civilisation ni  ses gadgets et qui n’éprouvent aucun besoin de porter leur regard autre que sur la Kaaba, la Mosquée sacrée ou la Mosquée du Prophète. Malgré leur rudesse et leur mélange de coutumes contraire à l’esprit de l’islam leur foi est sincère, leur vénération pour les lieux saints est sans défaut, leur amour pour Mohamed est sans commune mesure et leur ferveur religieuse est exemplaire. Chez les civilisés de l’Occident on trouve par contre de grands mots theo mercatique, marketing théocratique, économie de la dévotion, tourisme rituel, théosophie, théopolitique…Islamologie.

Nous allons plutôt  nous situer là où ça fait mal et là ou la dérive est  généralisée dans ce que nous avons pu lire sur ce sujet.

  • La première dérive est  l’influence de la culture française dont le juridisme excessif déforme  la lecture et l’interprétation du texte Qur’ânique et de la pratique rituelle du musulman.  Vidant le texte Qur’ânique de son essence on lui fait faire une lecture en opérant un transfert sémantique du sens spirituel subtil du Qur’ân vers  l’aspect formel transactionnel et contractuel du code de commerce de la  République française.  Nous restons étonnés par cette prolifération de lois pour régenter la vie et la conscience des citoyens comme fut le cas du foulard islamique. Notre étonnement n’est pas seulement dans la nature scélérate de certaines lois mais dans les sources d’inspiration idéique de cet esprit qui veut tout légiférer au mépris de l’amour supposé des chrétiens pour leurs semblables. Si Victor Hugo le révolutionnaire de la littérature et du théâtre français a bien énoncé cette règle libertaire «  le droit d’aimer est aussi sacré que le droit de penser ». Nous avons le devoir d’aimer notre religion, notre Prophète et les valeurs de l’Islam y compris la pudeur de nos femmes fières dans leur voile. Nous avons le devoir de vous rappeler que si l’Ancien Testament est favorable aux lois,  Jésus  est venu pour mettre fin aux lois iniques en proclamant contre les Pharisiens et les Légionnaires romains : «  le règne de la fin est fini, c’est le temps de l’amour ».

Nos  étudiants d’extraction musulmane sous la direction  d’islamologues et d’orientalistes laïcs  et religieux s’interrogent donc   sur l’échange inégal et inique entre le Dieu des musulmans et l’Homme  au regard des efforts financiers et physiques de ce dernier dans  l’accomplissement  de son  pèlerinage. Nous assistons à des débats byzantins du type «Comment croire en une égalité et en une équité dans une transaction  entre un divin supposé supérieur et absolu et un homme supposé inférieur et relatif ».

  • La seconde dérive dans  la quête de l’égalité entre Dieu et l’homme est née du  mythe de l’égalitarisme laïciste qui refuse la loi de la différence qui gouverne le monde et le principe général de la réalité tant de la foi que de la réalité du monde : l’Unicité du Créateur sans rival, sans intermédiaire, sans associé, sans oubli ni fatigue ni somnolence ni accident ni hasard. Tout est en harmonie selon le principe de l’unité gouvernant la diversité et de son corolaire la variété assemblée dans l’unité de sens, de finalité, de causalité.

L’esprit du musulman pris dans le piège de la rhétorique du verbe occidental devient sensible au principe de Saint Thomas «  je ne crois qu’en ce que je vois » et sensible à l’utopie (le non lieu) de l’égalitarisme  qui au nom du droit à l’égalité devient une négation du droit à  la différence et se laisse entraîner dans le plus grand matraquage moral, social et idéologique de la société : l’indifférenciation. C’est l’indifférenciation  qui  crée l’inégalité par l’indifférence, le nivellement démocratique par le bas, la société à deux collèges : d’un côté les égaux indifférenciés mis dans le même système impersonnel d’éducation, d’évaluation, de compétition, de travail, de promotion, de droit et de devoirs et d’un autre côté une élite  de privilégiés en compétition de passe droits, de bonne grâce, de facilité, de différenciation de traitement et de considération selon la fortune, la renommée et le pouvoir.

La mécanique montre pourtant à l’esprit cartésien que la répartition équitable et équilibré d’un mouvement pour la cohésion mécanique et la cohérence dynamique d’un système exige le recours à des sous systèmes qu’on appelle à juste titre des différentiels. Différentiel, répartiteur de vitesse, système de variation par rapport à un référentiel toute la science mathématique, physique et tout l’art technologique de l’esprit cartésien est dans la mise en équation ou la résolution de leurs paramètres. Toute les sciences physiques traitant de dynamique reposent dur les dérivées c’est-à-dire les différentielles par rapport au temps ou les changements de matière et d’énergie par rapport à des références elles-mêmes dynamiques. C’est la société savante qui veut faire de l’homme un clone, un être de plus en plus indifférenciée, asexué, homosexuel…homo…

Ecce Homo dans la confusion  de sa traduction est le drame de l’Occident : « Ceci est l’homme » (que nous recherchons) ou « Celui-ci est un Homme » de Ponce Pilate venant s’enquérir de Jésus pour l’emmener au supplice ou venant constater la mort supposé de Jésus ou encore venant constater de visu la découverte du traitre, qui a livré Jésus aux romains « celui-ci est l’homme » supplicié au lieu et place du  Rabbi (le maître)  sur une croix. De cette phrase, mal comprise, mal traduite, mal « contextée », mal  historicisée, est né le drame occidental et ses incidences sur les peuples d’Afrique et d’Asie.  Du terme Homo va venir comme de la boite de Pandore le déluge qui va engloutir une civilisation qui a fait de ses idoles démoniaques comme le sexe et l’argent des Dieux devant qui il faut lever tous les interdits de  la morale chrétienne. Les péchés capitaux, cupidité, luxure, fornication, gourmandise, convoitise, deviennent symboles de réussite sociale.

Du terme Homo est né la tragédie de l’indifférenciation et du mythe égalitariste qui refuse la différence d’autrui. Le terme qui signifie Homme est Homo en grec c’est à, dire semblable. Nous sommes tous pareils comme des triangles homothétiques : mêmes angles de vues, même rapport de grandeur. Nous sommes une figure « semblable à l’image de Dieu » mais dont la seule distinction est dans sa  différence avec le règne minéral, animal et végétal. Cette différence d’espèce  la modernité a finit par la nier avec le Darwinisme cette quête chrétienne sur l’origine de l’homme et le néo Darwinisme la même quête vidée de toute substance religieuse pour devenir un matérialisme négateur des progrès de la science et de l’anthropologie.

Dans la langue arabe du Qur’ân   Al Insane n’est pas l’Homo le semblable mais l’être distinctif et dont la distinction est une opposition  au Wahch ( le sauvage, l’asocial, le monstre, le rebelle à Dieu, le caché dans les ténèbres). Il est l’être social issue du verbe « Anassa » en arabe tenir compagnie, socialiser, apporter du réconfort, se rapprocher de la lumière. C’est toute la grandeur de l’homme qui s’exprime dans le sens d’Insane qui est véhiculé par l’énoncé arabe du Qur’ân et que le terme Homo escamote. C’est tout le sens, autre que légiférer des lois iniques que Moise accomplit dans sa quête de vérité : «  Anassa nâran : Il s’est approché d’un feu ». C’est toute la différence entre l’homme, al Ins et al Djin. Al Ins est cet être  crée d’argile puante puis honoré par le souffle divin qui lui a donné vie,  esprit et vocation alors que le Djin est cet être créé de feu et dont est issu Satan le maudit. Dans l’appel coranique ya ayouha al Insane c’est l’humanité dans sa vocation plurielle et libre qui est appelé à l’universel, à son statut d’être honoré par Dieu qui ne peut et ne doit se laisser conduire comme un mouton à l’abattoir ni se comporter comme un orgueilleux, rebelle et transgresseur comme Satan ;

C’est cette différence que les mille ans d’emprunts inavoués et latinisés à la civilisation islamique que l’Occident n’a pu comprendre ni importer : l’honorificat de cet Insane qui est imprescriptible, inviolable, sacré :

{Nous avons honoré les descendants d’Adam}

C’est cet honorificat qui fait de la langue et des idiomes un moyen de communication, un vecteur de connaissance, un lien de reconnaissance mutuelle et non une arme de négation identitaire, une politique d’hégémonie culturelle, un langage nihiliste et cynique :

{Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous vous avons répartis en peuples et en tribus, pour que vous fassiez connaissance entre vous. En vérité, le plus méritant d’entre vous auprès de Dieu est le plus pieux. Dieu est Omniscient et bien Informé.} Hujurat – 13.

L’islam considérant l’être humain comme Ins fait de l’égalité un acte de foi par le don de soi et l’esprit de solidarité, une épreuve dans l’accomplissement de la justice sociale et de la piété et non une formalité juridique imposée par le jacobinisme étatique.

{Dieu a favorisé certains d’entre vous plus que d’autres, dans la répartition de Ses dons. Or, ceux qui ont été favorisés ne sont nullement disposés à se démettre du surplus de leurs richesses au profit de leurs esclaves, au point que maîtres et esclaves y deviendraient tous égaux. Renieraient-ils donc les bienfaits de Dieu?} An-Nahl 71.

Le partage égal entre hommes libres et esclaves prônés par le Qur’ân est inimaginable dans République  égalitariste qui est supposé être, étymologiquement, Res Publica, chose publique. Niant les mille ans d’apport islamique humaniste l’eurocentrisme n’a conservé que l’esprit colonisateur des grecs et des romains dont il se réclame : Homo. Tous ce qui n’est pas semblable à nous, à nos coutumes, à nos croyances et à nos valeurs est l’autre, ce barbare, ce sauvage que les romains et les grecs exterminaient car ils ont décidé de nier l’humanité qui est en lui et par conséquent de lui refuser tout droit à vivre ou à posséder autre que ce que lui accorde le privilège du  statut de sous humain, esclave,  colonisé,  païen ou gentil sans terre, sans patrie, sans religion qui n’a pour proposition de paix que celle des légionnaires : « épargnez ceux qui se soumettent et domptez les superbes ».

Aucune loi ne peut aller contre un cœur réticent au don, au partage, au respect d’autrui et à l’entraide. La foi et l’intérêt pour une récompense plus grande ou le châtiment sans fin s’il y a négation  de l’égalité des droits devant la justice, devant les besoins, devant les devoirs sans nier la différence des besoins, des devoirs de solidarité, des dons, des compétences, des mérites et des faveurs légitimes issues du travail licite et socialement utile.

La loi de la dialectique qui gouverne le monde exige par justice et par nécessité de créer la dynamique sociale qu’il y ait différence et compétition dans le bien ou opposition quand il y a divergences sur la notion de bien, de justice et de vérité et quand il y a nécessité de complémentarité tout en montrant la richesse, la sagesse et la générosité du Donateur bienfaiteur :

{Il y a deux variétés de mer : l’eau de l’une est douce, limpide et d’un goût agréable, celle de l’autre est salée et saumâtre. Et pourtant l’une et l’autre vous procurent une chair fraîche que vous mangez, et vous en retirez des perles dont vous vous parez. Et l’on y voit des vaisseaux fendre avec bruit les flots, pour vous permettre d’aller à la recherche des bienfaits de votre Seigneur. Peut-être Lui en serez-vous reconnaissants !} Fatir 12.

{Ne vois-tu pas que Dieu fait tomber du ciel une eau par laquelle Nous faisons sortir du sol des plantes qui donnent des fruits de couleurs différentes? Et dans les montagnes aussi, il y a des stries de diverses couleurs, blanches et rouges aux tons variés, ainsi que des roches d’un noir foncé.} Fatir 27.

{ Sont également de couleurs différentes les hommes, les animaux et les bestiaux. Et c’est ainsi que, de tous les serviteurs de Dieu, seuls les savants Le craignent véritablement. En vérité, Dieu est Puissant et Clément.} Fatir 28

Nous sommes différents et cette différence fait partie de notre credo de foi. Nier cette différence c’est nier la sagesse de Dieu et l’étendue de sa compétence à créer à l’infini ce qu’il veut.

{Considère comment Nous avantageons les uns par rapport aux autres. Mais les différences seront bien plus grandes et les privilèges bien plus marqués encore dans la vie future.} Al-Isra – 17.21.

{Et c’est bien pour être si différents qu’Il les a créés.} Hud – 119.

Le principe de sens veut que l’on se pose la question sans complexe ni mystification idéologique :

{Est-ce que sont semblables l’aveugle et le voyant ?}

{Est-ce que sont semblables ceux qui savent et ceux qui ne savent pas ?}

Reconnaître cette différence c’est l’accepter avec toutes ses conséquences : engager la lutte si elle porte préjudice à l’islam ou à la communauté musulmane ou la tolérer si elle nous porte la contradiction sans nous agresser. D’ailleurs ici nous ne faisons pas couvrir d’opprobre ou d’anathèmes ou d’apostasie ceux qui pensent différemment nous ne faisons que montrer la faute ou l’erreur de jugement pour que les sensés fassent l’économie d’une mauvaise expérience et que les moins avertis s’éveillent et soient plus perspicaces car ils ont une mission et une vocation qui exigent de l’intelligence et du sens.

La différence est la règle et c’est pourquoi nous devons l’accepter et surtout ne pas fanfaronner pour mépriser les autres car elle nous montre la responsabilité vis-à-vis des autres pour les ramener vers la raison, vers la foi, vers le bien, vers le beau sans perdre patience sans désespérer et surtout en remerciant Dieu de ne pas être du nombre des égarés. C’est davantage la faute ou l’erreur ou la confusion qui nous intéressent pour lever les doutes, les équivoques et contribuer à indiquer tout ou partie du chemin à prendre sans se donner des titres de vertu et le droit de mépriser autrui ou de l’insulter. Le fautif comme l’égaré nous intéressent comme être à accompagner, à convaincre, à réveiller sans contrainte ni propagande ni manipulation. La différence est la règle même en matière linguistique :

{Ô Nass ( les hommes compris comme Insane) ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous vous avons répartis en peuples et en tribus, pour que vous fassiez connaissance entre vous. En vérité, le plus méritant d’entre vous auprès de Dieu est le plus pieux. Dieu est Omniscient et bien Informé.} Al-Hujurat – 13.

{Et parmi Ses signes, il y a aussi la création des Cieux et de la Terre, la diversité de vos langues et de vos couleurs. En vérité, il y a en cela des signes pour des esprits éclairés.} Ar-Rum – 22.

Le devoir de connaissance, de reconnaissance et d’échange est un impératif religieux et humaniste qui exige le respect de la différence ethnique, linguistique, culturelle, sociale et religieuse.

Omar Mazri et  Zeinab Abdelaziz

Le Divin « piégé » ?! Partie 2/3

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